Dominique Meeùs
Dernière modification le
retour à la table des matières
— au dossier marxisme
La période de prospérité reviendra automatiquement, prétend le patronat, si l’on respecte les lois immuables de la logique capitaliste : de gros bénéfices permettent des investissements, des investissements signifient des créations d’emploi, et l’emploi crée une plus grande prospérité pour tous. Cette logique extrêmement simple et simpliste est répétée sur tous les tons dans tous les continents. Pour le patronat, la crise est une période salutaire d’épuration, durant laquelle les mécanismes de l’économie du marché libre sont rétablis. Selon eux, ces lois ont été violentées dans le passé par le pouvoir des ouvriers et de leurs syndicats et par la mainmise croissante de l’État sur le revenu national. En termes simples : des salaires trop élevés et des allocations sociales trop lourdes ont tué la poule aux œufs d’or. Au plus vite il sera procédé à « l’épuration », au plus vite réapparaîtra une longue période de grande croissance. Pour cette raison, tout doit céder devant le rétablissement des bénéfices. L’épuration signifie alors : se défaire des « excès sociaux » (salaires élevés…), du « luxe social » (sécurité sociale…), des « rigidités sociales » (législation sociale…). L’épuration signifie aussi : une rationalisation de l’appareil de production, la fermeture d’entreprises non rentables, la canalisation des aides publiques vers des secteurs et des entreprises de pointe. Telles sont en bref les différentes manières de rehausser le taux de profit. (Voir l’encadré 12 bis.)
Le sens de la production capitaliste se situe dans la « valorisation » du capital. Le possesseur du capital s’achète des bâtiments, des machines, des matières premières et des outils ; il engage des ouvriers et les fait produire des marchandises qu’il vend au marché. Le but est d’arriver à ce que le résultat final soit plus élevé que le capital de départ. C’est ce que Marx a appelé le cycle du capital :
La force motrice de la production capitaliste est le taux de profit. Le taux de profit est l’ultime mesure de la rentabilité du capital investi. La masse de profit est mesurée par rapport à la totalité du capital avancé, qui comporte un capital constant et un capital variable.
Le capital constant (symbolisé par C ; machines, bâtiments, matières premières…) est appelé ainsi parce qu’il ne crée pas de nouvelle valeur lors du processus de production, il ne fait que transmettre sa propre valeur aux produits.
Le capital variable (symbolisé par V ; force de travail) par contre, crée une nouvelle valeur lors du processus de production. Cette nouvelle valeur est divisée en une partie que la main-d’œuvre coûte au capitaliste (le salaire) et une partie dont il peut disposer à sa guise (la plus-value). En d’autres termes, le travail est la seule source de plus-value et de bénéfice.
Le taux d’exploitation est mesuré comme étant le rapport entre la plus-value et le salaire, la partie qui va au capitaliste par rapport à la part que reçoit l’ouvrier. En désignant la plus-value par S, le taux d’exploitation (aussi appelé taux de plus-value ; S′) s’exprime par :
La plus-value produite n’est pas identique au profit que réalise un capitaliste, parce que la plus-value produite est repartagée entre les capitalistes. Il y a transfert de plus-value. Mais il ne peut être réalisé plus de profit total qu’il n’y a de plus-value. Au niveau social global, la somme de plus-value égale la somme de profit (S = P).
Le taux de profit est calculé comme suit :
Il y a donc moyen de manipuler le taux de profit par différentes stratégies patronales.
1o Tout ce qui réduit le dénominateur, augmente le taux de profit : stratégies qui augmentent le taux d’exploitation ( ), stratégies qui économisent sur le capital constant ou sur son utilisation (C).
2o Toute stratégie qui augmente la vitesse avec laquelle le capital (C + V) parcourt le cycle, augmente d’autant de fois, ce que le capital produit comme profit (P).
Lors de grandes crises, un taux de profit en déclin va de pair avec une surcapacité permanente. La plus-value produite n’est réalisée que si les produits sont vendus sur un marché, s’ils trouvent acquéreur. Pour les patrons il y a, à part le problème de « rentabilité », un problème de « réalisation ». Les capitalistes n’investiront dans l’expansion que si le taux de profit prévisible est suffisamment élevé (supérieur au taux de profit moyen) et lorsqu’ils espèrent trouver des débouchés suffisants pour leurs produits. C’est pour cela que les patrons mènent, en temps de crise, un double combat : pour l’augmentation du taux de profit et pour la conquête de marchés (anciens et nouveaux). Tout cela rentre dans le mot d’ordre magique : la position concurrentielle.
Pour trouver de nouveaux marchés, le patronat peut emprunter trois voies : développer de nouveaux produits (nouvelles technologies), conquérir de nouveaux territoires (Europe de l’Est) et accaparer des marchés des concurrents.
Table of contents