Dominique Meeùs
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La pensée d’Ernest Solvay et la science de son temps, Ernest Solvay et son temps, Archives de l’ULB, Bruxelles, 1997, p. 149-165.
Les Notes, lettres et discours d’Ernest Solvay ont été publiés en deux volumes, Politique et sociale, d’une part, Gravitique et physiologie, de l’autre. Division bien compréhensible en ce qu’elle traduit la probabilité de deux types de lecteur distincts, mais division qui va à l’encontre de la pensée même de l’auteur. Car, de la première à la dernière page, l’œuvre publiée de Solvay a un message à transmettre : unité, et plus précisément unification rationnelle et positive, depuis la physique fondamentale jusqu’au progrès technique et à la logique sociale appelée à présider la gestion politique, sociale et économique des sociétés.
Pour Solvay, la science de la société fait partie de la science de la nature. Il a fondé en 1891 ou 1892 l’Institut de Physiologie. Il fonde en 1894 l’Institut des sciences sociales dont il confie la direction à Hector Denis, Guillaume De Greef et Émile Vandervelde (Crombois 1997:217). Il compte sur ses collaborateurs de l’Institut pour élaborer ses idées, mais ceux-ci s’intéressent plus à la sociologie dans la voie ouverte par Quetelet ou au socialisme d’inspiration marxiste1.
Ernest Solvay, lorsqu’il propose au Sénat des mesures qui, selon lui, instaureraient la « légitimité sociale positive, telle qu’elle devrait résulter des lois physico-chimiques appliquées à la société2 », se présente comme un porte-parole direct de cette loi inflexible et unique. Il a en effet l’honnêteté de préciser que sa loi n’est pas reconnue par les spécialistes, ceux, par exemple, que rassemble l’Institut des sciences sociales qu’il a créé. À ses collègues qui, au Sénat, pourraient s’attendre à ce qu’il expose des solutions fruits de ses travaux, il explique : « Je suis vraiment en assez désagréable situation, car on oublie que je me trouve vis-à-vis de l’Institut comme je le suis vis-à-vis du Sénat, du gouvernement et du public lui-même. Je veux dire que je me trouve devant des hommes naturellement pleins de bonnes dispositions, mais néanmoins imprégnés, comme tous les autres, des doctrines régnantes dont ils doivent préalablement se débarrasser3. » En d’autres termes, Solvay ne cherche pas dans la science de son temps les moyens de résoudre les problèmes sociaux et économiques, il crée une doctrine scientifique d’où devraient résulter tout à la fois la solutions de ces problèmes et une transformation de la science de son temps.