Manuel d’économie politique de l’Académie des sciences de l’URSS
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27.4. Les voies du progrès technique en régime socialiste.

En régime socialiste, le progrès technique résulte surtout du perfectionnement des moyens de production et des processus technologiques, de la mécanisation et de l’automatisation de la production, de l’électrification de l’économie nationale, d’applications toujours plus étendues de la chimie à la production, de l’utilisation de l’énergie atomique à des fins pacifiques.

La base du progrès technique est le perfectionnement des instruments de production : augmentation du rendement des machines, mesures tendant à rendre leur fonctionnement plus économique et plus sûr, à accroître leur durée de service, à développer l’automatisme de leur conduite, à réduire la quantité du métal et des autres matériaux nécessaires à leur fabrication. Le perfectionnement des instruments de production est étroitement lié à l’amélioration des processus technologiques : méthodes d’usinage et d’utilisation des matières premières et des matériaux, introduction de nouvelles matières premières et de nouveaux matériaux, accroissement des vitesses, des pressions et des températures.

Le socialisme ouvre de vastes possibilités au perfectionnement continu des instruments de production et des processus technologiques. Il est impossible de développer la base matérielle de production du socialisme sans lutter résolument contre la stagnation technique, la routine ; il faut, à cet effet, intégrer dans la production, rapidement et sur une grande échelle, toutes les réalisations de la science et de la technique d’avant-garde de l’U.R.S.S. et des pays étrangers.

Depuis l’instauration du pouvoir soviétique, un large réseau d’instituts de recherche scientifique et de bureaux d’études a été créé, les ouvriers inventeurs se sont multipliés et le mouvement de masse des novateurs de la production a pris un large essor.

Les constructeurs soviétiques résolvent toute une série de problèmes techniques relatifs à la construction de machines et d’appareils nouveaux destinés à toutes les branches de la production. Ils ont créé des engins tels que, par exemple, les haveuses-chargeuses, de nombreuses machines agricoles (des planteuses et arracheuses de pommes de terre, une récolteuse de lin, une arracheuse-décolleteuse-groupeuse de betteraves), de nouveaux modèles d’équipement énergétique, de puissants appareils de construction, de nouveaux types de machines-outils, etc.

Une large utilisation des réalisations de la science et de la technique des pays étrangers constitue un facteur important du progrès technique. Dans un certain nombre de cas, l’outillage fabriqué dans nos entreprises n’atteint pas le niveau des meilleurs modèles étrangers. Les avantages du régime socialiste ouvrent toutes les possibilités à l’accélération du progrès technique, à l’élimination du retard qui existe dans certains secteurs de la production, ce qui doit permettre de dépasser à bref délai les réalisations scientifiques et techniques du monde capitaliste.

Dans le progrès technique en régime socialiste, un rôle immense est assigné à la mécanisation des processus du travail. La mécanisation substitue au travail manuel le travail de la machine. La mécanisation méthodique des différents processus du travail est, en régime socialiste, une nécessité économique. Une augmentation ininterrompue et rapide de la production socialiste ne peut être obtenue que par un perfectionnement constant de la technique et la mécanisation de toutes les opérations.

En U.R.S.S., la mécanisation des principaux processus du travail et des opérations les plus pénibles se poursuit systématiquement dans tous les domaines de l’économie nationale.

La mécanisation a atteint un niveau élevé dans l’industrie de l’U.R.S.S. Dans l’industrie houillère, qui reposait entièrement avant la Révolution sur un travail manuel pénible, l’emploi de haveuses, de moyens de transport électriques et d’appareils de chargement avait permis, dès 1940, de mécaniser le havage et l’abattage à 94,8 %, la desserte à 90,4 %, le herchage à 58,4 %, le chargement du charbon dans les wagons de chemin de fer à 86,5 %. Après la guerre, la mécanisation de toutes ces opérations a été réalisée à 100 %. La mécanisation réalise également de grands progrès dans les autres industries. Ainsi, les chantiers des centrales hydroélectriques mettent en œuvre de remarquables réalisations de la technique soviétique : nouveaux et puissants excavateurs, bulldozers, dragues suceuses-refouleuses, etc. L’excavateur marchant sorti de l’Usine de constructions mécaniques de l’Oural, dont la benne a une contenance de 14 m3, peut remuer plus de 2,5 millions de m3 de terre par an et exécute le travail de 7 000 ouvriers.

En 1954, la presque totalité des labours d’automne et des jachères était mécanisée dans les kolkhoz : les semailles des cultures d’automne l’étaient à 95 %, celles de printemps à 88 %, celles du coton, de la betterave à sucre et d’autres plantes industrielles l’étaient presque entièrement. Plus de 40 % de la superficie cultivée en pommes de terre par les kolkhoz a été plantée par les stations de machines et de tracteurs. 82 % des céréales et 93 % du tournesol ont été récoltés par des machines. La mécanisation des principaux travaux des champs dans les kolkhoz est en voie d’achèvement. C’est déjà chose faite dans les sovkhoz pour l’essentiel des principales opérations agricoles. Toutefois, les résultats obtenus en matière de mécanisation de l’agriculture ne suffisent pas à satisfaire les besoins croissants de la société en produits agricoles. La dépense de travail vivant humain par unité de production dans les sovkhoz et dans les kolkhoz est encore élevée. Il est indispensable de continuer à développer largement la mécanisation des travaux pénibles dans l’élevage, les cultures maraîchères, l’horticulture, le transport, le chargement et le déchargement des produits agricoles, la mécanisation de l’assèchement des terres marécageuses, ainsi que de l’irrigation.

La mécanisation combinée reçoit en régime socialiste un développement de plus en plus considérable. Elle consiste à mécaniser, grâce à un système de machines se complétant mutuellement, toutes les phases de la production liées entre elles, qu’elles soient fondamentales ou auxiliaires. Elle fait disparaître les solutions de continuité dans la mécanisation du travail. On a ainsi un système de machines qui embrasse l’ensemble du processus de production.

À son degré supérieur, la mécanisation devient l’automatisation, ou emploi de machines automatiques fonctionnant par auto-régulation. L’automatisation est étroitement liée à la télémécanique, c’est-à-dire à la commande et au contrôle à distance du fonctionnement des mécanismes (télécommande). Quand un ensemble de machines embrassant toutes les phases de la production fonctionne en se réglant lui-même, on a un système automatique de machines qui s’acquitte de toutes les opérations nécessaires pour transformer la matière première en produit fini sans l’intervention directe de l’homme et ne nécessite qu’un contrôle de la part de ce dernier.

Depuis la fin de la guerre, certains succès ont été obtenus dans diverses branches industrielles de l’U.R.S.S. quant à l’automatisation des processus de production. Dans la sidérurgie soviétique, plus de 90 % de la fonte proviennent de hauts fourneaux où la température de l’air soufflé est réglée automatiquement, et près de 90 % de l’acier Martin sont fondus dans des fours dont le régime thermique est également commandé par des moyens automatiques. L’automatisation des hauts fourneaux et des fours Martin a accru leur rendement de 7 à 10 % et réduit de 6 % la dépense de combustible. Le nombre des machines-outils automatiques et semi-automatiques, des presses à forger et des appareils automatiques de contrôle en usage dans les constructions mécaniques augmente d’une année à l’autre. Les équipements automatiques trouvent toujours plus d’emplois dans les industries chimiques, les papeteries, les raffineries de pétrole, etc. Il existe en U.R.S.S. deux catégories de systèmes automatiques de machines : les lignes automatiques de machines-outils et autres dispositifs et les entreprises entièrement automatisées.

L’extension de la mécanisation du travail en régime socialiste est la base d’une élévation rapide du rendement et contribue à rapprocher de plus en plus le travail manuel du travail intellectuel.

La réorganisation de toutes les branches de l’économie sur la base de la grande production mécanique et la mécanisation toujours plus poussée des différents processus du travail sont étroitement liées à l’électrification, qui constitue au point de vue technique le fondement de la grande production moderne.

Le socialisme assure l’application méthodique de l’électricité dans toutes les branches de l’économie nationale. En régime socialiste, l’électrification est caractérisée : premièrement, par la centralisation de la production de l’énergie électrique et sa concentration dans de grandes stations ; par le développement rapide des lignes de transport d’énergie à haute tension groupant les centrales en de grands systèmes régionaux ou interrégionaux, pour former par la suite un réseau unique ; deuxièmement, par la construction de nombreuses centrales hydroélectriques et l’augmentation constante de leur part dans la production totale de l’énergie électrique, ce qui constitue un des principaux moyens d’accroître les ressources énergétiques du pays ; troisièmement, par le développement du chauffage urbain dans les grandes villes et les centres industriels.

L’électrification transforme jusqu’à l’aspect des fabriques et des usines. Au lieu d’un moteur central pourvu d’un mécanisme de transmission compliqué, la commande par moteurs électriques individuels est installée dans presque toutes les entreprises. L’électrification des machines constitue la base énergétique de la mécanisation combinée et de l’automatisation de la production. L’emploi de l’électricité a donné naissance à des industries nouvelles : électrométallurgie des métaux ferreux et non-ferreux, électrochimie, ainsi qu’à de nouvelles méthodes d’usinage.

On attache une grande importance, pour les progrès ultérieurs de l’électrification en U.R.S.S., à la construction au cours du cinquième quinquennat, sur la Volga, le Dniepr, le Don, la Kama, l’Angara, l’Irtych, l’Obi et sur d’autres cours d’eau, de puissantes centrales hydroélectriques dont certaines seront les plus grandes du monde. Elles permettront, entre autres choses, d’obtenir en grosse quantité de l’énergie à bon marché, d’électrifier sur une vaste échelle l’agriculture et les transports, de créer de nouvelles industries, fortes consommatrices d’électricité, et d’améliorer la navigation.

Les quatre années du cinquième plan quinquennal ont vu entrer en exploitation de puissantes centrales hydroélectriques équipées selon le dernier mot de la technique : celles de Tsimlianskaïa (164 000 kW), de Guioumouch (224 000 kW), du Haut-Svir (160 000 kW), de Minguétchaour (357 000 kW), la première tranche (126 000 kW) de la centrale de la Kama dont la puissance totale sera de 500 000 kW, et plusieurs autres. Pendant cette même période, d’importantes centrales thermiques ont été mises en service : celles de Mironovka (400 000 kW), de Slaviansk (200 000 kW), du sud du Kouzbass (400 000 kW), la première tranche (300 000 kW) de la centrale de Tchérépet, portée aujourd’hui à 600 000 kW, et d’autres encore. De nouvelles centrales hydroélectriques d’une grande puissance (celles de Kouibychev, de Gorki, de Kakhovka et plusieurs autres) ont livré leur premier courant industriel en 1955. La puissance des centrales hydroélectriques en chantier en U.R.S.S. représente environ le triple de la puissance de toutes les centrales hydroélectriques en service dans le pays au début de 1954. Après la guerre, on s’est préoccupé d’appliquer en grand l’électricité à l’agriculture. Au début de 1955, la puissance des centrales électriques rurales avait sextuplé par rapport à 1940 ; près de 40 % des kolkhoz utilisaient l’énergie électrique. Dans de nombreux kolkhoz et sovkhoz, c’est sur l’électricité que repose la mécanisation du battage ainsi que d’un certain nombre d’opérations dans l’élevage (préparation des fourrages, distribution d’eau, traite des vaches, tonte des moutons, etc.)

Le progrès de la technique moderne se traduit également par le prodigieux développement qu’a pris la chimie et par l’emploi des méthodes de traitement chimique de la matière, qui accélèrent la production, permettent une meilleure utilisation des matières premières et la création de nouveaux types de matières premières et de matériaux. L’industrie chimique est devenue en U.R.S.S. un puissant facteur du développement technique de toute l’économie nationale. À l’heure actuelle, les opérations chimiques industrielles sont en général automatisées, se poursuivent sans interruption dans des appareils hermétiquement clos, sont contrôlées et réglées automatiquement, sans l’intervention directe de l’homme. Des applications de la chimie à l’agriculture dépendent dans une grande mesure l’augmentation des rendements agricoles et la création de l’abondance des biens de consommation.

La découverte des méthodes d’obtention et d’utilisation de l’énergie atomique est le sommet de l’étape actuelle du développement de la technique. L’U.R.S.S. est le premier pays qui soit parvenu à utiliser l’énergie atomique à des fins pacifiques. La première centrale électrique industrielle au monde fonctionnant à l’énergie atomique, d’une puissance utile de 5 000 kW, est déjà en service en Union soviétique.