Manuel d’économie politique de l’Académie des sciences de l’URSS
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La féodalité est née de la décadence de la société esclavagiste et de la désagrégation de la communauté rurale dans les tribus qui avaient conquis les États esclavagistes. Dans les pays qui n’ont pas connu l’esclavage, la féodalité est née de la désagrégation de la communauté primitive. L’aristocratie des gentes et les chefs militaires des tribus s’emparèrent d’une grande partie des terres qu’ils distribuèrent à leurs proches. Les paysans furent peu à peu asservis.
La base des rapports de production de la société féodale était la propriété du seigneur sur la terre et sa propriété limitée sur le producteur : le paysan serf. La propriété féodale coexistait avec la propriété individuelle du paysan et de l’artisan fondée sur le travail personnel. La société féodale reposait sur le travail des serfs. L’exploitation féodale se traduisait par la corvée à laquelle les paysans étaient astreints au profit du seigneur, ou par le paiement à celui-ci d’une redevance en nature et en argent. Le servage était souvent pour le paysan presque aussi dur que l’esclavage. Mais le régime féodal offrait certaines possibilités de développement aux forces productives, puisque le paysan pouvait consacrer une partie de son temps à cultiver sa terre et avait quelque intérêt à son travail.
La loi économique fondamentale de la féodalité réside dans la production d’un surproduit pour la satisfaction des besoins des p. 72seigneurs féodaux en exploitant les paysans dépendants sur la base de la propriété du féodal sur la terre et de sa propriété limitée sur les producteurs : les paysans serfs.
La société féodale, surtout au début du Moyen âge, était divisée en une foule de petites principautés et de petits États. Les couches sociales dominantes de la société féodale étaient la noblesse et le clergé. La paysannerie n’avait aucun droit politique. La lutte de classe entre paysans et seigneurs féodaux s’est poursuivie tout au long de l’histoire de la société féodale. L’État féodal, expression des intérêts de la noblesse et du clergé, les aidait activement à maintenir leur droit de propriété féodale sur la terre et à intensifier l’exploitation des paysans opprimés et dépourvus de tout droit.
Sous le régime féodal, l’agriculture jouait un rôle primordial et l’économie était essentiellement une économie naturelle. Avec le développement de la division sociale du travail et de l’échange, les vieilles cités, qui avaient survécu à la chute de l’esclavage, connurent une animation nouvelle ; d’autres apparurent. Les villes étaient les centres de l’artisanat et du commerce. L’artisanat était organisé en corporations qui visaient à empêcher la concurrence. Les commerçants étaient groupés en guildes de marchands.
Désagrégeant l’économie naturelle, les progrès de la production marchande entraînèrent une différenciation parmi la paysannerie et les artisans. Le capital commercial hâta la décomposition de l’artisanat et contribua à l’apparition d’entreprises capitalistes : les manufactures. Les entraves féodales et le morcellement territorial freinaient l’essor de la production marchande. Des marchés nationaux se formèrent peu à peu. Des États féodaux centralisés se constituèrent sous forme de monarchies absolues.
L’accumulation primitive du capital prépara l’avènement du capitalisme. Des masses considérables de petits producteurs — paysans et artisans — furent privés de leurs moyens de production. Les grands propriétaires fonciers, les marchands et les usuriers concentrèrent entre leurs mains d’importantes richesses monétaires par l’expropriation brutale de la paysannerie, le commerce avec les colonies, les impôts et la traite des noirs. Ainsi se trouva accélérée la formation des principales classes de la société capitaliste : celle des ouvriers salariés et celle des capitalistes. C’est au sein même de la société féodale que surgirent et mûrirent les formes plus ou moins achevées du régime capitaliste.
Les rapports de production féodaux, la faible productivité du travail des paysans serfs, les restrictions corporatives entravaient le développement des forces productives. Les révoltes des serfs ébranlèrent le régime féodal et aboutirent à l’abolition du servage. La bourgeoisie prit la tête du combat contre la féodalité. Elle mit à profit la lutte révolutionnaire des paysans contre les seigneurs féodaux pour s’emparer du pouvoir. Les révolutions bourgeoises renversèrent le régime féodal, assurèrent la victoire du capitalisme et donnèrent libre cours au développement des forces productives.