Dominique Meeùs
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Par où commencer ?

Rédigé en mai 1901. Paru en mai 1901 dans l’Iskra.
Œuvres, tome 5, pp 9‑20. En ligne : www.marxists.org/francais/lenin/works/1901/05/19010500.htm

Mots-clefs : ❦ journal, comme organisateur

p. 19Le journal ne borne pas cependant son rôle à la diffusion des idées, à l’éducation politique et au recrutement d’alliés politiques. Il n’est pas seulement un propagandiste collectif et un agitateur collectif ; il est aussi un organisateur collectif. On peut à cet égard le comparer à l’échafaudage dressé autour d’un bâtiment on construction ; il ébauche les contours de l’édifice, facilite les communications entre les différents constructeurs, à qui il permet de répartir la tâche et d’embrasser l’ensemble des résultats obtenus par le travail organisé. Avec l’aide et à propos du journal se constituera d’elle-même une organisation permanente, qui ne s’occupera pas seulement d’un travail local mais aussi général et régulier, habituant ses membres à suivre de près les événements politiques, à apprécier leur rôle et leur influence sur les diverses catégories de la population, à trouver pour le parti révolutionnaire la meilleure façon d’agir sur ces événements. Les problèmes techniques — la fourniture dûment organisée au journal de matériaux, sa bonne diffusion — obligent déjà à avoir un réseau d’agents locaux au service d’un seul et même parti, d’agents en relations personnelles les uns avec les autres, connaissant la situation générale, s’exerçant à exécuter régulièrement les diverses fonctions fragmentaires d’un travail à l’échelle de toute la Russie, s’essayant à la préparation de telle ou telle action révolutionnaire. Ce réseau d’agents [*] sera justement la carcasse de l’organisation qui nous est nécessaire suffisamment étendue pour embrasser tout le pays ; suffisamment large et diverse pour réaliser une division du travail stricte et détaillée ; suffisamment ferme pour pouvoir on toutes circonstances, quels que soient les « tournants » et les surprises, poursuivre sans défaillance sa besogne propre ; suffisamment souple pour savoir, d’une part, éviter la bataille à découvert contre un ennemi numériquement p. 20supérieur qui a rassemblé toutes ses forces sur un seul point, et, d’autre part, profiter du défaut de mobilité de cet ennemi et tomber sur lui quand et où il s’y attend le moins. Aujourd’hui nous incombe la tâche relativement facile de soutenir les étudiants qui manifestent dans les rues des grandes villes. Demain la tâche sera peut-être plus malaisée, comme celle de soutenir le mouvement des sans-travail dans telle ou telle région. Après-demain, nous devrons être à nos postes pour prendre une part révolutionnaire à une révolte paysanne. Aujourd’hui nous devons exploiter la tension politique qu’a engendrée le gouvernement par sa campagne contre les zemstvos. Demain nous devrons encourager l’indignation de la population contre les abus de tel ou tel bachi-bouzouk tsariste et contribuer, par le boycottage, les campagnes d’excitation, les manifestations, etc., à lui infliger une leçon qui le fasse battre on retraite publiquement. Pour arriver à ce degré de préparation au combat, il faut l’activité permanente d’une armée régulière. Et si nous groupons nos forces dans un journal commun, nous verrons se former à l’œuvre et sortir du rang non seulement les plus habiles propagandistes, mais encore les organisateurs les plus avertis, les chefs politiques les plus capables du Parti, qui sauront à point nommé lancer le mot d’ordre de la lutte finale et en assumer la direction.

[*] Il va de soi que ces agents ne pourraient travailler avec profit que s’ils étaient très proches des comités locaux (groupes, cercles) de notre parti. En général, tout le plan esquissé par nous demande naturellement pour sa réalisation le concours le plus actif des comités, qui ont tenté maintes fois l’unification du parti et qui, nous en sommes persuadés, obtiendront cette unification un jour ou l’autre, sous une forme ou sous une autre.