Manuel d’économie politique de l’Académie des sciences de l’URSS
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27.5. La répartition géographique de la production socialiste.

En régime socialiste, une nouvelle répartition géographique de la production et un nouveau système de rapports s’établissent entre les différentes branches d’activité et les différentes régions du pays.

Dans la société bourgeoise, la course au profit et la concurrence ont pour résultat une répartition inégale et irrationnelle de la production. L’industrie se concentre d’elle-même dans quelques centres, alors que d’immenses territoires, notamment les territoires coloniaux périphériques, sont condamnés à rester arriérés sous le rapport industriel. En régime socialiste, par contre, la répartition de la production s’effectue selon un plan, de façon à accroître la productivité du travail social, la puissance de l’État socialiste et le bien-être des travailleurs. La répartition par l’État soviétique de la production socialiste obéit aux principes suivants, découlant des lois économiques du socialisme.

Premièrement, rapprocher au maximum la production des sources de matières premières et des régions consommatrices. Esquissant un plan en vue de réorganiser l’industrie et d’assurer un essor économique général du pays, Lénine donnait l’indication suivante :

Ce plan doit comprendre :

une répartition rationnelle de l’industrie en Russie du point de vue de la proximité des matières premières et de la possibilité de réduire au possible les pertes de travail entre le traitement des matières premières et tous les stades successifs de la transformation des produits semi-finis jusqu’à l’obtention des articles terminés.

V. Lénine, « Esquisse d’un plan de travaux scientifiques et techniques », Œuvres, t. 27, p. 333.

Cette répartition de la production permet de mieux utiliser les ressources naturelles, de mettre fin aux transports irrationnels, d’où une économie de travail considérable à l’échelle de toute la société et des rythmes accélérés de développement de l’économie nationale.

Deuxièmement établir une division méthodique du travail entre les différentes régions économiques tout en assurant un développement harmonieux de l’économie à l’intérieur de ces régions, compte tenu des conditions naturelles de chaque région et de l’opportunité économique de produire tels ou tels articles industriels et denrées agricoles. Un développement harmonieux de l’économie des différentes régions, qui tient compte des besoins de chacune en combustible, matériaux de construction, articles courants de l’industrie légère et produits alimentaires, réduit les transports sur de trop grandes distances et autres transferts irrationnels et contribue à mobiliser les ressources locales en matières premières.

Troisièmement, procéder à une répartition régulière de l’industrie à travers le pays de manière à assurer la formation de nouvelles villes et de nouveaux centres industriels dans les régions agricoles autrefois arriérées ; rapprocher l’agriculture de l’industrie. Cela contribue à supprimer la différence essentielle entre la ville et la campagne.

Quatrièmement, faire disparaître l’inégalité économique de fait entre les peuples, assurer un progrès rapide de l’économie des régions habitées par les nationalités autrefois arriérées, donnant ainsi une base matérielle au resserrement de l’amitié et de la collaboration entre les peuples.

La répartition géographique de la production socialiste tient compte, en même temps, des intérêts du renforcement de la capacité de défense de l’État socialiste, ce qui rend nécessaire de développer très rapidement de nombreuses industries dans les régions intérieures les plus reculées du pays.

Depuis l’instauration du pouvoir soviétique, un grand travail a été accompli en U.R.S.S. pour mettre fin à l’inégalité qui régnait dans la répartition de la production, inégalité héritée du capitalisme.

Le fait que l’industrie a été rapprochée des sources de matières premières s’est traduit avant tout par le développement accéléré des régions orientales du pays et l’apparition de nouvelles bases houillères, pétrolières et métallurgiques, de nouveaux centres de constructions mécaniques et d’industrie légère dans l’Oural, en Sibérie occidentale, en Asie centrale et en Kazakhie. Les nouveaux foyers d’industrie sont devenus autant de centres économiques et culturels qui transforment l’aspect de ces régions. La création d’une puissante base industrielle dans l’Est du pays a été une condition essentielle de la victoire de l’Union soviétique dans la grande Guerre nationale.

Pendant la guerre nationale et après la guerre, l’industrie des régions orientales (Volga, Oural, Sibérie, Extrême-Orient, R.S.S. de Kazakhie et républiques soviétiques d’Asie centrale) s’est développée encore plus rapidement.

En 1954, ces régions ont fourni un tiers environ de la production industrielle de l’U.R.S.S., plus de 60 % du pétrole, plus de la moitié de l’acier et des laminés, près de la moitié de la houille et plus de 40 % de l’énergie électrique.

Alors que, de 1940 à 1954, la production industrielle globale de l’U.R.S.S. a été multipliée par 2,8, elle a quadruplé dans les régions orientales.

Les Républiques soviétiques d’Ouzbékie, de Kazakhie, de Kirghizie, de Turkménie et de Tadjikie, qui totalisent moins de 20 millions d’habitants, ont produit, en 1954, plus de 4 fois plus d’énergie électrique que les pays d’Orient voisins de l’U.R.S.S. : Turquie, Iran, Afghanistan et Pakistan pris ensemble, dont la population dépasse 130 millions d’habitants.

Le développement de l’industrie socialiste dans un certain nombre de régions économiques autrefois dépourvues d’industrie a fait que l’ancienne division en régions industrielles et en régions agricoles est, dans ses grandes lignes, devenue caduque. Les transformations profondes intervenues dans la distribution de la production agricole font peu à peu disparaître l’étroite spécialisation qui distinguait l’agriculture avant la Révolution. Une importante base céréalière a été constituée dans les régions orientales de l’U.R.S.S. ; l’agriculture a réalisé une importante avance vers le Nord ; les cultures vivrières se sont développées autour des villes et des centres industriels.

En dépit des résultats obtenus, il existe encore de graves insuffisances dans la répartition géographique de la production socialiste. C’est ainsi qu’à présent encore on construit souvent de nouvelles entreprises dans les anciennes régions industrielles, sans tenir compte de l’approvisionnement de ces entreprises en ressources locales (matières premières et combustible). Par ailleurs, la construction d’entreprises industrielles marque un sérieux retard dans l’Est du pays, notamment en Sibérie, en Extrême-Orient, en Asie centrale et en Kazakhie, où l’on trouve pourtant suffisamment de matières premières et de ressources énergétiques.

L’élimination de ces insuffisances et une meilleure répartition géographique de la production sont l’un des principaux facteurs de l’essor futur de l’économie socialiste.

La répartition socialiste de la production assure l’utilisation la plus efficace des richesses naturelles et de la main-d’œuvre et contribue au relèvement de la productivité du travail social, à l’accélération des rythmes d’accroissement de la production, au renforcement de la puissance économique de l’U.R.S.S.