Balibar, F. (1984). Galilée, newton lus par einstein: Espace et relativité. Paris: Presses universitaires de France. |
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Added by: Dominique Meeùs 2010-10-06 04:44:57 |
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La physique aristotélicienne établit une différence de nature intrinsèque entre repos et mouvement liée à l’existence d’un ordre cosmique en vertu duquel chaque objet possède dans l’Univers une place, un « lieu » qui lui est propre — car il est conforme à sa nature —, vers lequel il tend à revenir s’il en est écarté, et où il reste immobile si rien ne vient l’en déloger. La tendance au repos est en quelque sorte constitutive de la matière. Le mouvement, par contre, est conçu soit comme un retour à l’ordre (c’est ce qu’Aristote appelle mouvement naturel, car le corps y réalise sa tendance naturelle au repos en son lieu naturel), soit comme une rupture contre-nature de cet ordre qui ne peut être provoquée que de façon violente (et que pour cette raison Aristote appelle mouvement violent). Repos et mouvement sont donc conçus comme des notions contraires, s’excluant l’une l’autre : un même corps est soit au repos, soit en mouvement ; mais s’il est au repos, il l’est absolument. S’il en est ainsi c’est qu’il existe un lien direct entre le mouvement d’un corps et sa constitution interne. Le mouvement est une transformation qui affecte la nature intime du corps ; il n’est donc pas équivalent, pour un même corps, d’être au repos ou d’être en mouvement. De ce point de vue, le mouvement aristotélicien se compare tout à fait à ce que la physique moderne nomme un changement d’état et dont l’évaporation, passage, pour un même corps, de l’état liquide à l’état vapeur, constitue le prototype. Dans les deux cas, il y a passage d’un état physique à un autre : passage de l’état liquide à l’état gazeux dans le cas de la vaporisation ; passage de l’état de repos en un certain lieu à un état de repos dans un autre lieu, dans le cas du mouvement selon Aristote. Dans les deux cas, ce passage est corrélatif d’une modification de la structure interne du corps, modification qui doit être provoquée par un agent extérieur. On sait que dans le cas de la transformation liquide-vapeur, l’agent, « moteur » de la transformation, est constitué par une source de chaleur extérieure, laquelle en augmentant l’agitation des molécules constitutives du corps rompt leurs liaisons ; à une structure interne ordonnée des molécules dans l’état liquide fait ainsi place une structure désordonnée caractéristique de l’état gazeux. De même, chez Aristote, le changement que constitue le mouvement ne peut se concevoir sans cause, sans moteur. Dans le cas du mouvement naturel, ce moteur est la nature même du corps qui tend à le ramener à sa place naturelle ; dans le cas du mouvement violent, le moteur est externe, exerçant une action continue par contact — soit pression, soit traction — sur le corps en mouvement. Quoi qu’il en soit, le mouvement du corps se marque par une modification de structure interne. D’où il s’ensuit que le type de mouvement dont un corps est capable dépend de sa composition physique. La physique aristotélicienne distingue quatre éléments constitutifs de la matière : eau, terre, feu, air. « Les éléments et les mouvements se correspondent chacun à chacun » (Aristote, Traité du Ciel, chap. I). Ainsi la Terre, constituée de l’élément terre dont la nature est d’être attiré par le centre du Monde, s’y trouve-t-elle rassemblée tout entière ; et immobile de surcroît, puisqu’elle occupe alors son lieu naturel. Les astres, par contre, d’essence éternelle et immuable comme tout ce qui est dans les Cieux, ne peuvent se réaliser qu’en tournant indéfiniment autour de ce centre. Quant aux corps sublunaires (c’est-à-dire terrestres), corruptibles et altérables par essence, ils sont — par essence également — soumis au changement, donc au mouvement. Mouvement qui non seulement les transporte d’un lieu en un autre, mais les modifie également, jusqu’à ce qu’ayant rejoint leur lieu naturel, ils se soient enfin réalisés. Le repos, on le voit, est pensé, non pas comme un mouvement nul, mais comme son terme et sa finalité. En ce sens, il en diffère radicalement, absolument. Il ne peut y avoir équivalence entre eux. C’est une conception toute différente qui est défendue par Salviati dans le texte (Galilei, 1632) cité ci-dessus. « Le mouvement est mouvement et agit comme mouvement en tant qu’il est en relation avec des choses qui en sont privées. » Le mouvement, donc, n’est pas un changement, corrélatif d’une transformation. C’est une modification des relations, des rapports entre les choses ; ce n’est que cela. Car cette modification laisse les choses elles-mêmes complètement indifférentes. Qu’elles soient en mouvement ou au repos ne les affecte nullement dans leur être ; le mouvement est un état au même titre que le repos ; pas plus que le repos, le mouvement n’est un changement d’état. Les choses sont extérieures à leur mouvement. Ainsi se trouve affirmée l’équivalence entre repos et mouvement. Ou dit d’une autre façon : le mouvement d’un corps n’est pas l’indice d’une structure interne particulière. Par contre, le mouvement — et le repos — sont l’indice d’une tout autre chose : l’évolution des rapports entre les corps. Ce qui revient à dire que le mouvement ne concerne jamais un seul corps isolé ; contrairement au changement qui n’affecte qu’un seul corps, le mouvement — et le repos — ne se conçoivent qu’à deux. Lorsqu’on bouge (ou reste au repos), ce n’est pas par rapport à soi-même, mais par rapport aux autres. Mouvement et changement sont dissociés. |
Dover, G. (2001). Dear mr darwin: Letters on the evolution of life and the human nature. Londres: Phoenix (Orion Books Ltd). |
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Last edited by: Dominique Meeùs 2009-08-05 16:09:45 |
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It is interesting that quantitative changes probably precede qualitative changes in biology. This reminds me of Karl Marx’s concept of dialectical materialism. Quantitative changes need to accumulate to a certain point before they cause a qualitative change in state — like heating liquid water to the fixed point at which it turns into gaseous steam, or cooling water to the point at which it turns into solid ice. This is similar to the processes of evolution, whether by natural selection or molecular drive. But biological organisms are not like the simple case of water because we do not know at what point we should be expecting a change of state, be it a new species, a new appendage or a new example of molecular coevolution. |
Jouary, J.-P., & Spire, A. (1983). Invitation à la philosophie marxiste. Paris: Messidor/Éditions sociales. |
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Added by: Dominique Meeùs 2009-12-20 17:58:44 |
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Si on jette un coup d’œil sur la réalité dans son ensemble, ce qui apparaît d’abord, c’est un enchevêtrement […] Il s’agit là de l’apparence de la dialectique, qui est l’interaction. […] Ce qui apparaît ensuite, c’est que […] « Tout se meut, change, devient et périt ». Autrement dit, l’évolution est un aspect moins superficiel de la dialectique. […] Il n’est pas faux de dire que la dialectique est une théorie de l’interaction et du développement. Mais il convient d’aller plus loin et de ne jamais perdre du vue que ça renvoie à l’étude de la contradiction dans l’essence même de la chose. […] Il s’agit d’un appel à analyser concrètement de quelle manière chaque chose est dans son essence contradictoire […] |
Koursanov, G. (Ed.). (1978). Histoire de la dialectique marxiste: Étape léniniste D. Sanadzé & M. Arséniéva, Trans. Moscou: Éditions du Progrès. |
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Added by: Dominique Meeùs 2009-08-12 14:23:47 |
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[…] au cours du développement de la science et de la philosophie se sont révélées certaines interprétations erronées de cette fonction de la dialectique [sa fonction méthodologique en science] et, partant, son application erronée dans la recherche scientifique. Une de ces erreurs était qu’en appliquant la dialectique aux sciences particulières, on se bornait à illustrer tels ou tels thèses, principes, lois de la dialectique par certains exemples empruntés au domaine de la connaissance des sciences particulières (les tentatives furent fréquentes, notamment, de confirmer « encore une fois les thèses et les déductions connues de la dialectique par de nouveaux faits obtenus au cours du développement des sciences particulières »). La dialectique était réduite ainsi à une somme d’exemples de vérités dialectiques connues. Dans la compréhension de la fonction méthodologique de la dialectique, lorsqu’on la considérait en tant que méthode, en tant que « moyen de résoudre les questions, les problèmes », etc., on commettait également l’erreur grave de l’interpréter comme permettant, en partant seulement de la doctrine dialectique, de résoudre un problème concret quelconque de telle ou telle science particulière, de justifier la véracité d’une thèse théorique quelconque d’une conception déterminée d’une science particulière. C’est ainsi que négligeant l’analyse des faits, des phénomènes concrets, certains philosophes tentaient de déduire directement de la doctrine dialectique, en partant uniquement de considérations « philosophiques » générales, des réponses aux questions de savoir si la génétique, la doctrine de N. Marr sur la langue, la conception biologique de T. Lyssenko étaient correctes, si la cybernétique, la mécanique quantique, la théorie de la relativité, etc., étaient correctes. Autrement dit, pour résoudre la question de la véracité de telle ou telle théorie, d’une thèse théorique, on cherchait à remplacer l’analyse du contenu scientifique des théories, des faits concrets, de la pratique par des références aux thèses générales de la dialectique. |
Ollman, B. (2003). Dance of the dialectic: Steps in marx’s method. Urbana and Chicago: University of Illinois Press. |
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Last edited by: Dominique Meeùs 2009-08-12 16:36:27 |
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With all the misinformation conveyed about dialectics, it may be useful to start by saying what it is not. Dialectics is not a rock-ribbed triad of thesis-antithesis-synthesis that serves an all-purpose explanation; nor does it provide a formula that enable us to prove or predict anything; nor is it the motor force of history. The dialectic, as such, explains nothing, proves nothing, predicts nothing, and causes nothing to happen. Rather, dialectics is a way of thinking that bring into focus the full range of changes and interactions that occur in the world. As part of this, it includes how to organize a reality viewed in this manner for purposes of study and how to present the results of what one finds to others, most of whom do not think dialectically. |
Zapata, R. (1988). La philosophie russe et soviétique. Paris: Presses universitaires de France. |
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Last edited by: admin 2011-08-15 08:58:49 |
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Les dialecticiens prennent appui sur Dialectique de la nature d’Engels (publiée pour la première fois en 1925 par Riazanov), pour consolider la thèse selon laquelle il y aurait une méthodologie générale des sciences, la dialectique matérialiste, qui permet, grâce à ses lois, de comprendre et de dépasser les contradictions, en apparence insurmontables, dans lesquelles se sont empêtrées les sciences de la nature (comme par exemple, la contradiction que renferme la dualité onde-particule, qui fera couler beaucoup d’encre…). |