Dominique Meeùs
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— au dossier marxisme
L’envahissement des économies du tiers monde par les entreprises transnationales désintègre complètement ces économies, et en cas de retrait, il ne reste que des ruines. Prenons un exemple « moyen », les Philippines. Ce pays a attiré des investissements étrangers en créant des zones franches, comme la grande Bataan Export Processing Zone. À son propos, les communistes philippins disent :
« Ces investissements renforcent l’emprise de l’impérialisme sur notre pays. Ils renforcent également la classe de la bourgeoisie locale qui collabore avec le capital étranger.
Par ailleurs, le bénéfice économique que les Philippines en retirent est très contestable, parce que l’économie est de plus en plus orientée vers l’exportation. Nous nous opposons à cette situation. Ce dont nous avons besoin, c’est un développement progressif de l’agriculture et une industrialisation au service de ce développement. Mais tout ce qui a été développé dans ce sens par la bourgeoisie locale est confronté à la concurrence des multinationales qui envahissent notre économie, parce que les transnationales font appel aux capitaux locaux disponibles et à la main-d’œuvre la plus qualifiée. Les secteurs existants du textile et de la confection sont éliminés. Le chômage augmente.
Les difficultés financières du pays ne cessent d’empirer. Les bénéfices quittent le pays pour l’étranger. Pour chaque dollar investi pendant la période 1975-1985, 3,75 dollars sont partis à l’étranger. Le pays est étranglé par les dettes. Les transnationales ne contribuent en rien à combler ce gouffre, parce qu’elles drainent elles-mêmes tout l’argent disponible vers leurs propres investissements. 75 % des capitaux investis sont des prêts à taux réduits obtenus sur le marché local. Elles profitent de divers subsides et d’exemptions d’impôt à l’importation, avantages qui sont finalement prélevés sur la population. »
Sans parler des conditions de travail inhumaines imposées aux ouvriers de ces pays. Dans la plupart des cas, ces usines emploient beaucoup de travailleurs manuels. Pour ce travail, les transnationales engagent de préférence des femmes, qui subissent une triple exploitation : d’abord comme main-d’œuvre, comme chez nous, ensuite comme main-d’œuvre du tiers monde (cinq à six fois moins chère que chez nous), finalement comme femmes ouvrières (deux fois moins chères que les hommes).
C’est le capitalisme sous sa forme la plus primitive et la plus cruelle : la main-d’œuvre ne doit même pas être payée suffisamment pour subvenir à ses besoins et se reproduire. Il y a suffisamment de réserve.
Mais on voit également l’apparition dans le tiers monde d’entreprises ultramodernes et flexibles, servant de banc d’essai pour les conditions de travail que le capitalisme veut généraliser. L’entreprise modèle de Volkswagen au Mexique ne compte que des ouvriers au contrat temporaire !
Certains pays du tiers monde sont ainsi devenus d’importants exportateurs industriels. Ces nouveaux pays industrialisés (NPI) paient cher leur développement industriel : une dette croissante et une dépendance asphyxiante en font les otages des marchés internationaux, dominés par les pays impérialistes. Ils restent en grande partie dépendants de la technologie des pays riches, et ce fossé technologique leur empêche l’accès aux branches les plus avancées de l’industrie. Le Brésil, qui a connu le plus grand afflux d’entreprises transnationales, a une dette extérieure de 80 milliards de dollars, et une inflation de 1 800 % en 1989.
Les dernières années, on parle de plus en plus de recentrage. À l’opposé de la tendance à investir dans le tiers monde, une autre tendance se manifeste, celle du retour vers les pays les plus industrialisés. Plusieurs raisons expliquent ce courant :
* L’importance croissante du facteur technologique et de la science dans la production réduit d’autant l’importance du coût salarial. Si l’on sait que le coût salarial des entreprises les plus avancées au Japon, même dans les secteurs de l’automobile ou de l’acier, n’excède pas les 5 à 10 %, on comprendra que l’avantage des pays à bas salaires s’estompe.
* La concurrence entre les monopoles se joue surtout sur le plan technologique. Les pays industrialisés détiennent également le monopole de la technologie. 80 % des nouveaux brevets (les inventions) sont enregistrés dans les cinq principaux pays capitalistes. C’est là que la lutte concurrentielle est la plus âpre, c’est là que les monopoles concentrent leurs forces.