Dominique Meeùs
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— au dossier marxisme
Une fois que l’on se place sur le terrain du capitalisme, le choix entre « bons » et « mauvais » capitalistes est une conséquence logique. Il n’est dès lors pas surprenant que le soutien au « capitalisme dynamique » soit aussi ancien que le réformisme. Des capitalistes tels que Solvay et Francqui (Société Générale) avaient le soutien de Vandervelde et de son parti, aussi pour les conquêtes coloniales. La Générale ne fut attaquée que lorsqu’elle perdait de son « dynamisme », c’est-à-dire qu’elle accusait un retard par rapport aux multinationales. Exiger plus de capitalisme ou choisir entre des formes de capitalisme ne peut jamais être le rôle du mouvement ouvrier. Quelle autre signification le « dynamisme » a-t-il à l’intérieur du capitalisme que de « se rapprocher le plus possible des mécanismes du marché » ? En d’autres termes, les capitalistes qui s’adaptent de la façon la plus agressive à l’évolution du capitalisme sont les plus dynamiques. Ceux qui procèdent aux assainissements les plus durs, licencient le plus rapidement et font trinquer le mieux ont le plus de chance de survie. Ceux qui tirent le mieux parti de la main-d’œuvre bon marché du tiers monde prennent une avance sur leurs concurrents. Ils font les plus grands bénéfices et peuvent investir le plus, ou acheter des entreprises pour étendre leur contrôle. Ce sont les « vainqueurs » qui plaisent aux partisans du capitalisme dynamique.
D’ailleurs, de plusieurs points de vue, la distinction supposée entre capital industriel et financier est une fiction.
Du point de vue de la propriété, il y a de plus en plus fusion entre capital industriel et capital bancaire, entre financiers et entrepreneurs. L’histoire entière de la Société Générale, comme banque et comme holding, en est une illustration. Mais aussi au niveau mondial, les groupes financiers, avec leurs activités imbriquées à la fois dans la finance et dans l’industrie, sont depuis le début de ce siècle les véritables centres du pouvoir. L’Allemagne, le Japon et les États-Unis sont régis par le capital financier, un enchevêtrement de capital bancaire et industriel.
Du point de vue de la stratégie, il y a une nette tendance à attribuer plus d’importance à l’activité financière à l’intérieur de la stratégie industrielle. Il y a plusieurs raisons à cela : les entreprises ont un excédent de réserves financières, on peut gagner gros en spéculant sur les marchés financiers internationaux ; puis la nouvelle technologie exige d’énormes capitaux. On voit ainsi de plus en plus d’entreprises ou de groupes qui développent leurs propres structures financières. « La survie de l’entreprise, son identité, sa pérennité dépendent au premier chef de sa stratégie financière42… », prétend « l’industriel » Jacques-Henri David, PDG du groupe français Saint-Gobain. Aujourd’hui la frontière entre l’activité industrielle et financière est devenue particulièrement floue. L’activité spéculatrice, parasitaire est inhérente à l’activité industrielle. Tout comme le parasitisme est inhérent au capitalisme tout court. Ceux qui prétendent séparer les deux poursuivent des chimères. Le capitalisme lui-même est un système parasitaire qui doit être combattu et vaincu dans son entièreté.