Manuel d’économie politique de l’Académie des sciences de l’URSS
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43.3. Les formes essentielles de coopération économique des pays du camp socialiste.

Les principales formes de coopération entre les pays du camp socialiste sont le commerce extérieur, les crédits, l’aide scientifique et technique, la collaboration dans le domaine de la formation des cadres, l’échange d’expérience au sujet de l’édification économique.

De toutes ces formes, le commerce extérieur est la plus importante.

Le commerce extérieur des pays du camp socialiste repose sur des principes tout autres que ceux du commerce extérieur sur le marché mondial capitaliste. Dans le monde capitaliste, le commerce extérieur, tout entier aux mains des monopoles, est dominé par le souci de réaliser le profit maximum à l’aide d’échanges non équivalents et d’autres moyens de piller et d’assujettir les pays retardataires et dépendants. Dans les pays du camp socialiste, le commerce extérieur est le monopole de l’État (U.R.S.S. et pays européens de démocratie populaire) ou bien il est étroitement contrôlé par l’État (République populaire de Chine) et concourt à l’essor général, accélère le développement économique, permet d’élever le niveau de vie de la population.

Chacun des pays participant au nouveau marché mondial réalise par son commerce extérieur une part toujours croissante de sa production et reçoit en échange une quantité de plus en plus grande de valeurs matérielles : équipement industriel, matières premières et autres marchandises nécessaires à son développement économique. Chaque pays importe les marchandises qui lui sont indispensables et exporte celles dont d’autres ont besoin, aucun des participants à ces échanges n’imposant à son partenaire des produits dont ce dernier n’a que faire, comme cela se pratique souvent sur le marché capitaliste.

Les prix du marché mondial des pays du camp socialiste sont établis sur la base d’accords librement consentis et sur un pied d’égalité, dans le respect total des intérêts réciproques, ce qui exclut toute discrimination et tout échange non-équivalent. Ce sont des prix stables.

Le progrès ininterrompu du commerce extérieur des pays du camp socialiste témoignent avec éclat du développement et du renforcement du nouveau marché mondial.

Le volume du commerce extérieur de l’Union soviétique a été, en 1954, le quintuple de ce qu’il était avant la guerre, tandis que le commerce extérieur des pays capitalistes n’a augmenté dans le même temps que d’un peu plus de 50 %.

Les échanges commerciaux de la République populaire chinoise avec l’étranger ont doublé par rapport à 1950. Ceux de six pays européens de démocratie populaire (Pologne, Tchécoslovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie et Albanie) ont augmenté de plus de 70 % en 1954 par rapport à 1948. Et par rapport à 1946, le commerce extérieur de 1954 a été multiplié par : 6,5 fois environ en Pologne, 4 fois environ en Tchécoslovaquie, 14,5 fois en Hongrie, 16 fois en Roumanie, 3,5 fois en Bulgarie. Dans la République démocratique allemande, il a été multiplié par plus de 25 fois par rapport à 1947.

Les échanges commerciaux entre pays du camp socialiste se développent à un rythme particulièrement rapide.

En 1938, les transactions de l’U.R.S.S. avec la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie et l’Albanie ne constituaient que 1,5 % du commerce extérieur soviétique, alors qu’en 1954, elles se sont élevées à 40 % du trafic extérieur de l’U.R.S.S. Les échanges de l’U.R.S.S. avec la Chine constituaient 4 % de son commerce extérieur en 1938 et 18 % en 1954.

En 1954, la part des pays du camp socialiste s’est élevée à plus de 70 % dans le commerce extérieur de la Pologne, à environ 75 % dans celui de la Tchécoslovaquie, à environ 82 % dans celui de la Roumanie, à 70 % dans celui de la Hongrie, à 87 % dans celui de la Bulgarie, à près de 100 % dans celui de l’Albanie, à plus de 75 % dans celui de la République démocratique allemande.

L’Union soviétique, qui dispose d’une industrie lourde hautement développée, et notamment d’une industrie des constructions mécaniques, fournit une grande quantité d’équipement de toute sorte aux pays de démocratie populaire. De 1948 à 1954, les fournitures soviétiques d’équipement industriel et de machines à ces pays ont plus que décuplé.

Les machines, les biens d’équipement et autres moyens de production occupent aussi une place importante dans les exportations d’autres pays du camp socialiste. La Tchécoslovaquie exporte les produits de ses constructions mécaniques, de sa métallurgie et de son industrie chimique, ainsi que du coke et des chaussures. La Pologne fournit de la houille, du coke, des laminés ferreux, du zinc, du matériel roulant, des denrées alimentaires. La Hongrie exporte des machines-outils, des turbines, des transformateurs, du matériel de levage et de transport, de l’aluminium, de la bauxite, des denrées alimentaires. Le pétrole et ses dérivés, le bois occupent une grande place dans les exportations de la Roumanie. La Bulgarie exporte des minerais de zinc et de plomb enrichis, du ciment, du bois, des produits chimiques, des fruits, du tabac et du vin ; l’Albanie, des minerais, du pétrole, du bitume, du cuir, des fruits ; la République démocratique allemande, des constructions mécaniques, de l’appareillage électrique et des produits chimiques, des instruments de précision et d’optique. La République populaire de Chine exporte différentes matières premières industrielles et agricoles, des denrées alimentaires.

Les crédits sont une forme importante de la coopération économique entre les pays du camp socialiste. Dans le monde capitaliste, ils sont un des instruments les plus efficaces du pillage des pays sous-développés par les monopoles des puissances impérialistes. L’octroi de crédits est d’ordinaire subordonné à l’engagement de les dépenser pour acquérir des marchandises dans le pays créditeur. Les impérialistes écoulent ainsi dans les pays débiteurs, à des prix de monopole, des marchandises, et en premier lieu des objets de consommation qui, autrement, ne trouveraient pas preneur. Dans le camp socialiste, l’octroi de crédits n’entraîne aucun privilège pour le créditeur. Les crédits sont accordés avant tout pour l’achat d’équipement, de machines et autres moyens de production, ainsi que de marchandises dont la population du pays a besoin et qui ne sont pas fabriqués sur place. Les États bénéficiaires de crédits amortissent ceux-ci et les intérêts qu’ils portent en fournissant à des prix équitables des marchandises courantes dont ils sont habituellement exportateurs.

C’est ainsi que, par l’accord du 14 février 1950, l’Union soviétique a ouvert, à des conditions avantageuses (1 % d’intérêt annuel), à la République populaire de Chine un crédit à long terme de 300 millions de dollars américains à dépenser en 5 ans, à dater du 1er janvier 1950, par parties annuelles égales, pour payer l’équipement et les matériaux fournis par l’U.R.S.S., notamment l’équipement de centrales électriques, d’usines métallurgiques et de constructions mécaniques, de mines, de chemins de fer et d’autres moyens de transport, des rails et autres matériaux indispensables au relèvement et au développement de l’économie nationale chinoise. En 1954, l’Union soviétique a fourni à la République populaire de Chine un crédit à long terme de 520 millions de roubles. En vertu des accords économiques de 1953 et de 1954, l’Union soviétique, qui aide la Chine à réaliser son premier plan quinquennal, s’est chargée d’établir les plans et de fournir l’équipement pour la construction et la reconstruction des 156 entreprises industrielles les plus importantes. L’Union soviétique aide la Chine à bâtir ces usines, à en monter les installations et à les mettre en exploitation.

Conformément aux accords de crédit à long terme qu’elle a conclus, l’Union soviétique livre de grosses quantités de machines et d’équipement à la Pologne, à la Bulgarie, à l’Albanie et aux autres pays. Grâce aux crédits soviétiques, l’Albanie a reçu l’équipement complet d’usines et de fabriques entières : celui d’un combinat textile, d’une sucrerie, d’une fabrique de ciment, d’une raffinerie de pétrole et d’autres entreprises. La Bulgarie a reçu un équipement complet pour le combinat chimique Staline, pour la centrale thermique V. Tchervenkov, pour une usine métallurgique et une usine traitant le plomb et le zinc, ainsi que pour un certain nombre d’autres entreprises.

L’aide technique et scientifique concourt efficacement à l’essor économique des pays du camp socialiste. Cette aide revêt des formes variées ; elle consiste avant tout dans la communication de brevets, l’octroi de licences et la fourniture de la documentation technologique relative aux inventions et aux perfectionnements techniques les plus récents, l’échange d’expérience technique, l’exploitation en commun des ressources naturelles, la construction en commun d’entreprises industrielles, l’envoi de spécialistes.

Les pays du camp socialiste s’accordent mutuellement l’aide technique et scientifique la plus large sur la base d’une coopération et d’une entraide étroites. L’Union soviétique aide les pays de démocratie populaire à construire de grandes entreprises modernes, à monter des branches industrielles entières, en premier lieu dans l’industrie lourde, qui est la base du développement économique de tous les pays marchant dans la voie du socialisme. Elle fournit aussi l’équipement le plus perfectionné aux entreprises industrielles et aux établissements culturels aménagés d’après des projets soviétiques.

L’Union soviétique transmet aux autres pays du camp socialiste des inventions scientifiques, des brevets et des licences portant sur les dernières réalisations de la technique ; les frais qu’entraînent l’établissement des projets et la préparation de la documentation technique étant seuls remboursés. Des ingénieurs et des techniciens soviétiques aident les pays de démocratie populaire à effectuer des travaux de prospection, à exploiter des gisements de minéraux utiles, à exécuter des travaux de montage et de construction particulièrement délicats sur un certain nombre de grands chantiers. Le large échange, entre pays du camp socialiste, des résultats obtenus par eux dans la science et la technique est appelé à jouer un rôle important dans l’accélération du progrès technique de tous ces pays, dans l’adoption très rapide des types d’équipement et des méthodes de production les plus perfectionnes dans l’industrie, les transports et l’agriculture.

La décision, prise par l’Union soviétique, d’apporter aux pays de démocratie populaire l’aide scientifique et technique nécessaire à la création de bases expérimentales permettant de faire des recherches dans le domaine de la physique nucléaire et l’utilisation de l’énergie atomique à des fins pacifiques, a une importance énorme pour le développement des forces productives de ces pays. Il leur est attribué la quantité de matériaux fissiles nécessaire aux piles atomiques et aux expériences scientifiques ; à leur tour, ils fournissent à l’Union soviétique les matières premières correspondantes.

Parmi les grandes entreprises industrielles construites avec l’aide de l’Union soviétique dans les pays européens de démocratie populaire, citons le combinat métallurgique Lénine, une usine d’automobiles et une usine d’aluminium en Pologne, le combinat métallurgique Gottwald en Tchécoslovaquie, le combinat métallurgique Staline en Hongrie, la centrale hydroélectrique Lénine et une usine de tracteurs en Roumanie, le combinat chimique Staline et l’usine métallurgique Lénine en Bulgarie, la centrale hydroélectrique Lénine en Albanie et un certain nombre d’autres combinats, entreprises de constructions mécaniques lourdes et centrales électriques. L’aide technique généreuse accordée par l’U.R.S.S. a été l’un des principaux facteurs qui ont permis aux pays de démocratie populaire de créer en des délais records des industries qu’ils ne possédaient pas. C’est ainsi que la Roumanie non seulement extrait davantage de pétrole, mais a aussi créé une industrie de constructions mécaniques qui produit presque tout l’équipement indispensable à cette extraction et la majeure partie de l’appareillage perfectionné que nécessite le raffinage. Jamais encore un petit pays, possédant d’importantes richesses pétrolières, n’avait réussi à mettre sur pied une industrie produisant tout ce qu’il faut pour exploiter le pétrole. C’est ce dont ne peuvent même rêver, dans le monde capitaliste, les petits pays possesseurs de gisements pétroliers, qui sont férocement exploités par les monopoles américains et anglais. En vertu d’un traité conclu entre la Hongrie et la Tchécoslovaquie, celle-ci a pu monter une industrie de l’aluminium alimentée par la bauxite hongroise. La Pologne a aidé la Tchécoslovaquie à organiser la production de carbures et à construire des fonderies de zinc. La Pologne et la Tchécoslovaquie ont bâti en commun à Nowe Dwory (Pologne) une centrale qui fournit du courant électrique aux deux pays. La Pologne a ouvert à la Tchécoslovaquie un accès à la mer en lui concédant par un bail à long terme une partie du port de Szczecin.

À la coopération technique et scientifique des pays du camp socialiste est étroitement liée la collaboration dans le domaine de la formation des cadres. De nombreux jeunes gens venus des pays frères poursuivent leurs études dans les écoles supérieures, font un stage dans les entreprises et les établissements scientifique de l’U.R.S.S., de la Tchécoslovaquie et de la Pologne.

L’étude et l’échange d’expérience dans le domaine des problèmes les plus variés de la production, de la technique et de l’organisation, prennent de plus en plus d’ampleur. Dans ce but, on échange de nombreuses délégations d’hommes d’État, d’administrateurs, d’ingénieurs, on organise des expositions industrielles, etc.

Le développement des relations commerciales et des autres relations économiques entre l’Union soviétique et des États de démocratie populaire (Tchécoslovaquie, Pologne, Hongrie), d’une part, et les pays sous-développés, d’autre part, est un facteur important du renforcement de la coopération économique entre pays pacifiques. Ces relations se développent sans cesse sur la base d’accords commerciaux et d’autres accords économiques, destinés à favoriser le développement des forces productives et l’élévation du bien-être des peuples.

Ainsi, en vertu de l’accord soviéto-indien du 2 février 1955, l’Union soviétique construit, dans l’Inde, une grande usine métallurgique d’une capacité annuelle de 1 million de tonnes d’acier pour laquelle elle a accordé un crédit avantageux à long terme. Elle fournit toute l’installation et apporte à l’Inde l’aide technique nécessaire, y compris l’envoi de spécialistes hautement qualifiés, ainsi que la formation d’un personnel indien, tant en Inde qu’en Union soviétique.

Les succès remportés grâce à la coopération économique des pays du camp socialiste, le développement constant des relations économiques de toute sorte entre eux-mêmes, ainsi qu’entre eux et les États capitalistes, favorisent le renforcement de la paix et de l’amitié entre les peuples.