Dominique Meeùs
Dernière modification le
retour
à la table des matières —
à l’index des notions —
au dossier marxisme
À la suite du IIe congrès, la lutte s’était encore aggravée au sein du Parti. Les menchéviks cherchaient par tous les moyens à saboter les décisions du IIe congrès et à s’emparer des centres du Parti. Ils exigeaient que leurs représentants fussent compris dans la rédaction de l’Iskra et au Comité central, dans une proportion qui devait leur donner la majorité à la rédaction et l’égalité avec les bolchéviks au sein du Comité central. Comme ces prétentions allaient à l’encontre des décisions expresses du IIe congrès, les bolchéviks repoussèrent les exigences des menchéviks. Ceux-ci constituèrent alors, à l’insu du Parti, leur organisation fractionnelle hostile au Parti, à la tête de laquelle se trouvèrent Martov, Trotski et Axelrod. Ils « déclenchèrent, ainsi que l’écrivait Martov, un soulèvement contre le léninisme ». Le procédé de lutte qu’ils avaient adopté pour combattre le Parti était : « désorganiser tout le travail du Parti, lui faire du tort, freiner toutes choses, en tout » (expression de Lénine). Ils s’étaient embusqués dans la « Ligue à l’étranger » des social-démocrates russes, dont les neuf dixièmes étaient formés d’intellectuels émigrés, détachés du travail en Russie ; et de là, ils avaient ouvert le feu sur le Parti, sur Lénine, sur les léninistes.
Plékhanov aidait puissamment les menchéviks. Au IIe congrès, il s’était placé aux côtés de Lénine. Mais après le IIe congrès, les menchéviks avaient su l’intimider par des menaces de scission. Plékhanov avait donc décidé de « se réconcilier » coûte que coûte avec eux. Ce qui faisait pencher Plékhanov du côté des menchéviks, c’était le poids de ses anciennes erreurs opportunistes. De conciliateur à l’égard des menchéviks opportunistes, Plékhanov devint bientôt lui-même un menchévik. Il insista pour que fussent compris dans la rédaction de l’Iskra tous les anciens rédacteurs menchéviks repoussés par le congrès. Lénine ne pouvait évidemment pas accepter cette condition ; il se retira de la rédaction de l’Iskra, afin de fortifier ses positions au sein du Comité central du Parti et de là, battre les opportunistes. Plékhanov, au mépris de la volonté du congrès, coopta de son propre chef à la rédaction de l’Iskra les anciens rédacteurs menchéviks. Dès lors, à partir du no 52 de l’Iskra, les menchéviks firent de ce journal p. 51leur organe et s’en servirent pour prêcher leurs conceptions opportunistes.
Désormais on parla dans le Parti de la vielle Iskra, de l’Iskra léniniste, bolchévique, et de la nouvelle Iskra, de l’Iskra menchévique, opportuniste.
Une fois aux mains des menchéviks, l’Iskra devint un organe de lutte contre Lénine, contre les bolchéviks, un organe de propagande de l’opportunisme menchévik, surtout dans le domaine de l’organisation. Alliés aux « économistes » et aux bundistes, les menchéviks de l’Iskra partirent en guerre contre le Léninisme, comme ils disaient ; Plékhanov ne put se maintenir sur ses positions de conciliation ; au bout de quelque temps il se rallia, lui aussi, à cette campagne. Et c’est bien ce qui devait arriver d’après la logique des choses : quiconque insiste pour la conciliation avec les opportunistes, doit glisser à l’opportunisme. De la nouvelle Iskra pleuvaient, comme d’une corne d’abondance, articles et déclarations disant que le Parti ne devait pas être un tout organisé ; qu’il fallait admettre au sein du Parti, l’existence de groupes et individus libres, qui ne seraient pas tenus de se soumettre aux décisions des organes du Parti ; qu’il fallait laisser à chaque intellectuel sympathisant avec le Parti, de même qu’à « chaque gréviste » et à « chaque manifestant », toute latitude pour se proclamer membre du Parti ; qu’exiger la soumission à toutes les décisions du Parti, c’était faire preuve de « formalisme bureaucratique » ; qu’exiger la soumission de la minorité à la majorité, c’était « refouler mécaniquement » la volonté des membres du Parti ; qu’exiger de tous les membres, leaders ou simples adhérents, une égale soumission à la discipline du Parti, — c’était instaurer le « servage » dans le Parti ; que ce qu’il « nous » faut, dans le Parti, ce n’est pas le centralisme, mais l’ « autonomisme » anarchique, qui donne le droit aux adhérents et aux organisations du Parti de ne pas exécuter ses décisions.
C’était là une propagande effrénée du relâchement en matière d’organisation ; c’était ruiner l’esprit du parti et la discipline du parti, exalter l’individualisme de l’intellectuel, justifier l’esprit d’indiscipline anarchique.
Par rapport au IIe congrès, les menchéviks tiraient manifestement le Parti en arrière, vers l’émiettement organique, vers l’esprit du petit cercle, vers les méthodes artisanales de travail.
Il importait d’infliger aux menchéviks une riposte décisive.
p. 52Voici les principes d’organisation essentiels qui furent développés dans cet ouvrage et qui allaient devenir les principes d’organisation du Parti bolchévik.
1o Le Parti marxiste est partie intégrante de la classe ouvrière, il en est un détachement. Mais les détachements sont nombreux dans la classe ouvrière : par conséquent, tout détachement de la classe ouvrière ne saurait être appelé parti de la classe ouvrière. Le Parti se distingue des autres détachements de la classe ouvrière, d’abord parce qu’il n’est pas un détachement ordinaire, mais le détachement d’avant-garde, le détachement conscient, le détachement marxiste de la classe ouvrière, armé de la connaissance de la vie sociale, de la connaissance des lois du développement social, de la connaissance des lois de la lutte de classes et capable pour cette raison de guider la classe ouvrière, de diriger sa lutte. Aussi ne doit-on pas confondre le Parti avec la classe ouvrière, pas plus qu’on ne doit confondre la partie avec le tout ; on ne saurait demander que chaque gréviste puisse se proclamer membre du Parti, car celui qui confond le Parti avec la classe, rabaisse le niveau de conscience du Parti au niveau de « chaque gréviste », détruit le Parti comme avant-garde consciente de la classe ouvrière. La tâche du Parti n’est pas de rabaisser son niveau à celui de « chaque gréviste », mais de hausser les masses d’ouvriers, de hausser « chaque gréviste » au niveau du Parti.
Nous sommes le Parti de la classe, écrivait Lénine, et c’est pourquoi presque toute la classe (et en temps de guerre, à l’époque de la guerre civile, absolument toute la classe) doit agir sous la direction de notre Parti, doit se serrer le plus possible autour de lui. Mais ce serait du manilovisme1 et du « suivisme » que de penser que sous le capitalisme presque toute la classe ou la classe entière sera un jour en état de s’élever au point d’acquérir le degré de conscience et d’activité de son détachement d’avant-garde, de son Parti social-démocrate. Sous le capitalisme, même l’organisation syndicale (plus primitive, plus accessible à la conscience des couches non développées) n’est pas en mesure d’englober presque toute, ou toute la classe ouvrière. Et nul social-démocrate de bon sens n’en a jamais douté. Ce ne serait que se leurrer soi-même, fermer les yeux sur l’immensité de nos tâches, restreindre ces tâches, que d’oublier la différence entre le détachement d’avant-garde et p. 53les masses qui gravitent autour de lui, d’oublier l’obligation constante pour le détachement d’avant-garde d’élever des couches de plus en plus vastes à ce niveau avancé.
2o Le Parti est non seulement l’avant-garde, le détachement conscient de la classe ouvrière, mais aussi le détachement organisé de la classe ouvrière, avec sa propre discipline obligatoire pour ses membres. C’est pourquoi les membres du Parti doivent obligatoirement adhérer à une de ses organisations. Si le Parti n’était pas un détachement organisé de la classe ni un système d’organisation, mais une simple somme d’individus qui se proclament eux-mêmes membres du Parti sans adhérer à aucune de ses organisations, c’est-à-dire ne sont pas organisés et, par conséquent, ne sont pas tenus de se soumettre aux décisions du Parti, — le Parti n’aurait jamais une volonté unique, il ne pourrait jamais réaliser l’unité d’action de ses adhérents ; il lui serait donc impossible de diriger la lutte de la classe ouvrière. Le Parti ne peut diriger pratiquement la lutte de la classe ouvrière et l’orienter vers un but unique que si tous ses membres sont organisés dans un seul détachement commun, cimenté par l’unité de volonté, par l’unité d’action, par l’unité de discipline.
L’objection des menchéviks disant qu’en ce cas, de nombreux intellectuels, par exemple, des professeurs, des étudiants, des lycéens, etc., resteraient en dehors du Parti, puisqu’ils ne veulent pas adhérer à telle ou telle de ses organisations, soit que la discipline du Parti leur pèse, soit que, comme le disait Plékhanov au IIe congrès, ils considèrent « comme une humiliation pour eux d’adhérer à telle ou telle organisation locale », cette objection des menchéviks se retourne contre eux, car le Parti n’a que faire des membres que gêne la discipline du Parti et qui craignent d’adhérer à une de ses organisations. Les ouvriers ne craignent pas la discipline ni l’organisation ; ils adhèrent volontiers aux organisations dès l’instant où ils sont décidés de devenir membres du Parti. Seuls les intellectuels d’esprit individualiste craignent la discipline et l’organisation ; ils resteront effectivement en dehors du parti. Tant mieux, puisque le Parti se débarrassera de l’afflux d’éléments instables, qui s’est particulièrement accentué aujourd’hui que la révolution bourgeoise commence à monter.
Si je dis, écrivait Lénine, que le Parti doit être une somme (non une simple somme arithmétique, mais un complexe) d’organisations […], j’exprime par là, d’une façon absolument claire p. 54et précise que je désire, que je demande que le Parti, comme avant-garde de la classe, soit organisé le plus possible, que le Parti n’admette que des éléments susceptibles d’au moins un minimum d’organisation.
Et plus loin :
En paroles, la formule de Martov défend les intérêts des larges couches du prolétariat ; en fait, cette formule servira les intérêts des intellectuels bourgeois, qui craignent la discipline et l’organisation prolétariennes. Nul n’osera nier que ce qui caractérise, d’une façon générale, les intellectuels en tant que couche particulière dans les sociétés capitalistes contemporaines, c’est justement l’individualisme et l’inaptitude à la discipline et à l’organisation.
Et encore :
… le prolétariat ne craint pas l’organisation ni la discipline ! Le prolétariat n’aura cure que MM. les professeurs et lycéens, qui ne désirent pas adhérer à une organisation, soient reconnus membres du Parti parce qu’ils travaillent sous le contrôle d’une organisation. […] Ce n’est pas le prolétariat, mais certains intellectuels de notre Parti qui manquent d’auto-éducation quant à l’organisation et à la discipline, […].
3o Parmi toutes les autres organisations de la classe ouvrière, le Parti n’est pas simplement un détachement organisé, il est la « forme suprême d’organisation », appelée à diriger toutes les autres. Le Parti, en tant que forme suprême d’organisation qui groupe l’élite de la classe, armée d’une théorie avancée, de la connaissance des lois de la lutte des classes et de l’expérience du mouvement révolutionnaire, a toutes les possibilités de diriger — il a le devoir de diriger — toutes les autres organisations de la classe ouvrière. La tendance des menchéviks à diminuer, à ravaler le rôle dirigeant du Parti conduit à affaiblir toutes les autres organisations du prolétariat dirigées par le Parti et, par conséquent, à affaiblir et à désarmer le prolétariat ; car « le prolétariat n’a pas d’autre arme dans sa lutte pour le pouvoir que l’organisation ». (Ibidem, « r) Quelques mots sur la dialectique. Deux révolutions », p. 434.)
4o Le Parti incarne la liaison de l’avant-garde de la classe ouvrière avec les masses innombrables de cette classe. Le Parti serait le meilleur détachement avancé et le plus parfaitement organisé, qu’il ne pourrait pas vivre et se développer sans être lié p. 55aux masses de sans-parti, sans que ces liaisons se multiplient, sans qu’elles soient consolidées. Un parti replié sur lui-même, isolé des masses et qui aurait perdu ou simplement relâché les liens avec sa classe, perdrait la confiance et l’appui des masses ; par conséquent, il devrait inévitablement périr. Pour vivre à pleine vie et se développer, le Parti doit multiplier ses liaisons avec les masses, gagner la confiance des masses innombrables de sa classe.
Pour être un Parti social-démocrate, disait Lénine, il faut obtenir le soutien justement de la classe.
5o Le Parti, pour pouvoir bien fonctionner et guider méthodiquement les masses, doit être organisé conformément aux principes du centralisme, avoir un statut unique, une discipline unique, un organisme dirigeant unique représenté par le congrès du Parti et, dans l’intervalle des congrès, par le Comité central du Parti ; il faut que la minorité se soumette à la majorité et les différentes organisations au centre, les organisations inférieures aux organisations supérieures. Sans ces conditions, le Parti de la classe ouvrière ne saurait être un parti véritable ; il ne saurait s’acquitter de sa tâche, qui est de guider la classe.
Naturellement, comme le Parti était illégal sous l’autocratie tsariste, les organisations du Parti ne pouvaient, à l’époque, reposer sur le principe de l’élection à la base ; aussi le Parti devait-il être rigoureusement clandestin. Mais Lénine estimait que cet état de choses, momentané dans la vie de notre Parti, disparaîtrait dès que le tsarisme aurait été supprimé, lorsque le Parti serait un Parti déclaré, légal, et que ses organisations reposeraient sur le principe d’élections démocratiques, sur le principe du centralisme démocratique.
… auparavant, écrivait Lénine, notre Parti n’était pas un tout formellement organisé, mais seulement une somme de groupes particuliers, ce qui fait qu’entre ces groupes il ne pouvait y avoir d’autres rapports que l’action idéologique. Maintenant nous sommes devenus un parti organisé ; et cela signifie la création d’un pouvoir, la transformation de l’autorité des idées en autorité du pouvoir, la subordination des instances inférieures aux instances supérieures du Parti.
Attaquant les menchéviks pour leur nihilisme en matière d’organisation et leur anarchisme de grand seigneur, qui n’admet pas p. 56l’idée d’une soumission à l’autorité du Parti et à sa discipline, Lénine écrivait :
Cet anarchisme de grand seigneur est particulièrement propre au nihiliste russe. L’organisation du Parti lui semble une monstrueuse « fabrique » ; la soumission de la partie au tout et de la minorité à la majorité lui apparaît comme un « asservissement » […] ; la division du travail sous la direction d’un organisme central lui fait pousser des clameurs tragi-comiques contre la transformation des hommes en « rouages et ressorts » (et il voit une forme particulièrement intolérable de cette transformation dans la transformation des rédacteurs en collaborateurs) ; le seul rappel des statuts d’organisation du Parti provoque chez lui une grimace de mépris et la remarque dédaigneuse (à l’adresse des « formalistes ») que l’on pourrait se passer entièrement de statuts.
6o Le Parti dans son activité pratique, s’il tient à sauvegarder l’unité de ses rangs, doit appliquer une discipline prolétarienne unique, également obligatoire pour tous les membres du Parti, pour les leaders comme pour les simples membres. C’est pourquoi il ne doit pas y avoir dans le Parti de division en « membres de l’élite », pour qui la discipline n’est pas obligatoire, et « non-membres de l’élite », qui sont tenus de se soumettre à la discipline. Sans cette condition, ni l’intégrité du Parti ni l’unité de ses rangs ne sauraient être sauvegardées.
L’absence totale, écrivait Lénine, d’arguments raisonnables contre la rédaction, désignée par le congrès, est illustrée au mieux, chez Martov et consorts, par ce petit mot qui leur appartient : « Nous ne sommes pas des serfs ! » […] La mentalité de l’intellectuel bourgeois qui se range parmi les « âmes d’élite » placées au-dessus de l’organisation de masse et de la discipline de masse, apparaît ici avec un relief remarquable. […]
Toute organisation et toute discipline prolétariennes semblent être du servage à l’individualisme de la gent intellectuelle, […].
Et plus loin :
Mais à mesure que se forme chez nous un véritable parti, l’ouvrier conscient doit apprendre à distinguer entre la psychologie du combattant de l’armée prolétarienne et celle de l’intellectuel bourgeois, qui fait parade de la p. 57phrase anarchiste ; il doit apprendre à exiger l’exécution des obligations incombant aux membres du Parti — non seulement des simples adhérents, mais aussi des « gens d’en haut ». ;…
En résumant l’analyse des divergences et en définissant la position des menchéviks comme de « l’opportunisme dans les questions d’organisation », Lénine considérait que l’un des péchés essentiels du menchévisme était de sous-estimer l’importance essentielle de l’organisation du Parti, en tant qu’arme du prolétariat dans sa lutte pour son affranchissement. Les menchéviks étaient d’avis que le Parti, organisation du prolétariat, n’avait pas une importance sérieuse pour la victoire de la révolution. Contrairement aux menchéviks, Lénine pensait que l’union idéologique du prolétariat à elle seule ne suffit pas pour assurer la victoire ; que pour vaincre, il est indispensable de « cimenter » l’unité idéologique par l’unité matérielle de l’organisation du prolétariat. Lénine estimait qu’à cette condition seule, le prolétariat peut devenir une force invincible.
Le prolétariat, écrivait Lénine, n’a pas d’autre arme dans sa lutte pour le pouvoir que l’organisation. Divisé par la concurrence anarchique qui règne dans le monde bourgeois, accablé sous un labeur servile pour le capital, rejeté constamment « dans les bas-fonds » de la misère noire, d’une sauvage inculture et de la dégénérescence, le prolétariat peut devenir — et deviendra inévitablement — une force invincible pour cette seule raison que son union idéologique basée sur les principes du marxisme est cimentée par l’unité matérielle de l’organisation qui groupe les millions de travailleurs en une armée de la classe ouvrière. À cette armée ne pourront résister ni le pouvoir décrépit de l’autocratie russe ni le pouvoir en décrépitude du capital international.
C’est par ces mots prophétiques que Lénine termine son livre. Tels sont les principes d’organisation essentiels développés par Lénine dans son célèbre ouvrage Un pas en avant, deux pas en arrière.
Ce qui fait l’importance de ce livre, c’est avant tout qu’il a sauvegardé l’esprit du parti contre l’esprit de cercle étroit et le Parti contre les désorganisateurs ; il a battu à plate couture l’opportunisme menchévik dans les problèmes d’organisation et jeté les bases d’organisation du Parti bolchévik.
p. 58Mais son importance ne s’arrête pas là. Son rôle historique, c’est que Lénine y a le premier, dans l’histoire du marxisme, élaboré la doctrine du Parti en tant qu’organisation dirigeante du prolétariat, en tant qu’arme essentielle entre les mains du prolétariat, sans laquelle il est impossible de vaincre dans la lutte pour la dictature prolétarienne.
La diffusion de l’ouvrage de Lénine Un pas en avant, deux pas en arrière parmi les militants du Parti fit que la plupart des organisations locales se groupèrent autour de Lénine.
Mais plus les organisations se groupaient étroitement autour des bolchéviks, plus haineuse devint l’attitude des leaders menchéviks.
En été 1904, avec l’aide de Plékhanov et par suite de la trahison de deux bolchéviks dégénérés, Krassine et Noskov, les menchéviks s’emparèrent de la majorité dans le Comité central. Il était évident que les menchéviks s’orientaient vers la scission. La perte de l’Iskra et du Comité central plaça les bolchéviks dans une situation difficile. Il était indispensable de mettre sur pied un journal bolchévik à soi. Il fallait organiser un nouveau congrès, le IIIe congrès du Parti, pour former un nouveau Comité central du Parti et régler leur compte aux menchéviks.
C’est ce qu’entreprit Lénine, c’est ce qu’entreprirent les bolchéviks.
Les bolchéviks engagèrent la lutte pour la convocation du IIIe congrès du Parti. En août 1904 se tint en Suisse, sous la direction de Lénine, une conférence de 22 bolchéviks. Elle adopta un message « Au Parti », qui devint pour les bolchéviks un programme de lutte pour la convocation du IIIe congrès.
Au cours de trois conférences régionales des bolchéviks (conférences du Sud, du Caucase et du Nord), un Bureau des comités de la majorité fut élu, qui procéda à la préparation pratique du IIIe congrès du Parti.
Le 4 janvier 1905 paraissait le premier numéro du journal bolchévik Vpériod [En avant].
C’est ainsi que se formèrent au sein du Parti deux fractions distinctes — bolchévique et menchévique — avec leurs centres et leurs organes de presse respectifs.