Dominique Meeùs
Dernière modification le
retour à la table des matières
— au dossier marxisme
Toutes les formes d’internationalisation décrites plus haut conduisent à une énorme concentration du pouvoir économique à l’échelle mondiale. Un nombre de plus en plus restreint de banques et de monopoles industriels détermine le sort de milliards de personnes. Les 600 entreprises les plus importantes réalisent toutes un chiffre d’affaires de plus de 40 milliards de francs belges (le « Billion Dollar Club ») et produisent, selon les estimations, 20 à 25 % de la valeur ajoutée réalisée dans le monde capitaliste22. Sept transnationales américaines contrôlent la totalité du commerce mondial des céréales. Les potentats actuels du monde occidental décident qui pourra vivre et qui devra mourir23. Les sommes gigantesques investies pour le rachat d’entreprises, les offres publiques d’achat, les raids sont puisées dans les réserves de capitaux que les monopoles ont accumulées pendant les périodes de crise précédentes, au détriment des travailleurs24. Une chose est certaine : ces sommes ne sont pas destinées à établir plus de justice ni à résoudre le problème de la faim et du sous-développement. Elles servent à acquérir encore plus de richesses et de pouvoir. C’est pour cette raison que, face à ce pôle de richesse, grandit sans cesse le pôle de pauvreté, tant dans le monde capitaliste que dans les pays « en voie de développement ».
Aujourd’hui, « nos » monopoles ont trouvé de nouvelles sources de bénéfices dans les pays de l’Est, où ils ont restauré la « liberté » de l’économie de marché et la « démocratie » du capital privé. Dans les années à venir, l’accumulation de la richesse et de la pauvreté pourront s’y déployer sous leur forme la plus brutale.
Ainsi, une poignée de mastodontes donne sa forme à l’économie mondiale et nous conduit, vers l’an 2000, à ce panorama radieux : quelque dix millions de propriétaires de capitaux et de fortunes et au moins quatre milliards d’affamés.
D’autre part, l’internationalisation signifie également un nouveau progrès dans le caractère social de la production. Ce concept est souvent identifié à l’aspect « grandes usines ». Mais au sens marxiste, le caractère social de la production signifie essentiellement la dépendance mutuelle, l’imbrication complexe du travail de milliers et de milliers d’ouvriers et de travailleurs pour fabriquer les produits. La segmentation, les contrats de sous-traitance, les accords de coopération internationaux, les réseaux internationaux accentuent toujours davantage le caractère social de la production. Cela implique une fragmentation croissante et une interdépendance entre les différents éléments de la chaîne de production au sein de complexes de production internationaux. Cela implique l’internationalisation des capitaux et des forces de travail. Cela implique de nouvelles formes de division internationale du travail.
Lorsque Marx démontrait que la disparition du capitalisme était irrémédiable, il se basait sur cette contradiction fondamentale : le caractère social de la production est inconciliable avec la propriété privée du capital et des machines. Pendant les formations syndicales, cette thèse de Marx est souvent présentée d’une manière tout à fait déformée : Marx aurait prédit la disparition rapide du capitalisme, et sa prédiction ne se serait pas réalisée. Or, ce que Marx a démontré, c’est que le capitalisme correspond à un degré de développement déterminé des forces productives, que le capitalisme est une méthode de production qui, tôt ou tard, succombera à ses propres contradictions.
Le degré avancé de centralisation et de socialisation montre que le système est mûr pour passer à une forme de société supérieure. L’économie mondiale serait parfaitement gérable, pourrait se déployer d’une manière harmonieuse, assurer un partage équilibré des moyens de production et des richesses, si elle n’était pas dirigée par les monopoles qui ne poursuivent que le bénéfice. Cette conscience oriente la lutte des ouvriers et des peuples opprimés contre un ennemi commun, le capitalisme et l’impérialisme. Le lien le plus puissant capable d’assurer l’unité internationale, c’est la lutte pour le socialisme, la libération nationale et la démocratie populaire.