Socialisme utopique et socialisme scientifique

(Le développement du socialisme de l’utopie à la science)

Introduction à la première édition anglaise

Économie

« Production marchande » production pour l’échange donc pas comme valeurs d’usage mais comme marchandises.

Artisanat, travailleurs indépendants

Manufacture, division du travail

Industrie, énergie mécanique non humaine

Matérialisme

Précurseurs atomistes Anaxagore et Démocrite (p. 25).

Duns Scot et les nominalistes.

Le matérialisme moderne est d’origine anglaise (17e siècle)

Francis (?) Bacon, primauté de l’expérience. Thomas Hobbes (p. 29), matérialisme mécaniste. Les objets agissent sur les sens. Nous donnons des noms aux objets et aux sensations. Il n’y a pas d’entités universelles (nominalisme). Critique des abus de langage des philosophes. Une substance incorporelle est aussi contradictoire qu’un corps incorporel.

Locke systématise le sensualisme de Bacon et Hobbes. Ses successeurs abandonnent la religion.

Le 18e est le siècle des matérialistes français (p. 31). Les Anglais retournent à la bigoterie. [D’Angleterre, elle est passé aux États-Unis !] Cela s’améliore dans la deuxième moitié du 19e (p. 33).

« En fait, qu’est-ce que l’agnosticisme, sinon un matérialisme « qui n’ose pas dire son nom » ? » [Dans Matérialisme et empiriocriticisme, Lénine qualifie l’agnosticisme d’idéalisme qui n’ose pas dire son nom.] Réalité des seules sensations, agnosticisme envers les objets. « La preuve du pudding, c’est qu’on le mange (p. 35). » La pratique est un critère plus fort que l’argumentation. [Caractère de classe de la position matérialiste.]

Contre les agnostiques néo-kantiens, Hegel affirme que le progrès des sciences permet de connaître la chose en soi (p. 37).

Matérialisme historique

Rôle révolutionnaire de la bourgeoisie contre la religion et la féodalité(pp. 41-43). Trois grandes batailles :

Le développement de la classe ouvrière et son organisation accompagnent la révolution industrielle (p. 61). La bourgeoisie sent l’importance nouvelle de la religion contre ce mouvement (p. 71).

I {Les Lumières et le socialisme utopique}

Le socialisme moderne part de la compréhension de la lutte de classe et de l’anarchie de la production mais prolonge la philosophie les Lumières du 18e (p. 82) qui critique radicalement les idées traditionnelles et rejette les vieilles formes d’État au nom de la raison (p. 83).

Mais cette raison est l’idéalisation du pouvoir de la bourgeoisie qui en s’opposant à l’ancien régime représente aussi l’opposition universelle entre exploiteurs et exploités (p. 84). Cependant lorsque le maître de corporation devient capitaliste, le compagnon devient prolétaire (p. 85) et il y a aussi un courant autonome de lutte (dans la Réforme en Allemagne, dans la Révolution anglaise, dans la Révolution française) accompagné d’ébauches théoriques : l’Utopie de Thomas More au 16e et la Cité du soleil de Tommaso Campanella au 17e (p. 87), un communisme plus élaboré chez Morelly et Mably au 18e, Saint-Simon, Fourier et Owen au 19e. Comme les philosophes des Lumières, ces utopistes ne parlent pas d’un point de vue de classe mais de celui de l’humanité entière mais contrairement à eux, ils critiquent l’ordre bourgeois, la faillite (p. 89) du règne bourgeois de la raison. Mais comme eux ils ne se fondent que sur la raison (p. 95).

Dans un capitalisme balbutiant, début 19e, il ne peut y avoir de lutte victorieuse autonome ni d’idéologie autonome (p. 93).

Saint-simon oppose les oisifs aux « ouvriers » dans lesquels il comprend entrepreneurs et banquiers (p. 97) qui devaient exercer un rôle dirigeant. Il entrevoit le remplacement de l’État politique par une administration des choses (p. 99).

Fourier critique la faillite des idéaux de la révolution bourgeoise (p. 101) – jusque dans l’hypocrisie de sa morale sexuelle.

Owen, fabricant, gérant de New Lanark, une filature de coton en Écosse, réalise une communauté de travail idéale basée sur le respect de la dignité de l’ouvrier, l’éducation et la morale (p. 107). Owen réalise que l’augmentation de la productivité suppose un accroissement phénoménal du surplus ce qui lui fait entrevoir l’exploitation (p. 109). De capitaliste philanthrope, il devient communiste (p. 111). Ruiné, il se consacre au mouvement ouvrier (p. 113) : 1re loi sur le travail des femmes et des enfants, mouvement coopératif.

« Le socialisme est [pour les utopistes] l’expression de la vérité, de la raison et de la justice absolues, et il suffit qu’on le découvre pour qu’il conquière le monde par la vertu de sa propre force. »

II {Métaphysique et dialectique}

Pour lui, les Grecs, Descartes et Spinoza sont dialectiques et le 18e français est métaphysique (p. 117) !

D’abord le tableau d’ensemble et les mouvements (p. 119 ¼). Héraclite (576? 540?-480) : « Παντα ρει (Panta rei). » Il faut ensuite compléter par l’étude des détails ce qui suppose de les isoler méthodologiquement. La science suppose une accumulation primitive d’observations et ne se développe donc qu’à partir de la période alexandrine (de – 323 à 640), puis chez les Arabes, puis de plus en plus vite à partir de la moitié du 15e. On y perd la vue d’ensemble et ce point de vue étroit passera en philosophie avec Bacon (1561-1626) et Locke (1632-1704) : « le mode de pensée métaphysique[2] » (p. 121).

(Thèse) Dans ce « mode de pensée métaphysique » (p. 121), les choses et leurs reflets[3] dans la pensée, les concepts » sont étudiées comme isolées et immuables. Logique bivalente : oui, non. C’est le mode du bon sens. Mais il y a aussi des degrés : limite entre avortement et meurtre, entre vie et mort. Identité et changement.

(Antithèse) Ces aspects trouvent leur place dans la pensée dialectique (p. 125) qui seule permet une « représentation exacte de l’univers, de son évolution et de celle de l’humanité, ainsi que du reflet de cette évolution dans le cerveau des hommes » (p. 127). Kant (1724-1804) a introduit une dimension historique dans sa cosmologie. Pour Hegel (1770-1831), tout est processus qui a une logique interne. Il avait cependant le malheur d’être idéaliste (p. 129).

(Synthèse) De là, contre l’idéalisme, retour au matérialisme, mais pas le matérialisme métaphysique, mécaniste du 18e mais un matérialisme dialectique (p. 131). C’est la fin de la philosophie : en dehors des sciences positives[4], il ne reste que la logique et la dialectique (p. 133).

Le développement de la lutte de classe conduit à un réexamen aussi de l’histoire passée et à y retrouver les classes (p. 133, bas) et les causes économiques (p. 135) par auquel le reste est superstructure. L’idéalisme est chassé de l’histoire. Le socialisme cesse d’être une intuition pour devenir une science (p. 135, bas) qui comporte aussi l’explication du capitalisme. Ces à Marx que l’on doit ces deux grandes avancées : le matérialisme historique et le concept de plus-value (p. 137).


[1] Classiques du marxisme, édition bilingue, Éditions sociales, Paris, 1977.

[2] Curieux, cette identification de la métaphysique à l’empirisme et au matérialisme mécaniste.

[3] Je n’aime pas.

[4] Il est très positiviste dans ce texte. Plus loin « le revirement dans la conception de la nature ne pouvait s’accomplir que dans la mesure où la recherche fournissait la quantité correspondante de connaissances positives ».