Althusser, L. (1974). Philosophie et philosophie spontanée des savants (1967): Cours de philosophie pour scientifiques. Paris: Librairie François Maspero. |
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Last edited by: Dominique Meeùs 2009-08-23 21:21:26 |
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Les propositions philosophiques sont des Thèses. […] une proposition philosophique est une proposition dogmatique […] […] des propositions dogmatiques négativement, dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles de démonstration au sens strictement scientifique (au sens où l’on parle de démonstration en mathématiques et en logique), ni de preuve au sens strictement scientifique (au sens où l’on parle de preuve dans les sciences expérimentales). […] Elles peuvent seulement être dites « justes ». |
Duhem, P. (1908). Σώζειν τὰ φαινόμενα (sauver les phénomènes): Essai sur la notion de théorie physique de platon à galilée. Paris: Librairie scientifique A. Hermann et fils. |
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Last edited by: Dominique Meeùs 2009-12-01 00:15:39 |
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Voici donc en quels termes se trouve formulée, au Commentaire de Simplicius, cette tradition platonicienne : « Platon admet en principe que les corps célestes se meuvent d’un mouvement circulaire, uniforme et constamment régulier (*) ; il pose alors aux mathématiciens problème : Quels sont les mouvements circulaires, uniformes et parfaitement réguliers qu’il convient de prendre pour hypothèses, afin que l’on puisse sauver les apparences présentées par les planètes ? Τίνων ὑποτεθέντων δι᾽ ὁμαλῶν καὶ ἐγκυκλιων καὶ τεταγμένων κινὴσεων δυνήσεται διασωθῆναι τὰ περὶ τοὺς πλανωμένους φαινόμενα ; » (*) C’est-à-dire constamment de même sens. |
Hipparque a prouvé, en effet, que l’on pouvait également représenter la marche du Soleil ou bien en supposant que cet astre décrivît un cercle excentrique au Monde, ou bien en admettant qu’il fût porté par un cercle épicycle, pourvu que la révolution de cet épicycle s’effectuât précisément dans le temps que son centre parcourait un cercle concentrique au Monde. […] Il n’y a assurément qu'une seule hypothèse qui soit conforme à la nature des choses (κατὰ φύσιν). Toute hypothèse astronomique qui sauve les phénomènes concorde avec celle-là en toutes les conséquences qui peuvent être comparées aux observations ; c’est ce que les Grecs entendaient en disant de diverses hypothèses qui engendrent le même mouvement résultant qu’elles s'accordent entre elles par accident (κατὰ συμβεβηκὸς). |
Au cours de l’Antiquité et du Moyen-Âge, la Physique nous présente deux parties si distinctes l’une de l’autre qu’elles sont, pour ainsi dire, opposées l’une à l’autre ; d’un côté se trouve la Physique des choses célestes et impérissables, de l’autre la Physique des choses sublunaires, soumises à la génération et à la corruption. Les êtres dont traite la première des deux Physiques sont réputés d’une nature infiniment plus élevée que ceux dont s’occupe la seconde ; on en conclut que la première est incomparablement plus difficile que la seconde ; Proclus enseigne que la Physique sublunaire est accessible à l’homme, tandis que la Physique céleste le passe et est réservée à l’intelligence divine ; Maïmonide partage cette opinion de Proclus ; la Physique céleste est, selon lui, pleine de mystères dont Dieu s’est réservé la connaissance, tandis que la Physique terrestre se trouve, tout organisée, en l’œuvre d’Aristote. Au contraire de ce que pensaient les hommes de l’Antiquité et du Moyen-Âge, la Physique céleste qu’ils avaient construite était singulièrement plus avancée que leur Physique terrestre. Dès l’époque de Platon et d’Aristote, la science des astres était organisée sur le plan que nous imposons aujourd’hui encore à l’étude de la Nature. D’une part, était l’Astronomie ; des géomètres, comme Eudoxe et Calippe, combinaient des théories mathématiques au moyen desquelles les mouvements célestes pouvaient être décrits et prévus, tandis que des observateurs appréciaient le degré de concordance entre les prévisions des calculs et les phénomènes naturels. D’autre part, était la Physique proprement dite ou, pour parler le langage moderne, la Cosmologie céleste ; des penseurs, comme Platon et Aristote, méditaient sur la nature des astres et sur la cause de leurs mouvements. […] Il s’en faut bien que la Physique des choses sublunaires soit parvenue d’aussi bonne heure à ce degré de différenciation et d’organisation. […] […] La Physique sublunaire ne connaissait guère les théories mathématiques. Deux chapitres de cette physique, l’Optique ou Perspective, et la Statique ou Scientia de ponderibus, avaient seuls revêtu cette forme […] Hors ces deux chapitres, l’analyse des lois qui président aux phénomènes demeurait peu précise, purement qualitative ; elle ne s’était pas encore dégagée de la Cosmologie. En la Dynamique, par exemple, les lois de la chute libre des graves, entrevues dès le 14e siècle, les lois du mouvement des projectiles, vaguement soupçonnées au 16e siècle, demeuraient impliquées dans les discussions métaphysiques sur le mouvement local, sur le mouvement naturel et le mouvement violent, sur la coexistence du moteur et du mobile. Au temps de Galilée seulement, nous voyons la partie théorique, en même temps que sa forme mathématique se précise, se dégager de la partie cosmologique. […] D’autre part, l’antique distinction entre la Physique des corps célestes et la Physique des choses sublunaires s’était graduellement effacée. Après Nicolas de Cues, après Léonard de Vinci, Copernic avait osé assimiler la Terre aux planètes. Par l’étude de l’étoile qui avait apparu, puis disparu en 1572, Tycho Brahé avait montré que les astres pouvaient, eux aussi, s’engendrer et périr. En découvrant les taches du Soleil et les montagnes de la Lune, Galilée avait achevé de réunir les deux Physiques en une seule science. Dès lors, lorsqu’un Copernic, lorsqu’un Képler, lorsqu’un Galilée déclarait que l’Astronomie doit prendre pour hypothèses des propositions dont la vérité soit établie par la Physique, cette affirmation, une en apparence, renfermait en réalité deux propositions bien distinctes. Une telle affirmation, en effet, pouvait signifier que les hypothèses de l’Astronomie étaient des jugements sur la nature des choses célestes et sur leurs mouvements réels ; elle pouvait signifier qu’en contrôlant la justesse de ces hypothèses, la méthode expérimentale allait enrichir nos connaissances cosmologiques de nouvelles vérités. Ce premier sens se trouvait, pour ainsi dire, à la surface même de l’affirmation ; il apparaissait tout d’abord ; c’est ce sens-là que les grands astronomes du 16e siècle et du 17e siècle voyaient clairement, c’est celui qu’ils énonçaient d’une manière formelle, c’est enfin celui qui ravissait leur adhésion. Or, prise avec cette signification, leur affirmation était fausse et nuisible ; Osiander, Bellarmin et Urbain VIII la regardaient, à juste titre, comme contraire à la Logique […] Sous ce premier sens illogique, mais apparent et séduisant, l’affirmation des astronomes de la Renaissance en contenait un autre ; en exigeant que les hypothèses de l’Astronomie fussent d’accord avec les enseignements de la Physique, on exigeait que la théorie des mouvements célestes reposât sur des bases capables de porter également la théorie des mouvements que nous observons ici-bas ; on exigeait que le cours des astres, le flux et le reflux de la mer, le mouvement des projectiles, la chute des graves fussent sauvés à l’aide d’un même ensemble de postulats, formulés en la langue des Mathématiques. Or ce sens-là restait profondément caché ; ni Copernic, ni Képler, ni Galilée ne l’apercevaient nettement ; il demeurait, cependant, dissimulé, mais fécond, au-dessous du sens clair, mais erroné et dangereux, que ces astronomes saisissaient seul. Et tandis que la signification fausse et illogique qu’ils attribuaient à leur principe engendrait des polémiques et des querelles, c’est la signification vraie, mais cachée, de ce même principe qui donnait naissance aux essais scientifiques de ces inventeurs ; alors qu’ils s’efforçaient de soutenir l’exactitude du premier sens, c’est à établir la justesse du second sens qu’ils tendaient sans le savoir ; […] ils croyaient prouver, l’un et l’autre, que les hypothèses copernicaines ont leur fondement en la nature des choses ; mais la vérité qu’ils introduisaient peu à peu dans la Science, c’est qu’une même Dynamique doit, en un ensemble unique de formules mathématiques, représenter les mouvements des astres, les oscillations de l’Océan, la chute des graves ; ils croyaient renouveler Aristote; ils préparaient Newton. En dépit de Képler et de Galilée, nous croyons aujourd’hui, avec Osiander et Bellarmin, que les hypothèses de la Physique ne sont que des artifices mathématiques destinés à sauver les phénomènes ; mais grâce à Képler et à Galilée, nous leur demandons de sauver à la fois tous les phénomènes de l’Univers inanimé. |
Haldane, J. B. S. (1946). La philosphie marxiste et les sciences É. Bottigelli, Trans. Paris: Éditions sociales. |
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Last edited by: Dominique Meeùs 2013-01-13 09:12:01 |
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Il est bon d’indiquer qu’Engels se trouvait y croire à peu près dans dans la même mesure que Darwin lui-même. Dans sa Dialectique de la nature qu’il n’a d’ailleurs pas publiée, il adoptait largement le point de vue lamarckien ; et cela l’amenait à des conséquences sociales plutôt curieuses. Par exemple, il pensait que les primitifs auraient sans doute été incapables de faire des mathématiques ou de se livrer à d’autres formes d’activité intellectuelle, car leurs ancêtres ne les avaient pas pratiquées. Vous vous rappellerez qu’Engels n’a pas publié le livre en question. Il y avait de nombreux points, et sans aucun doute celui-ci en était un, qui ne le satisfaisaient pas et nous pouvons ajouter tout de suite que dans l’état des connaissances biologiques de son temps, il n’y avait pas moyen d’atteindre ce que je crois être le point de vue exact. |
Meulders, M. (2001). Helmholtz: Des lumières aux neurosciences. Paris: Éditions Odile Jacob. |
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Last edited by: Dominique Meeùs 2013-01-13 09:03:35 |
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La démonstration expérimentale, par exemple, est devenue inutile. Il y a en effet une harmonie préétablie quasi leibnizienne entre la pensée et la nature, par l’identité entre l’une et l’autre, ce qui avait permis à Novalis de dire que « si la théorie devait attendre la confirmation de l’expérience, elle ne viendrait jamais à bonne fin ». La physique expérimentale ne pourrait donc jamais être qu’une juxtaposition de travaux analytiques et dispersés, sans lien possible avec l’évidente unité de la nature et l’insertion de l’homme dans l’univers. Seule compte une physique spéculative qui permette de penser et de justifier une nature préexistant à l’homme et de lui donner un sens, comme la vision dit le sens de l’œil. Pour Schelling : « Nous ne connaissons pas la Nature, mais la Nature est a priori » ; il en résulte que la science naturelle s’est muée en philosophie déductive et démonstrative. La Naturphilosophie se situe donc à un niveau supérieur du savoir, à un niveau d’intelligibilité différent de celui des sciences empiriques, qui sont en porte-à-faux sur un abîme insondable. Il n’est pas étonnant, dès lors, que le rejet de l’expérimentation en tant que démonstration s’accompagne de l’exclusion des mathématiques. Non seulement Goethe, mais même Schopenhauer pour qui « là où commence le calcul, la compréhension cesse », partagent l’avis de Schelling déniant aux mathématiques une « voix au chapitre de la physique supérieure ». Par contre, l’arithmosophie a droit de cité, car la plupart des Naturphilosophen recherchent partout les mêmes structures de nombres dans les cristaux, les constellations, la circulation du sang, les périodes de la vie humaine. Enfin, il faut rappeler l’importance en Naturphilosophie du concept d’organisme, que Leibniz avait développé dans sa Monadologie, en affirmant que la diversité des monades d’un animal donné n’empêche en rien l’une d’entre elles de devenir dominante et de devenir ainsi l’âme de l’animal. L’organisme est un modèle en acte de « l’identité dans la différence » ; pour Schelling, il doit y avoir un principe qui se reproduise dans chaque partie de l’ensemble comme « une unité organique des choses… c’est l’âme du monde qui est le principe unissant la nature en un vaste organisme ». |
Sandor, P. (1947). Histoire de la dialectique. Paris: Éditions Nagel. |
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Added by: admin 2009-04-07 21:16:36 |
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Les mathématiques élémentaires, mathématiques des quantités déterminées, se meuvent essentiellement dans les cadres de la logique. La mathématique des quantités variables, dont la partie la plus importante est le calcul infinitésimal, constitue, dans son essence, une application de la dialectique aux mathématiques. L’importance de sa valeur démonstrative elle-même est moindre que son application sur des plans entièrement nouveaux. Cependant, presque toutes les preuves des mathématiques supérieures sont fausses au point de vue des mathématiques élémentaires. Et il ne peut en être autrement si l’on essaie de prouver les résultats obtenus par voie dialectique, au moyen de la logique formelle. |
Thomson, G. (1973). Les premiers philosophes M. Charlot, Trans. Paris: Éditions sociales. |
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Added by: Dominique Meeùs 2010-02-07 21:37:31 |
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Par quoi avaient-ils été amenés à franchir cette étape ? Pas seulement par leur curiosité pour les mathématiques. Leur curiosité pour les mathématiques était plutôt une autre manifestation de la même tendance. Un phénomène aussi fondamental dans le domaine de la pensée ne peut s’expliquer que si on le conçoit comme le reflet dans la conscience d’une transformation tout aussi fondamentale dans les rapports sociaux de leur temps. Qu’y avait-il de nouveau dans la société grecque de l’Antiquité ? Les chapitres précédents ont répondu à cette question. C’est précisément dans la Grèce de ce temps-là que la production marchande atteignit son plein développement et révolutionna l’ensemble de la société précédente. Anaximène et Pythagore témoignent tous deux de la conception propre à la nouvelle classe des commerçants, qui étaient lancés dans l’échange des marchandises à une échelle qui nous semble très limitée selon nos critères modernes mais qui était sans précédent pour leur époque. Le facteur essentiel était par conséquent la croissance d’une société organisée en fonction de la production de valeurs d’échange et le déclin correspondant des anciens rapports fondés sur la production des valeurs d’usage. C’est pourquoi l’aspect caractéristique de leur pensée peut se définir très simplement si l’on se reporte à la différence fondamentale, indiquée par Marx (1969, pp.51-52,53), entre la production pour l’usage et la production pour l’échange. |