Manuel d’économie politique de l’Académie des sciences de l’URSS
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L’industrialisation socialiste, réalisée en tenant compte des particularités de chaque pays, de son rôle dans la division internationale du travail à l’intérieur du camp socialiste, est la condition la plus importante de l’édification du socialisme dans les pays de démocratie populaire. Grâce à l’industrialisation, ces pays créent la base matérielle et technique du socialisme, ils assurent un fondement solide à l’élévation ininterrompue de la production et du bien-être général.
Avant la deuxième guerre mondiale, la part de la production industrielle dans la production totale de l’industrie et de l’agriculture était de 47,6 % en Pologne, de 53 % en Hongrie, de 40 % en Roumanie, de 33,8 % en Bulgarie, de 18,3 % en Albanie. En Pologne, 65 % de la population active travaillaient dans l’agriculture et environ 17 % dans l’industrie ; en Roumanie, 78 % dans l’agriculture et 7 % dans l’industrie ; en Bulgarie, 79,9 % dans l’agriculture et 8 % dans l’industrie et l’artisanat.
Par le niveau du revenu national, par la fabrication et la consommation des produits industriels par habitant, ainsi que par un certain nombre d’autres indices économiques, ces pays étaient très en retard sur les pays industriels plus développés, Ainsi en Pologne, la consommation des métaux ferreux par habitant était 10 fois moins importante qu’en Angleterre et près de 8 fois moins qu’en Allemagne ; la consommation d’énergie électrique y était d’environ 7 fois plus faible qu’en Angleterre et en Allemagne, et 5 fois plus faible qu’en France.
Tous ces pays ont dû, pendant une certaine période, relever leur économie qui avait beaucoup souffert de la guerre et des pillages fascistes. Avec l’appui de l’Union soviétique et grâce aux avantages d’une économie socialiste planifiée, les pays de démocratie populaire ont réussi à relever leur économie en un laps de temps très court, en deux ou trois ans.
Le relèvement de l’économie nationale a donné une base solide à la reconstruction socialiste. La construction des fondements du socialisme a été la tâche centrale des premiers plans quinquennaux (sexennal en Pologne) de développement de l’économie nationale. L’industrialisation socialiste (développement de la grande industrie socialiste, et avant tout de l’industrie lourde) a été l’élément essentiel de ces plans. Mais dans chaque pays, elle présente des particularités qui sont fonction du niveau de développement et de la structure de l’industrie, des conditions historiques, économiques et naturelles.
Le gros des ressources nécessaires à l’industrialisation des pays de démocratie populaire provient des accumulations opérées dans le secteur socialiste. Il est aussi fait appel aux épargnes des travailleurs sous forme d’emprunts d’État. Ensuite, une partie des revenus des éléments capitalistes de la ville et de la campagne, prélevée surtout au moyen d’un impôt progressif, concourt aussi à ce but.
L’accroissement de l’accumulation socialiste résulte avant tout de l’élévation continue de la productivité du travail social grâce à l’emploi des techniques les plus modernes et à une meilleure organisation du travail. L’émulation socialiste, à laquelle participe la grande masse des ouvriers, contribue puissamment à élever la productivité du travail. Les ouvriers d’avant-garde appliquent avec succès la riche expérience de l’U.R.S.S. et des autres pays du camp socialiste en matière de production. La répartition selon le travail, les différentes formes de salaire aux pièces, la lutte contre le nivellement des salaires jouent un rôle de premier plan dans l’élévation ininterrompue de la productivité du travail. L’utilisation de la loi de la valeur, le renforcement au maximum du régime d’économies et l’application conséquente de la gestion équilibrée ont une importance énorme pour l’accroissement continuel des accumulations dans la production socialiste.
Klement Gottwald a écrit :
N’avions-nous pas, n’avons-nous pas nombre de responsables et de militants de l’économie politique qui ont oublié l’action de la loi de valeur, et qui, en conséquence, ont négligé le rôle de la gestion équilibrée, de la rentabilité des entreprises, du prix de revient, des prix, etc. ? N’est-il pas clair que cette attitude erronée porte un grand préjudice à notre économie et freine notre avance dans la voie du socialisme ? Je crois que cela est clair et que, par conséquent, tous nos travailleurs, et surtout ceux qui occupent des postes dirigeants et responsables doivent respecter toujours le régime d’économies dans la production, dans le domaine du stockage et de l’écoulement.
L’industrialisation socialiste des pays de démocratie populaire se déroule dans des conditions historiques plus favorables qu’en U.R.S.S., et présente des particularités essentielles. L’Union soviétique était seule à édifier le socialisme ; elle s’est industrialisée sans aucune aide extérieure, en recourant exclusivement à ses ressources propres. Les pays de démocratie populaire, eux, réalisent leur industrialisation alors qu’il existe un puissant camp du socialisme. Pour réaliser leur industrialisation socialiste, les pays de ce camp s’appuient sur une large entraide aux formes les plus diverses.
L’Union soviétique a dû créer chez elle à un rythme accéléré toutes les branches de l’industrie, de l’industrie lourde en premier lieu. Les pays de démocratie populaire sont exemptés de cette tâche qui excéderait leurs possibilités. Parce qu’il appartient au camp du socialisme, chacun d’eux peut créer et développer en premier lieu les branches d’industrie pour lesquelles il dispose des conditions économiques et naturelles les plus favorables. La division du travail très poussée, l’entraide économique et la coopération entre les États du camp socialiste contribuent au succès de l’accomplissement de cette tâche.
Grâce à la réalisation des plans à long terme de reconstruction socialiste l’économie nationale, le niveau de la production industrielle d’avant-guerre a été dépassé en 1954 : de plus de 300 % en Pologne, de près de 250 % en Hongrie, de 130 % en Tchécoslovaquie, de 400 % en Bulgarie, d’environ 160 % en Roumanie. La part de la production industrielle dans la production totale de l’industrie et de l’agriculture a fortement augmenté. Dans tous les pays de démocratie populaire, la Bulgarie et l’Albanie exceptées, la production des branches de l’industrie fournissant des moyens de production représente plus de la moitié de l’ensemble de la production industrielle. Les pays européens de démocratie populaire sont devenus des pays possédant une grande industrie équipée selon la technique la plus moderne.
La Pologne a donné un développement considérable aux industries houillère et chimique, à la sidérurgie, à l’industrie des matériaux de construction. Elle fabrique aujourd’hui des automobiles, des tracteurs, des navires, de la fibre artificielle, etc. En 1954, la production par habitant y avait été multipliée, par rapport à 1938, par 3,5 pour l’acier, par plus de 5 pour l’électricité, par 3 environ pour le ciment. En Hongrie, l’industrie de l’aluminium, les constructions mécaniques, la production de matériel de mine et de machines agricoles ont pris un vigoureux essor, de même qu’en Roumanie l’extraction et le raffinage du pétrole, l’industrie chimique ; dans ce dernier pays, d’importantes branches des constructions mécaniques ont été créées, telles l’industrie des machines agricoles et celle des équipements pétroliers, les constructions navales, etc.
Dans la République démocratique allemande, le volume de la production industrielle a, en 1954, atteint presque le double du niveau de 1936 ; ces dernières années, les disproportions provoquées dans l’économie nationale par la coupure de l’Allemagne ont été considérablement réduites ; une base métallurgique a été créée dans la république, le potentiel des constructions mécaniques lourdes et des constructions navales a été développé, on a organisé la construction de machines agricoles modernes, la fabrication des produits chimiques a augmenté.
Tout en assurant le développement par priorité de l’industrie lourde, base de l’essor de la reconstruction technique de toute l’économie nationale, les États de démocratie populaire procèdent à d’importants investissements dans l’agriculture ainsi que dans les industries légère et alimentaire, afin d’accroître notablement la production des denrées agricoles, des articles industriels de consommation courante, et d’élever le niveau de vie des travailleurs.