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Coppens, Y. (2008). L’histoire de l’homme: 22 ans d’amphi au collège de france. Paris: Éditions Odile Jacob.  
Added by: Dominique Meeùs 2012-12-22 18:13:24 Pop. 0%
      Après avoir établi ces deux listes des artisans potentiels et des outils, s’impose l’exercice de leur mise en rapport : qui a fait quoi ?
     Il n’est pas impossible du tout que certains Australopithèques aient été les tailleurs des tout premiers outillages, le Shungurien par exemple. Mais comme le Shungurien apparaît à certains comme un faciès local de l’Oldowayen, qu’un maxillaire d’Homo sp. vient d’être recueilli à Hadar dans un niveau d’au moins 2,3 millions d’années que 11 sites d’Olduvai montrent une association directe Oldowayen-Homo habilis (ou, en tout cas, ce qui est appelé comme cela par Phillip Tobias) et qu’un Oldowayen de 1,7 million d’années livre à Melka Kunturé un humerus d’Homo erectus, force est de reconnaître d’entrée une certaine indépendance à l’outil. Statistiquement, il n’en demeure pas moins vrai que ce sont les Hommes premiers, Homo habilis et Homo rudolfensis (si ce dernier existe), qui ont été les principaux tailleurs de choppers, mais ces hommes paraissent donc bel et bien avoir été précédés puis peut-être accompagnés dans cette maîtrise, par quelque(s) Australopithèque(s), comme il semble d’ailleurs qu’ils aient été suivis par des Hommes seconds, Homo ergaster et Homo erectus, sans que ladite maîtrise ait encore progressé.
     De manière comparable, il est incontestable que l’Homo erectus semble bien avoir été le principal artisan des Acheuléens, le principal tailleur de bifaces, mais, comme on vient juste de le voir, les premiers des Homo erectus faisaient bel et bien partie de l’Oldowayen (Gomboré 1 à Melka Kunturé, par exemple), tandis que les demiers des bifaces étaient bel et bien fabriqués par des Homo sapiens (Garba III à Melka Kunturé, par exemple).
      Des constatations de décalage entre Hommes et cultures ont été faites également dans les parties moyenne et supérieure du Paléolithique : on avait en effet attribué à Neandertal, les industries « grossières » à éclats du Paléolithique moyen et à Cro-Magnon tous les outillages raffinés à lames du Paléolithique supérieur ; mais voilà que Neandertal n’a plus 50 000 ou 100 000 ans, mais au moins 500 000, si ce n’est 800 000, Homo sapiens non pas 40 000, mais 500 000 et Homo sapiens sapiens, 200 000 ; voilà que c’est l’Homo sapiens et même sapiens sapiens qui fait l’outillage du Paléolithique moyen, qui comporte d’ailleurs parfois des lames, en Afrique du Nord par exemple ou au Proche-Orient, et voilà que c’est le Neandertal qui se trouve être l’artisan des premières inventions du Paléolithique supérieur (Chatelperronien). Une fois de plus, la recherche d’un rapport trop strict entre nature et culture s’avère donc décevante ; l’outillage est comme une couleur que l’on voudrait appliquer à une surface bien circonscrite et qui échapperait à ses limites et en déborderait de manière imprévisible. Le Moustérien de Neandertal est le Moustérien de Cro-Magnon ; le Paléolithique supérieur de Cro-Magnon (lorsque ce dernier est contemporain de Neandertal) est le Paléolithique supérieur de Neandertal.
     Il est amusant, à propos de ces débordements, de constater que la culture est d’abord, pendant longtemps, en retard sur la nature et qu’ensuite c’est l’inverse qui se produit ; ce point d’inversion, que j’appellerai volontiers aussi le seuil culturel d’inversion ou reverse point, ne doit se placer que vers 100 000 ans. Il est particulièrement important car il situe le moment de majorité incontestable du libre-arbitre sur la réaction instinctive, les rapports de l’un et de l’autre ayant en fait évolué de manière continue comme un sablier.
de Duve, C. (2013). Sept vies en une: Mémoires d’un prix nobel. Paris: Éditions Odile Jacob.  
Added by: Dominique Meeùs 2013-01-13 09:54:03 Pop. 0%
      Au moment où j’écris ces pages, l’humanité vient d’entrer dans une phase critique de son existence, peut-être fatale, non pas suite à un échec, mais à cause d’un succès excessif. Quand je suis né, la population du globe comptait moins de deux milliards d’individus. Elle dépasse les sept milliards aujourd’hui, faisant peser sur l’avenir du monde des menaces qui risquent de devenir bientôt intolérables. Ces menaces ont des noms : perte de biodiversité, déforestation, désertification, changement climatique, épuisement des ressources naturelles, raréfaction des sources d’énergie, pollution de l’environnement, mégapoles surpeuplées, conflits et guerres, avec, comme cause commune l’expansion démographique. Je me borne à les mentionner, vu la place abondante qui leur est accordée dans les médias. Mon propos est plutôt d’en analyser les causes.
     Je le fais en biologiste, qui voit dans l’état actuel du genre humain la conséquence de propensions qui ont été imprimées dans les gènes par la sélection naturelle. Remontons quelque cent mille ans en arrière, à l’époque où nos ancêtres parcouraient les forêts ou la savane africaines, par petites bandes de trente à cinquante individus en moyenne, avec comme objectif principal survivre et se reproduire en utilisant au mieux les ressources de leur environnement. Pour réussir dans une telle entreprise, le chacun-pour-soi était de mise, mais tempéré par l’existence en groupes, au sein desquels il était plus avantageux de s’entraider que de se chamailler. D’où l’inscription dans le génome humain de l’égoïsme de groupe qui était favorable à nos ancêtres et ne s’est pas révélé depuis suffisamment nuisible pour en être extirpé.
     Le groupe dont je parle n’était pas le seul à tenter de survivre au cœur de l’Afrique. D’autres groupes semblables lui faisaient concurrence pour les meilleurs terrains de chasse et de cueillette et pour les conditions de climat et d’environnement les plus favorables, sans compter les femelles les plus désirables. À l’égoïsme à l’intérieur des groupes s’est donc ajoutée l’hostilité agressive entre groupes concurrents.
     Le temps a peu changé ces traits du patrimoine génétique humain. L’égoïsme de groupe et l’hostilité entre groupes restent de mise. Seuls les groupes ont changé. Ce sont moins des familles, des tribus ou des clans unis par des liens de parenté, mais plutôt des associations plus larges liées par l’ethnie, la nationalité, le territoire, la langue, la culture, l’appartenance politique, la religion, la profession, l’intérêt, le sport ou tout autre point commun qui les singularise et les différencie des « autres ». L’hostilité entre ces groupes continue de se manifester sous la forme de confrontations, allant de la joute pacifique aux conflits les plus meurtriers, que l’expansion démographique ne fait qu’exacerber.
Lévy, J.-P. (1997). La fabrique de l’homme. Paris: Éditions Odile Jacob.  
Last edited by: Dominique Meeùs 2010-01-02 08:12:20 Pop. 0%
      La parole est d’or
     Le langage articulé est une authentique particularité humaine, bien plus que l’outil par exemple, qu’on invoque souvent à ce titre mais que les chimpanzés utilisent et fabriquent déjà, au moins de façon rudimentaire. Certes, ils disposent aussi de quelques dizaines de sons correspondant à des messages très simples, mais ils n’ont pas de syntaxe. Ce n’est peut-être qu’une question de possibilité de vocalisation, et il est probable que les structures qui permettent la parole s’ébauchent déjà avant l’homme, puisqu’il semble qu’au moins un bonobo, qui serait notre plus proche cousin longtemps confondu avec le chimpanzé, ait pu acquérir une syntaxe rudimentaire et quelques centaines de mots, d’un langage symbolique. L’homme, lui, peut naturellement émettre des milliers de messages différents et les associer de façon quasi infinie, pour transmettre des informations d’une extrême complexité. À une seule condition toutefois : qu’il ait pu imiter d’autres humains.
     Selon toute vraisemblance, cette capacité est récente dans notre famille. Les préhominiens, et même les premiers membres du genre Homo, ne disposaient pas d’un larynx situé comme le nôtre et associé à une chambre supralaryngée leur permettant de moduler les sons, avec le concours de la langue et des lèvres, comme nous le faisons. L’homme de Neanderthal, pourtant très proche de nous, n’avait pas seulement une région préfrontale beaucoup plus petite que la nôtre, ce qui limitait ses performances intellectuelles, il avait aussi un larynx en position sensiblement différente. Cette position devait lui permettre de respirer et de boire en même temps, ce qui nous est impossible, mais du coup il ne pouvait probablement pas moduler les voyelles. Seuls les derniers néanderthaliens auraient commencé à pouvoir le faire. Il est donc vraisemblable que nos prédécesseurs, il n’y a que quelques dizaines de milliers d’années, cent mille ans peut-être, ne pouvaient pas vraiment parler. C’est avec les changements de la face, qui ont entraîné aussi des modifications de la disposition du larynx, que le langage articulé est devenu possible. Et c’est la sélection, au cours de l’évolution, de cerveaux de plus en plus performants, capables d’utiliser une parole diversifiée, qui a fait l’Homo sapiens sapiens. Cette sélection très progressive n’a pu s’effectuer que grâce aux interactions réciproques de la pensée, d’abord élémentaire, et de la parole, qui va finalement perfectionner la pensée en lui fournissant un instrument de symbolisation et une syntaxe, ce qui multiplie massivement ses possibilités.
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