Manuel d’économie politique de l’Académie des sciences de l’URSS
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6.4. Le développement des villes et des centres industriels. La formation de la classe des prolétaires.

L’industrialisation capitaliste a déterminé la croissance rapide des villes et des centres industriels. Au cours du 19e siècle, le nombre des grandes villes d’Europe (avec une population de plus de 100 000 habitants) a été multiplié par 7. La part de la population urbaine s’est constamment accrue aux dépens de la population rurale. En Angleterre, dès le milieu du 19e siècle, et en Allemagne au début du 20e siècle, plus de la moitié de la population se trouvait concentrée dans les villes.

Dans la phase manufacturière du capitalisme, les masses d’ouvriers salariés ne formaient pas encore une classe de prolétaires bien constituée. Les ouvriers des manufactures étaient relativement peu nombreux, liés pour une bonne part à l’agrip. 109culture, disséminés dans une multitude de petits ateliers et divisés par toutes sortes d’intérêts corporatifs étroits.

La révolution industrielle et le développement de l’industrie mécanique donnèrent naissance dans les pays capitalistes au prolétariat industriel. La classe ouvrière, dont les rangs grossissaient sans cesse par l’afflux de paysans et artisans en train de se ruiner, vit ses effectifs se multiplier rapidement. L’essor de la grande industrie mécanique fit disparaître peu à peu les intérêts et les préjugés locaux, corporatifs et de caste, des premières générations d’ouvriers, leurs espoirs utopiques de reconquérir la condition de petit artisan du Moyen âge. Les masses ouvrières se fondaient en une seule classe, le prolétariat. Définissant la formation du prolétariat en tant que classe, Engels écrivait :

ce fut le développement de la production capitaliste, de la moderne industrie, et de l’agriculture en grand qui la perpétua, l’accrût et la transforma en une classe distincte avec des intérêts distincts et une mission historique distincte.

F. Engels, « Le mouvement ouvrier en Amérique », préface à l’édition américaine de 1887 de La situation de la classe laborieuse en Angleterre, publiée en traduction les 16 et 23 juillet 1887 par Le Socialiste. En ligne, www.marxists.org/francais/engels/works/1887/01/fe_18870126.htm.

En Angleterre, le nombre des ouvriers dans l’industrie et les transports dans la seconde décennie du 19e siècle s’élevait à près de 2 millions d’individus ; au cours des cent années suivantes, il a plus que triplé.

En France, il y avait deux millions d’ouvriers dans l’industrie et les transports vers 1860, et au début du 20e siècle leur nombre atteignait environ 3 800 000 hommes.

Aux États-Unis, le nombre des ouvriers dans l’industrie et les transports était de 1 800 000 en 1859 et 6 800 000 en 1899.

En Allemagne, le nombre des ouvriers occupés dans l’industrie et les transports passe de 700 000 en 1848 à 5 millions en 1895.

En Russie, après l’abolition du servage, le processus de formation de la classe ouvrière se développe rapidement. En 1865, les grandes fabriques et usines, l’industrie minière et les chemins de fer occupent 700 000 ouvriers ; en 1890, 1 433 000. En 25 ans, le nombre des ouvriers dans les grandes entreprises capitalistes a donc plus que doublé. Vers 1900, dans les cinquante provinces de la Russie d’Europe, le nombre des ouvriers des grandes fabriques et usines, de l’industrie minière et des chemins de fer s’élève à 2 207 000 et dans toute la Russie, à 2 792 000.