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Gould, S. J. (1979). Darwin et les grandes énigmes de la vie D. Lemoine, Trans. Paris: Pygmalion/Gérard Watelet. 
Added by: admin (2008-05-05 20:58:00)   
Resource type: Book
ID no. (ISBN etc.): ISBN 2-85704-050-4
BibTeX citation key: Gould1979
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Categories: Biologie, Histoire naturelle
Keywords: évolution
Creators: Gould, Lemoine
Publisher: Pygmalion/Gérard Watelet (Paris)
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Quotes
p.188   En fait, nous devons au 19e siècle un exposé brillant, dont l’auteur surprendra sans doute beaucoup de lecteurs puisqu’i1 s’agit de Friedrich Engels. Engels a écrit en 1876, un traité intitulé le Rôle du travail dans le passage du singe à l’homme, qui ne fut publié qu’en 1896, après sa mort, et qui n’a malheureusement exercé aucune influence sur la science occidentale.
     Engels considère trois caractéristiques essentielles de l’évolution humaine : le langage, la taille du cerveau et la station debout. Il pense que la première étape a été la descente des arbres et que nos ancêtres, installés sur le sol, se sont progressivement redressés. « Ces singes, vivant sur le sol, perdirent l’habitude de se servir de leurs mains et adoptèrent une attitude de plus en plus droite. Ce fut une étape décisive du passage du singe à l’homme. » La position debout libérait les mains et permettait l’utilisation d’outils (c’est ce qu’Engels appelle le travail). Le développement de l’intelligence et le langage vinrent plus tard.
     « Ainsi, poursuit Engels, la main n’est pas seulement un outil de travail, c’est également le produit du travail. Ce n’est que par le travail, par l’adaptation à des opérations toujours nouvelles […], par l’utilisation toujours renouvelée des améliorations léguées par héritage dans des opérations nouvelles, de plus en plus complexes, que la main humaine a atteint le degré de perfection qui lui a permis de faire naître les peintures de Raphaël, les statues de Thorvaldsen, la musique de Paganini. »   Added by: Dominique Meeùs
Keywords:   bipédisme cerveau Engels évolution main singe station debout travail
pp.189-190   L’importance de l’essai d’Engels ne réside pas dans ses conclusions elles-mêmes, mais dans l’analyse politique pénétrante par laquelle il montre que la science fondait son raisonnement sur une affirmation arbitraire : la primauté du cerveau.
     À mesure que les êtres humains maîtrisaient leur environnement matériel, continue Engels, de nouvelles techniques s’ajoutèrent à la chasse primitive : l’agriculture, le filage, la poterie, la navigation, les arts et les sciences, les lois et la politique puis, finalement, « le reflet grotesque des choses humaines dans l’esprit humain : la religion ». À mesure que la richesse augmentait, des groupes d’hommes s’emparèrent du pouvoir et contraignirent les autres à travailler pour eux. Le travail, source de toutes les richesses et premier moteur de l’évolution de l’homme, fut assimilé au statut de ceux qui travaillaient pour les dirigeants. Comme les dirigeants gouvernaient par leur volonté (c’est-à-dire par l’action de l’esprit), il apparut que le cerveau était lui-même le moyen du pouvoir. Les philosophes se mirent sous la protection de l’Église ou de l’État. Même si Platon n’avait pas consciemment l’intention de soutenir les privilèges des dirigeants à l’aide d’une philosophie prétendument abstraite, sa propre position sociale l’encourageait à insister sur la primauté, la domination de la pensée, considérée comme plus noble et plus importante que le travail qu’elle supervise. La tradition idéaliste a dominé la philosophie jusqu’à l’époque de Darwin. Son influence était si subtile et si pénétrante que même des matérialistes scientifiques, mais apolitiques, tels que Darwin n’y échappèrent pas. Il faut connaître un préjugé avant de le combattre. La primauté du cerveau semblait si évidente et si naturelle qu’on la tenait pour acquise, sans se douter qu’elle reflétait un préjugé social profondément ancré, lié à la position des penseurs professionnels et de leurs protecteurs dans la communauté. Et Engels conclut :
     « On a attribué tout le mérite des progrès rapides de la civilisation à l’esprit, au développement de l’activité du cerveau. Les hommes s’accoutumèrent à expliquer leurs actes par leurs pensées et non par leurs besoins. Ainsi, à mesure que le temps passait, une vision idéaliste du monde, en particulier depuis la disparition de l’ancien monde, s’est installée dans l’esprit des hommes. Elle s’exerce aujourd’hui encore à un degré tel que même les plus matérialistes des hommes de science, comme ceux de l’école de Darwin, sont incapables d’avoir une idée claire de l’origine de l’homme, parce que, soumis à cette idéologie, ils ne peuvent reconnaître le rôle joué par le travail. »   Added by: Dominique Meeùs
Keywords:   évolution Darwin Engels esprit pensée Platon pouvoir primauté du cerveau travail
p.382   En revanche, les savanes, étendues à ciel ouvert qui gagnaient sur les anciens espaces boisés, avaient bien des richesses à offrir à des créatures susceptibles de s’y adapter. Le bipédisme, auquel les ancêtres voisins du chimpanzé s’étaient déjà essayés, fit l'affaire. Il permettait à ces animaux de rester en position debout et d’acquérir ainsi une meilleure vision de leurs proies et de leurs ennemis à travers les herbes hautes ; et surtout, il libérait les mains.

Observez les chimpanzés aujourd’hui, et vous comprendrez tout ce que les ancêtres que nous partageons avec eux avaient probablement réussi à faire avec leurs mains : porter leurs petits, se toiletter, ouvrir leur chemin à travers les fourrés, ramasser la nourriture, cueillir les baies et autres friandises, éplucher les bananes, porter les aliments à leur bouche, saisir leurs partenaires en amour, combattre leurs ennemis et leurs rivaux, chasser, faire des gestes, émettre des signaux et même utiliser des pierres et des bâtons comme armes ou comme moyen de se procurer la nourriture. Observez leurs yeux attentifs, leurs sourcils froncés, la moue de leurs lèvres lorsque leurs mains sont occupées à réaliser quelque opération délicate et manifestement réfléchie, et vous pourrez, avec un peu d’imagination, apercevoir les rouages d’une pensée en action sous ce front oblique. Ce qui s’est passé dans la jungle africaine il y a six millions d’années a joué un rôle essentiel dans l’apparition de la pensée humaine. Du cerveau à la main et, en retour, de la main au cerveau, ainsi s’initia un va-et-vient d'impulsions, s’amplifiant de lui-même, qui allait changer le monde.   Added by: Dominique Meeùs
Keywords:   bipédisme station debout savane chimpanzé main pensée cerveau
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