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Jacob, M. (2001). Au cœur de la matière: La physique des particules élémentaires. Paris: Éditions Odile Jacob.  
Added by: Dominique Meeùs 2012-07-30 12:52:36 Pop. 0%
      C’est en effet avec la masse que nos idées préconçues se trouvent peut-être les plus bousculées. Quoi de plus tangible que la masse ? N’est-ce pas a priori une propriété fondamentale d’un objet indépendante des circonstances ? Avec Lavoisier, la masse est une propriété indestructible, que l’on retrouve à travers tous les processus chimiques. Avec Einstein, c’est une forme de l’énergie mais dans la plupart des cas, la conservation de l’énergie entraîne la conservation de la masse. En physique des particules, la masse est une propriété intrinsèque de la particule, un invariant qui sert à la définir. La masse est longtemps apparue comme une propriété fondamentale.
     N’est-il pas surprenant de la voir maintenant apparaître comme une propriété purement dynamique, liée aux propriétés du vide et à la façon dont elles affectent les particules qui s’y trouvent ? Le modèle standard introduit des particules sans masse et le couplage au champ de Higgs attribue une masse déterminée à chaque particule, toutes ces masses étant proportionnelles à la valeur moyenne de ce champ. On peut dire que la masse de chaque particule est maintenant donnée par une constante de couplage au champ de Higgs, soit autant de paramètres (de nombres purs) qu’il y a de particules.
     Cela s’applique aux leptons, mais pour les quarks constituant des hadrons, il faut aller plus loin. Les quarks u et d ne vont acquérir ainsi que des masses très faibles (quelques MeV) par rapport à celles des protons et des neutrons qu’ils constituent (de l’ordre du GeV). Or la masse du proton et celle du neutron représentent la masse telle qu’elle apparaît dans la vie courante, la masse des atomes et donc de tous les corps. Comme nous venons de le voir, cette masse hadronique correspond à la masse effective que prennent ces quarks quand ils s’habillent de gluons à l’intérieur d’un hadron. Pratiquement, la totalité de cette masse effective est un effet dynamique. On peut aussi dire qu’elle correspond à l’énergie nécessaire pour créer la bulle que va constituer la particule dans un vide qui préférerait ne pas l’avoir et ne la tolère que parce qu’elle est globalement « neutre » vis-à-vis de la couleur. La création de cette « bulle » demande une énergie de l’ordre du GeV. D’où vient cette valeur de la masse ? Il n’y a pas d’échelle de masse en chromodynamique. Il n’y a qu’une constante de couplage sans dimension. Nous avons vu qu’une échelle de masse (de l’ordre de 150 MeV) apparaît pourtant quand on considère la variation de la constante de couplage effective avec le transfert. Elle est incontournable lorsqu’on veut calculer et pour ce faire renormaliser la théorie. Rappelons-nous l’inversion de l’effet d’écran rencontré au chapitre 2. La masse va dépendre de la structure de la chromodynamique fondée sur la symétrie SU(3) de la couleur. Elle dépend avant tout du fait qu’il y a 8 gluons et 2 quarks à ce niveau d’énergie, encore une fois des nombres purs. Mais il n’y a pas que cela. Un physicien dira que lorsqu’on renormalise une théorie il faut se raccrocher à une valeur expérimentale qu’on ne peut que mesurer et qui, dans le cas de l’interaction forte, peut être choisie comme une distance de l’ordre de 1 fermi (où mesurer la force de l’interaction avec un couplage effectif de l’ordre de 1) ou une énergie de l’ordre de 150 MeV (donnant la variation du couplage effectif avec le transfert). On se raccroche souvent en pratique à la masse du méson rho qui vaut 750 MeV. L’expérience a bien son mot à dire. On ne saurait cependant minimiser la portée de la théorie. Fixant l’échelle de masse sur la valeur d’une masse hadronique, on peut en principe calculer toutes les autres masses ainsi que la température de déconfinement que nous avons rencontrée (voir chapitre 7). Ce n’est aujourd’hui possible qu’au prix de gros calculs numériques sur des ordinateurs qui deviennent de plus en plus puissants (voir chapitre 14).
     Cette nouvelle conception de la masse est une révolution importante. Ce qui apparaissait comme une propriété intrinsèque et immuable se voit relégué au rang d’effet dynamique dépendant des interactions et, avant tout, de la structure du vide.
      La masse, cette propriété que l’on pensait intrinsèquement associée à un objet et qui résultait de l’addition des masses de ses constituants, une masse que l’on associait à chaque particule avant de considérer les forces auxquelles elles pouvaient être soumises, cette masse devient un effet dynamique des actions auxquelles les constituants fondamentaux sont soumis.
     Cette nouvelle dynamique qui se trouve à l’origine de la masse a pour conséquence la présence d’au moins une nouvelle particule fondamentale appelée Boson de Higgs. C’est depuis près de vingt ans la particule la plus recherchée par les physiciens. Elle a une masse qui peut être très élevée (plus de cent fois celle du proton) mais que l’on ne sait pas prédire.
      Retenons pour l’instant que pour voir de très près, il faut frapper très fort avec des projectiles très petits. On accélère pour cela des particules sondes que l’on envoie sur les structures sondées et l’on analyse les effets observés. C’est d’ailleurs ce que nous faisons en voyant les choses. Notre œil analyse la lumière émise par une source lumineuse et renvoyée par les objets éclairés. L’énergie de ces grains de lumière est cependant bien faible (la longueur d’onde est de l’ordre d’un demi-micron) et même à l’aide d’un microscope, la résolution que l’on peut obtenir n’est que de cet ordre. On n’atteint pas la taille d’un virus qui est dix fois plus petite. Grâce aux accélérateurs, on peut communiquer des énergies énormes à ces grains de matière que sont les particules et qui se comportent aussi comme des ondes. On peut ainsi découvrir, analyser et comprendre la structure de la matière à une échelle de plus en plus fine. On approche aujourd’hui du dixième de milliardième de milliardième de mètre (10 exp − 9) alors que l’atome mesure un dixième de milliardième de mètre (10 exp − 10). On comprend aujourd’hui ce qui se passe à un niveau un milliard de fois plus petit que les dimensions de l’atome. Mais il faut pour cela des accélérateurs dont les dimensions se mesurent en kilomètres. Le plus grand du monde, le LEP du CERN, le Laboratoire européen de physique des particules, à Genève, a la forme d’un anneau de 27 km de circonférence. Pourquoi de si gros appareils pour étudier des objets si petits ? Encore une fois, il faut frapper très fort pour voir de très près et on ne peut le faire qu’avec de très gros appareils, seuls capables d’accélérer des particules de taille infime à des énergies suffisamment élevées. La physique des particules est devenue synonyme de physique des hautes énergies. Comprendre la structure de la matière, c’est donc comprendre ce qui se passe dans ces collisions entre particules de très hautes énergies.
      Nous prendrons le champ électrique comme premier exemple. Une charge agit à distance sur une autre. C’est un fait. Le champ est un concept inventé pour mieux cerner le phénomène et rendre compte de cette action à distance qui peut sembler surprenante. Une charge crée un champ (électrique) qui s’étale dans tout l’espace. Le champ est en l’occurrence un vecteur défini par sa valeur en chaque point. La force qui s’exerce sur une particule chargée est égale à la valeur du champ multipliée par la charge. On peut donc facilement mesurer la valeur à attribuer au champ mais l’intensité et l’orientation du champ n’ont pas à être mesurées partout car une équation nous les donne en fonction de la valeur et de l’emplacement des charges. L’action à distance se traduit par un champ établi dans tout l’espace. Ce concept de champ s’avère si bien adapté au monde réel que l’étude de l’électricité, avec toute la valeur prédictive des propriétés trouvées, se ramène pratiquement à la compréhension des propriétés du champ électrique. C’est sur cette base que se fonde tout l’électromagnétisme, en particulier les relations entre les variations corrélées dans l’espace et dans le temps des champs électrique et magnétique et c’est dans ce cadre que furent prédites puis découvertes les ondes radio. Et cependant, même à la fin du 19e siècle, raisonner en termes de champs était une nouvelle façon de penser. On pouvait se demander si ces champs électrique et magnétique étaient vraiment réels, comme une particule chargée semblait manifestement l’être, ou s’ils n’étaient qu’un artifice de calcul, un concept utile mais sans réalité tangible. Cette réalité ne s’appliquait-elle pas seulement aux particules qui créaient le champ ou réagissaient à sa présence ? Le champ était-il plus qu’une commodité de calcul pour traduire une action à distance qui choquait l’intuition ? On a appris depuis que le champ électrique est tout aussi réel que la particule et, qui plus est, on a été amené à décrire les particules en termes de champs. En physique quantique et relativiste, il n’y a que des « grains de champ » dont certains sont ces « grains de matière » que nous appelons « quarks » et « leptons ». Les particules sont les excitations de ces champs quantiques, un peu comme les sons émis par une corde vibrante. Voilà un concept qui a eu une belle carrière. On ne saurait aujourd’hui parler de physique sans parler de champ !
      À ce niveau d’exploration de la structure de la matière, comme aussi dans cette recherche archéologique du début de l’Univers, il faut savoir penser en termes quantiques et relativistes. La physique prend ainsi un caractère beaucoup plus précis mais en heurtant souvent l’expérience familière. La relativité et la mécanique quantique ont été les deux grandes révolutions scientifiques du 20e siècle. Ce nouveau cadre de pensée a permis de grandes percées dans notre connaissance du monde. Nous comprenons beaucoup mieux comment il fonctionne et nous en avons tiré un grand nombre d’applications. C’est cependant une source de modestie plus que d’orgueil, car nous avons dû découvrir et accepter de nouvelles façons de penser, le monde étant beaucoup plus riche et subtil que notre imagination. Pour parler des particules, nous évoquerons ce monde quantique et relativiste. Il ne s’agit pas d’un monde propre aux particules que l’on peut être tenté d’ignorer dans la vie courante. Sans mécanique quantique, il n’y aurait ni transistors ni lasers et l’on ne pourrait pas comprendre comment l’atome, avec la structure qu’on lui connaît et qui est à la source de l’émission et de l’absorption de la lumière, peut simplement exister. La relativité, qui assigne à la vitesse de la lumière le rôle de vitesse limite, est de ce fait déjà bien présente dans de nombreux systèmes. Les accélérateurs fonctionnent conformément à ses principes et sont tous autant de preuves de sa validité, même s’il faut admettre que les valeurs mesurées pour les intervalles de temps et d’espace ne sont pas absolues, comme on le pensait, mais dépendent des vitesses relatives. Ce sont les lois de la physique qui ne dépendent pas de ces vitesses ! Elles sont universelles.
Weinberg, S. (1985). Le monde des particules: De l’électron au quark. Paris: Pour la Science.  
Last edited by: Dominique Meeùs 2011-05-03 08:45:57 Pop. 0%
      L’une des plus fondamentales raisons qu’avait Thomson d’expliquer ses observations en termes de particules fondamentales était la tradition atomiste qui s’était perpétuée après Leucippe, Démocrite et Dalton. Dans son article de 1897, Thomson cite les hypothèses du chimiste anglais William Prout (1785-1850) qui proposa en 1815 que les quelques douzaines d’atomes connus à l’époque soient constitués d’un seul type fondamental d’atome, l’atome d’hydrogène. Selon Thomson, Prout avait raison, mais l’ « atome » fondamental n’était pas l’atome d’hydrogène : c’était la particule beaucoup plus légère des rayons cathodiques. Aurait-il fait cette hypothèse si Prout et d’autres n’avaient pas auparavant propagé l’idée de particules fondamentales ? Comme nous l’avons vu, à l’époque où Thomson mesurait le rapport masse/charge électrique des particules cathodiques, Walter Kaufmann effectuait à Berlin une expérience comparable avec des résultats plus précis que ceux obtenus par Thomson ; Kaufmann ne prétendit cependant pas avoir découvert une particule fondamentale. Comme Hertz et d’autres physiciens en Allemagne et en Autriche, Kaufmann était fortement influencé par les idées du physicien et philosophe viennois Ernst Mach (1836-1916), qui soutenait, avec son entourage, qu’il n’était pas scientifique de s’intéresser à des objets hypothétiques comme les atomes, que l’on n’observait pas directement. Il est difficile de ne pas conclure que Thomson découvrit les particules que nous appelons aujourd’hui électrons parce que, à la différence de Mach et de Kaufmann, il pensait que la physique consistait aussi à découvrir des particules fondamentales.
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