de Broglie, L. (1960). Sur les sentiers de la physique. In Sur les sentiers de la science (pp. 191–215). Paris: Éditions Albin Michel. |
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Added by: Dominique Meeùs 2012-07-08 17:42:09 |
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[…] La théorie physique, lorsqu’elle est parvenue à obtenir une représentation mathématique cohérente des phénomènes connus, cherche à en déduire la prévision de phénomènes nouveaux. Parfois ces prévisions sont confirmées par de nouvelles recherches expérimentales et la théorie ainsi mise à l’épreuve en sort renforcée. Parfois, et l’on peut dire qu’à la longue ceci finit toujours par se produire, ou bien l’expérience ne vérifie pas une des prévisions de la théorie ou bien elle fournit tout à coup, souvent sans qu’on l’ait cherché volontairement, un fait nouveau qui ne cadre pas avec la théorie : alors il faut réformer et transformer l’édifice théorique précédemment construit. Mais, et ceci est essentiel, cette transformation, parce qu’elle doit toujours permettre de rendre compte des faits précédemment observés, devra être effectuée de façon à englober d’une manière ou d'une autre, et souvent à titre de première approximation, la théorie antérieure et l’ensemble des équations sur lesquelles elle reposait dont seule l’interprétation aura varié. Ainsi, la nouvelle théorie pourra retrouver toutes les prévisions exactes de l’ancienne, mais, se détachant d’elle dans certaines circonstances, elle pourra prévoir exactement les faits observés, là où l’autre ne pouvait y réussir. C’est par ces englobements successifs que la Physique théorique parvient à progresser sans renier aucun de ses succès antérieurs et à faire entrer dans le sein d’une synthèse qui se transforme et s’élargit sans cesse un nombre croissant de faits expérimentaux. Pour n’en citer qu’un des exemples les plus mémorables, la théorie électromagnétique de la Lumière de Maxwell est parvenue à retrouver, en les interprétant différemment, toutes les équations qu’avait fournies à Fresnel et à ses continuateurs l’image d’un éther élastique support des vibrations lumineuses, mais elle a pu, en outre, faire entrer la lumière, comme cas très particulier, dans la catégorie infiniment plus vaste des ondes électromagnétiques et elle a pu aussi conduire à une interprétation remarquable des phénomènes électro et magnéto-optiques que la conception de Fresnel ne pouvait pas atteindre. Avant de terminer ces considérations générales sur le rôle réciproque de l’expérience et de la théorie, soulignons que le résultat de l’expérience n’a jamais le caractère d’un fait brut que l’on se borne à constater : il y a toujours dans l’énoncé de ce résultat une part d’interprétation, donc une intervention de conceptions théoriques. Le physicien qui mesure un courant avec un ampèremètre ne se contentera pas de dire : « J’ai vu l’aiguille de mon appareil de mesure venir se placer sur tel trait de sa graduation » car sous cette forme cette constatation n’aurait pas d’intérêt ; il dira : « J’ai mesuré un courant de dix ampères », mais, si cette fois son affirmation prend de l’intérêt, elle suppose tout un ensemble de conceptions théoriques sur les lois de l’électricité, sur le fonctionnement de l’appareil de mesure, etc. Cette intervention inévitable d’idées théoriques dans l’énoncé des résultats expérimentaux a tellement frappé certains esprits qu’ils ont été jusqu’à se demander s’il y avait vraiment des faits expérimentaux existant indépendamment de nos conceptions théoriques et on a été jusqu’à dire : « Le savant crée le fait scientifique. » Il y a là certainement une exagération qu’Henri Poincaré avait naguère fortement combattue. Le fait scientifique a sans aucun doute une existence indépendante des conceptions dont on se sert pour l’exprimer : parfois même, il se refuse à confirmer l’interprétation théorique qu’on voulait lui donner. Néanmoins, il faut retenir des analyses qui ont été faites à ce sujet, notamment par Édouard Leroy et par Pierre Duhem il y a une soixantaine d'années, que la notion de fait expérimental est moins simple qu’on ne pourrait le croire tout d’abord : il n’y a pas de fait entièrement « brut ». Les données de nos sens ne peuvent servir à la construction de la science qu’après que nous les avons convenablement interprétés et dans cette interprétation interviennent forcément certaines conceptions de notre esprit, c’est-à-dire des idées théoriques. Et ceci montre que l’on ne peut pas séparer l’une de l’autre d’une façon absolument nette l’expérience et la théorie et considérer que le fait expérimental est une donnée indépendante de toute interprétation. La relation entre l’expérience et la théorie est plus subtile et plus complexe : les constatations expérimentales ne prennent leur valeur scientifique qu’après un travail de notre esprit qui, si rapide et spontané soit-il, imprime toujours au fait brut la marque de nos tendances et de nos conceptions. |
Cohen, I. B. (1962). Les origines de la physique moderne: De copernic à newton J. Métadier, Trans. Paris: Éditions Payot. |
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Last edited by: Dominique Meeùs 2009-08-15 18:25:29 |
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… le but des observations et des expériences, telles que celle du plan incliné, n’était pas de découvrir la loi de la chute des corps, mais de s’assurer seulement que des accélérations telles que celle étudiées théoriquement par Galilée se produisent réellement dans la nature. Il faut observer, en outre, que ce qui est démontré dans cette série d’expériences et d’observations n’est pas que la vitesse est proportionnelle au temps, mais bien que la distance est proportionnelle au carré du temps. Comme ce résultat est impliqué par la proportionnalité de la vitesse au temps, il est admis que l’expérience justifie aussi le principe que la vitesse est proportionnelle au temps. |
Huxley, J. (1950). La génétique soviétique et la science mondiale J. Castier, Trans. Paris: Stock. |
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Added by: Dominique Meeùs 2009-08-03 13:51:51 |
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Il faut insister sur ce que le statut scientifique du mitchourinisme est fort différent de celui du néo-mendélisme. Celui-ci comprend un grand nombre de faits et de lois qui ont été vérifiés à mainte reprise, et de façon indépendante, par des savants du monde entier (et beaucoup d’entre eux aussi, par des amateurs et des étudiants) ; la constitution héréditaire qu’il postule — celle d’un grand nombre de gènes disposés de façon régulière à l’intérieur des chromosomes — a été établie comme objectivement vraie ; et ses principes théoriques découlent tous directement de ce fait central, d’une constitution particulaire portée par des chromosomes. D’autre part, beaucoup d’entre les résultats revendiqués comme faits par les mitchouriniens (savoir : l’hybridation végétative et l’hérédité des caractères acquis) ne se sont pas révélés susceptibles de vérification par les savant hors de la Russie ; et d’autres (savoir : la « dislocation » de l’hérédité par les croisements) s’interprètent également bien suivant les principes mendéliens. En outre, il est notoire que les mitchouriniens ont négligé beaucoup d’entre les précautions habituelles prises par les généticiens occidentaux pour assurer la validité de leurs expériences, et qu’ils ont, de propos délibéré, rejeté l’usage de l’analyse statistique pour contrôler la signification scientifique de leurs résultats numériques. […] Nous pourrions peut-être résumer de la façon suivante la différence entre les deux systèmes (et c’est une différence fort importante). Le mendélisme représente le développement cohérent d’un concept scientifique central, dont la formulation était nécessaire, comme étant la seule façon dont pouvaient s’expliquer certains faits observés. (Le concept était celui du facteur-unité de l’hérédité, appelé plus tard gène, et les fait étaient ceux qu’avait obtenus Mendel en croisant des variétés de pois.) Le développement a consisté, d’une part, en la généralisation de ce concept, et, d’autre part, en son perfectionnement. […] Le mitchourinisme, par contre, représente le promulgation d’une idée centrale ; et cette idée n’est pas la seule façon dont puissent s’expliquer les faits (puisque les uns s’expliqueraient également bien, ou mieux, comme étant dus à des méthodes défectueuses, et d’autres, comme dus à d’autres causes). Cette idée est dans une large mesure une idée préconçue, qui a été imposée aux faits, au lieu de naître d’eux ; quand les faits ne s’adaptent pas à l’idée, on en nie l’importance, ou même l’existence. À l’inverse du néo-mendélisme, il n’est pas quantitatif, du sorte qu’il manque de précision. Sa principale nouveauté, l’affirmation selon laquelle l’hérédité est le résultat de l’assimilation des influences extérieures, est fondée uniquement sur l’analogie, et non sur l’expérimentation ou l’observation scientifiques. Voilà ce que l’ai voulu dire lorsque j’ai déclaré que le mitchourinisme est une doctrine. C’est une doctrine essentiellement non scientifique ou pré-scientifique, appliquée à une branche de la recherche scientifique, et non pas en soi une branche de la science. |
Koursanov, G. (Ed.). (1978). Histoire de la dialectique marxiste: Étape léniniste D. Sanadzé & M. Arséniéva, Trans. Moscou: Éditions du Progrès. |
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Added by: Dominique Meeùs 2009-08-12 14:23:47 |
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[…] au cours du développement de la science et de la philosophie se sont révélées certaines interprétations erronées de cette fonction de la dialectique [sa fonction méthodologique en science] et, partant, son application erronée dans la recherche scientifique. Une de ces erreurs était qu’en appliquant la dialectique aux sciences particulières, on se bornait à illustrer tels ou tels thèses, principes, lois de la dialectique par certains exemples empruntés au domaine de la connaissance des sciences particulières (les tentatives furent fréquentes, notamment, de confirmer « encore une fois les thèses et les déductions connues de la dialectique par de nouveaux faits obtenus au cours du développement des sciences particulières »). La dialectique était réduite ainsi à une somme d’exemples de vérités dialectiques connues. Dans la compréhension de la fonction méthodologique de la dialectique, lorsqu’on la considérait en tant que méthode, en tant que « moyen de résoudre les questions, les problèmes », etc., on commettait également l’erreur grave de l’interpréter comme permettant, en partant seulement de la doctrine dialectique, de résoudre un problème concret quelconque de telle ou telle science particulière, de justifier la véracité d’une thèse théorique quelconque d’une conception déterminée d’une science particulière. C’est ainsi que négligeant l’analyse des faits, des phénomènes concrets, certains philosophes tentaient de déduire directement de la doctrine dialectique, en partant uniquement de considérations « philosophiques » générales, des réponses aux questions de savoir si la génétique, la doctrine de N. Marr sur la langue, la conception biologique de T. Lyssenko étaient correctes, si la cybernétique, la mécanique quantique, la théorie de la relativité, etc., étaient correctes. Autrement dit, pour résoudre la question de la véracité de telle ou telle théorie, d’une thèse théorique, on cherchait à remplacer l’analyse du contenu scientifique des théories, des faits concrets, de la pratique par des références aux thèses générales de la dialectique. |
Quinn, H. (2009). What is science ? Physics Today, 8–9. |
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Added by: Dominique Meeùs 2010-11-06 08:22:05 |
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Science requires absolute honesty about acquired data and the intellectual honesty that insists on resolving logical contradictions. Scientists must be open to new ideas and ready to modify their opinions if and when contradictory evidence emerges. The key values of honesty and openness are essential for science to progress. Scientists are human: They jump to conclusions, they make mistakes in recording or analyzing data. Sometimes a scientist fakes data and commits scientific fraud. The principle of verification by independent replication of experimental results is an important part of science, because it can unmask such errors or fraud. |