Dominique Meeùs
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Scénario et matériaux pour le cours à Fleurier 2011
Commencer par une présentation du professeur et des participants
Marx et Engels, le Manifeste du parti communiste.
Un spectre hante l’Europe : le spectre du communisme. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont unies en une Sainte-Alliance pour traquer ce spectre : le pape et le tsar, Metternich et Guizot, les radicaux de France et les policiers d’Allemagne.
Dans toutes les sociétés, sauf les plus primitives, il y a ceux qui travaillent et ceux qui profitent du travail des autres, c’est la division de la société en classes, différentes ou même souvent opposées par leurs intérêts.
L’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de luttes de classes.
Homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maître de jurande et compagnon, en un mot oppresseurs et opprimés, en opposition constante, ont mené une guerre ininterrompue, tantôt ouverte, tantôt dissimulée, une guerre qui finissait toujours soit par une transformation révolutionnaire de la société tout entière, soit par la destruction des deux classes en lutte.
Dans les premières époques historiques, nous constatons presque partout une organisation complète de la société en classes distinctes, une échelle graduée de conditions sociales. Dans la Rome antique, nous trouvons des patriciens, des chevaliers, des plébéiens, des esclaves ; au moyen âge, des seigneurs, des vassaux, des maîtres de corporation, des compagnons, des serfs et, de plus, dans chacune de ces classes, une hiérarchie particulière.
La société bourgeoise moderne, élevée sur les ruines de la société féodale, n’a pas aboli les antagonismes de classes. Elle n’a fait que substituer de nouvelles classes, de nouvelles conditions d’oppression, de nouvelles formes de lutte à celles d’autrefois. (Manifeste I.)
Depuis qu’il y a des classes, il n’y a jamais eu d’époque où la société ait pu se passer d’une classe de travailleurs. Le nom, le statut social de cette classe a changé ; le serf a remplacé l’esclave, pour être à son tour relevé par le travailleur libre — libre de la servitude, mais libre aussi de toutes possessions terrestres en dehors de sa propre force de travail. Mais c’est clair : quels que soient les changements des couches supérieures, non productives de la société, aucune société ne pouvait vivre sans une classe de producteurs. Ainsi, cette classe est indispensable en toutes circonstances — encore que le temps doit venir où ce ne sera plus une classe, lorsque cela comprendra toute la société. (Engels, « Social Classes — Necessary and Superfluous », The Labour Standard, no 14, 6 août 1881.)
Vie privée : « mettre de côté » ; société : on pourrait dire reproduction simple (travailler pour continuer à vivre comme on est habitué à le faire, sans plus) et reproduction élargie (reproduction simple + surplus). Nouveaux outils, routes, canaux, pyramides d’Égypte, Notre-Dame de Paris.
Là-dedans apparaissent deux choses :
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/ecopolSegal01.html#chap01par4contra
Dans la différenciation sociale il y a principalement la différence entre ceux qui travaillent et ceux qui vivent du travail des autres. Il serait plus juste de concevoir le surplus par rapport au seul peuple travailleur. Le peuple travailleur consacre un certain temps à la reproduction simple de ses moyens d’existence (y compris des jeunes et des vieux des familles des travailleurs). Le reste du temps, il entretient les notables qui ne travaillent pas et il crée des monuments durables et les bases du développement futur. Longtemps, cette composante de développement est très réduite et le développement est très lent. Cependant, il y a toujours eu un surplus (même au-delà de la consommation des parasites sociaux), puisque nous sommes là pour le dire dans les conditions d’aujourd’hui, plus à l’âge de la pierre. Les sociétés changent ; c’est une conception dialectique de l’histoire.
Exemples variés. Pharaons et leur administration (seigneurs locaux ? indépendants ?). Propriétaires de terre et d’esclaves en Grèce et commerce international. Commerce international des Phéniciens.
Moyen âge européen, seigneurs ou monastères face aux paysans. Grands commerçants accapareurs face aux métiers (Gand).
Dans le changement de société apparaissent de nouvelles classes et de nouvelles oppositions et luttes de classe. Ces oppositions d’intérêt sont économiques ; c’est une conception matérialiste de l’histoire (que l’on appelle matérialisme historique) : c’est la situation des gens qui détermine pour l’essentiel leur vision du monde et pas l’inverse.
Marx, « Ce n’est pas la conscience… » C’est reprendre l’effort de Hegel (contre « la bousculade informe des événements »), encore idéaliste, et le mener plus loin, d’un point de vue matérialiste.
Le capitalisme apparaît et se développe dans l’ancien régime. Un certain développement capitaliste de l’agriculture chasse des paysans qui deviennent ainsi prolétaires. Révolutions bourgeoises.
Cependant, le caractère distinctif de notre époque, de l’époque de la bourgeoisie, est d’avoir simplifié les antagonismes de classes. La société se divise de plus en deux vastes camps ennemis, en deux grandes classes diamétralement opposées : la bourgeoisie et le prolétariat.
Des serfs du moyen âge naquirent les bourgeois des premières agglomérations urbaines ; de cette population municipale sortirent les premiers éléments de la bourgeoisie.
La découverte de l’Amérique, la circumnavigation de l’Afrique offrirent à la bourgeoisie naissante un nouveau champ d’action. Les marchés des Indes Orientales et de la Chine, la colonisation de l’Amérique, le commerce colonial, la multiplication des moyens d’échange et, en général, des marchandises donnèrent un essor jusqu’alors inconnu au négoce, à la navigation, à l’industrie et assurèrent, en conséquence, un développement rapide à l’élément révolutionnaire de la société féodale en dissolution.
L’ancien mode d’exploitation féodal ou corporatif de l’industrie ne suffisait plus aux besoins qui croissaient sans cesse à mesure que s’ouvraient de nouveaux marchés. La manufacture prit sa place. La moyenne bourgeoisie industrielle supplanta les maîtres de jurande ; la division du travail entre les différentes corporations céda la place à la division du travail au sein de l’atelier même.
Mais les marchés s’agrandissaient sans cesse : la demande croissait toujours. La manufacture, à son tour, devint insuffisante. Alors, la vapeur et la machine révolutionnèrent la production industrielle. La grande industrie moderne supplanta la manufacture ; la moyenne bourgeoisie industrielle céda la place aux millionnaires de l’industrie, aux chefs de véritables armées industrielles, aux bourgeois modernes.
La grande industrie a créé le marché mondial, préparé par la découverte de l’Amérique. Le marché mondial accéléra prodigieusement le développement du commerce, de la navigation, des voies de communication. Ce développement réagit à son tour sur l’extension de l’industrie ; et, au fur et a mesure que l’industrie, le commerce, la navigation, les chemins de fer se développaient, la bourgeoisie grandissait, décuplant ses capitaux et refoulant à l’arrière-plan les classes léguées par le moyen âge.
La bourgeoisie, nous le voyons, est elle-même le produit d’un long développement, d’une série de révolutions dans le mode de production et les moyens de communication.
A chaque étape de l’évolution que parcourait la bourgeoisie correspondait pour elle un progrès politique. Classe opprimée par le despotisme féodal, association armée s’administrant elle-même dans la commune, ici, république urbaine indépendante ; là, tiers état taillable et corvéable de la monarchie, puis, durant la période manufacturière. contrepoids de la noblesse dans la monarchie féodale ou absolue, pierre angulaire des grandes monarchies, la bourgeoisie, depuis l’établissement de la grande industrie et du marché mondial, s’est finalement emparée de la souveraineté politique exclusive dans l’Etat représentatif moderne. Le gouvernement moderne n’est qu’un comité qui gère les affaires communes de la classe bourgeoise tout entière. (Manifeste I.)
Le capitalisme se distingue des autres systèmes d’extorsion du surplus. Souvent les classes dominantes dans l’histoire ont parasitaires (seigneurs féodaux) ou en marge de la production (commerçants). En prenant la production en mains et en réinvestissant dans la production, les capitalistes ont lancé le monde dans un développement accéléré, sans commune mesure avec les milliers d’années de développement très lent qui avaient précédé :
La bourgeoisie, au cours de sa domination de classe à peine séculaire, a créé des forces productives plus nombreuses et plus colossales que l’avaient fait toutes les générations passées prises ensemble. La domestication des forces de la nature, les machines, l’application de la chimie à l’industrie et à l’agriculture, la navigation à vapeur, les chemins de fer, les télégraphes électriques, le défrichement de continents entiers, la régularisation des fleuves, des populations entières jaillies du sol — quel siècle antérieur aurait soupçonné que de pareilles forces productives dorment au sein du travail social ? (Manifeste I.)
En physique et en chimie, on peut isoler un phénomène au labo pour l’étudier. Dans l’étude de la société, Marx utilise l’abstraction pour aller au cœur des choses. Pour avancer dans le matérialisme historique, on doit s’armer de certains concepts : forces productives, moyens de production, rapports de production, mode de production, base/superstructure, formation sociale, État…
La production demande non seulement du travail mais aussi des matières premières et des équipements (« c’est grâce à notre capital, l’argent que nous avons investi dans l’achat de ces moyens de production », diront les capitalistes). Pour les matières premières, on part bien sûr de ressources naturelles.
Pour parler de tout cela, il faut utiliser les mêmes mots, sinon on ne sait pas de quoi on parle. Nous allons nous en tenir à l’usage établi par Marx (sur base de l’économie politique classique) et les marxistes.
C’est la production. Procès, chez Marx, correspond plutôt à processus dans la langue d’aujourd’hui.
Activité de l’homme, énergie humaine dépensée dans le processus.
Ce que l’on transforme dans le procès de production.
Matière brute (ressource naturelle) | ||
Matière première | principale | |
auxiliaire | incorporée au produit (teinture) | |
consommée par l’instrument (lubrifiant, force motrice) | ||
consommée en marge du procès de travail (éclairage, chauffage) |
Ce qui sort du procès de production. Bien de consommation ou matière première pour un autre processus.
Dans le procès de travail, du travail agit sur l’objet du travail avec des moyens de travail pour donner un produit. Mais ces moyens de production, objet de travail (sauf les ressources naturelles) et moyens de travail, étaient eux-mêmes des produits de procès de travail antérieurs. Donc, en définitive, le produit peut-être entièrement ramené à du travail (et des ressources naturelles).
Moyens (bâtiment, outils, machines, matières) | Travail | ||||||
|
Travail | ||||||
|
Travail | ||||||
|
Travail |
L’argent que le capitaliste se vante d’avoir amené (sous forme de moyens de production) comme élément indispensable du procès de travail, eh bien, ce n’est encore que du travail, seulement, c’est du travail passé. Ces moyens, c’est bien le capitaliste qui les apporte grâce à son argent (on verra d’où il vient) mais ce n’est pas l’argent qui les a produits, c’est du travail (à partir des ressources que nous donne la nature).
Sans le travail passé, pas de moyen de production. Sans le travail présent, les moyens de production, ce n’est qu’un tas de ferraille qui ne sert à rien. Supposez un monde où tous les moyens de production seraient détruits. Il ne resterait qu’à tout recommencer à zéro avec le travail. Supposez un monde où tous les hommes et les femmes seraient détruits. Ne comptez pas sur les moyens de production, même les robots, pour continuer à produire tout seuls ! C’est le travail présent qui fait revivre le travail passé.
Il ne faut pas oublier que les ressources naturelles sont rarement utilisables sans travail. Le bois, il faut le couper. Le coton, il faut le cultiver et le récolter, puis le transformer. Le charbon, il faut aller le chercher sous terre. L’oxygène de l’air est un des rares exemples de ressource naturelle qui peut (parfois) servir telle quelle.
L’argent, ça rapporte, si on le place à intérêt, si on joue en bourse (et si on ne perd pas). Mais l’argent n’est intéressant que si on peut l’échanger contre des biens, lesquels sont le fruit du travail à partir de ressources naturelles. Ainsi toute richesse n’est, en dernière analyse, que ressources naturelles et travail.
Une usine d’automobiles se trouve dans un bâtiment fait de briques et de béton avec des poutrelles d’acier et des fenêtres en verre. On y trouve des machines, essentiellement en acier ; des kilomètres de fils électriques en cuivre isolés par des matières plastiques ; des tuyaux en cuivre, en fer ou en plastique… On produit les voitures à partir de tôle d’acier et autres produits semi-finis (par exemple les sièges fabriqués chez des sous-traitants, du matériel électrique et cetera). Les briques viennent de briqueteries qui se sont procuré de l’argile. Les poutrelles viennent de laminoirs qui ont acheté l’acier à des usines sidérurgiques qui, elles-mêmes, avaient acheté le minerai de fer et le charbon à des sociétés minières. Le tissu des sièges est fait de fibres textiles en partie naturelles, venant de l’agriculture, en partie artificielles, venant de l’industrie chimique qui utilise le pétrole comme matière première. Beaucoup de ces choses ont été transportées en camion. (Donc pour construire les camions et les autos d’aujourd’hui, on a aussi besoin des camions d’hier. L’industrie automobile est cliente d’elle-même.)
On voit donc que dans tout produit, il y a non seulement du travail présent et du travail passé, mais aussi du travail passé de nombreux secteurs de la société. Si vous prenez une auto, une seule, elle a été faite par certains ouvriers d’une certaine usine. Supposons, pour fixer les idées, qu’il y avait 3 000 ouvriers. Tous n’ont pas travaillé à cette voiture-là particulièrement. Peut-être qu’il n’y en a que dix, ou quelques dizaines qui y ont touché. Mais pensez à tout ce que cette auto contient d’acier, d’aluminium, de caoutchouc, de plastique, de textile, de peinture, de pièces diverses, électriques entre autres, qui ont été produites par toutes sortes de gens à partir d’autres matières premières, plus les équipements, tout cela à dû être transporté, dans le transport, on a consommé du pétrole, on a dû construire des routes. Finalement, combien de gens ont travaillé à cette seule voiture ? Je n’en sais rien. On avait d’abord pensé quelques dizaines. Maintenant, si vous me dites cent mille, je crains que ce ne soit finalement trop peu. Si quelqu’un m’assure que c’est cent millions ou plus, je ne serais pas étonné. (En fait, la question n’a peut-être pas de réponse.)
C’est typique du capitalisme. Au moyen âge, un outil de fabrication artisanale était peut-être le fruit du travail de quelques dizaines de personnes d’une région pas tellement étendue (on aurait peut-être pu écrire leurs noms), et par conséquent aussi la production agricole faite avec de tels outils.
C’est le caractère social de la production capitaliste. Ce caractère social s’étend en nombre (par exemple : cent millions de personnes pour une seule auto), dans le temps (ces travailleurs n’ont pas tous travaillé en même temps, il faut compter du travail passé) et dans l’espace (ils viennent de la terre entière). Si on ne voit pas cela, si on n’a pas cela constamment présent à l’esprit, on ne peut rien comprendre au capitalisme et, en particulier, on ne peut pas comprendre une des raisons pour lesquelles il ne peut et ne pourra jamais fonctionner correctement et pourquoi on peut et on doit le remplacer par le socialisme.
La division de la production en différentes branches ou secteurs (Marx : « la séparation de la production sociale en ses grandes branches » et quelques lignes plus bas « la division du travail dans la société »). La séparation de la ville et de la campagne est de cet ordre. La séparation est marquée, et le lien maintenu, par l’échange de marchandises entre ces secteurs.
En considérant le schéma avec les flèches qui conduisent à l’automobile, on peut comprendre qu’il faut un équilibre entre la fabrication de moyens de production et la fabrication de moyens de consommation. Pour produire des biens de consommation (ce que Marx appelle la section II de la production sociale) et pour produire des moyens de production, il faut des moyens de production (ce que Marx appelle la section I de la production sociale). Tous les acteurs (capitalistes et travailleurs) des sections I et II ont besoin des produits de la section II pour vivre.
La décomposition du procès de travail en opérations différentes. Au début du capitalisme, des travailleurs sont réunis dans l’atelier pour faire tous des produits complets comme ils auraient pu les faire indépendamment. C’est la coopération capitaliste simple. Ensuite, les capitalistes ont divisé le travail en différentes opérations confiées à des travailleurs différents. C’est la réunion de leurs travaux qui mène à des produits achevés. On parle alors de manufacture . La manufacture crée les conditions du machinisme. Celui-ci augmente à la fois la productivité et l’intensité du travail.
La division de la production sociale que nous avons définie ci-dessus était aussi une division technique. Ce que nous appelons ici division technique du travail n’est à première vue qu’une division technique plus fine que celle entre branches d’industrie. Il y a cependant une différence fondamentale : les branches de la production sociale s’échangent des marchandises tandis que les opérations partielles différentes du procès de production ne produisent ni ne s’échangent de marchandises. « Ce n’est que leur produit collectif qui devient marchandise. »
Une division technique peut devenir une division de la production sociale : la chimie a commencé comme une opération liée au traitement des tissus dans l’industrie textile (teinture…) ; elle est ensuite devenue une industrie à part.
La répartition des activités (économiques, idéologiques ou politiques) entre diverses catégories sociales et premièrement la séparation entre travail manuel et travail intellectuel. Ne pas confondre avec « division de la production sociale ».
Position des agents de la production entre eux et par rapport à l’objet, aux moyens, dans l’organisation du processus. Dans le travail, différentes personnes font différentes choses.
Rapports entre les agents de la production en fonction de leur disposition (propriété ou autre) des moyens de production.
Dans le capitalisme, les capitalistes ont la propriété des moyens de production ce qui leur permet de dominer et d’exploiter les prolétaires. Les capitalistes et les prolétaires sont donc dans un rapport antagonique. C’est une propriété individuelle, les capitalistes sont donc en concurrence l’un par rapport à l’autre. (Ils recherchent le profit maximum et de toute manière ils n’ont pas le choix : sinon ils sont coulés par la concurrence.)
C’est l’union de la force de travail et des moyens de production, y compris l’organisation de la production : les qualités et l’éducation des travailleurs, l’efficacité accrue résultant de la division du travail, les économies d’échelle par la centralisation, le progrès des techniques… font partie des forces productives.
Valeur temps de travail2, voir le tableau de l’échange.
Sur le marché, les producteurs échangent des valeurs égales. Dans une société marchande, la valeur commande toutes les relations économiques et en particulier détermine ce qui sera produit (affectation des forces productives)3.
Ce n’est pas une loi fondamentale, c’est une des manifestations de la loi de la valeur. Cela joue au niveau des prix et pas de la valeur. Si l’offre est excessive ou insuffisante par rapport à la valeur, le prix descend ou monte par rapport au prix qui correspond à la valeur. L’offre est alors corrigée (parce que cette production rapporte moins ou plus) ce qui tend à rapprocher le prix de celui qui correspond à la valeur (jusqu’à une nouvelle inadéquation de l’offre).
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap04sect02.html
et https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap04sect03.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/ecopolSegal02.html#chap02par1
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/valeur.html#valeur
– Mon cours de philosophie marxiste, à propos de l’abstraction, https://d-meeus.be/marxisme/philo/cours3.html#valeur
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap04sect07.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/ecopolSegal02.html#chap02par4loi
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/monnaie.html#Loi
Partir du tableau du caractère social et interconnecté de la production. On pourrait ajouter en paroles en amont les routes, les canaux, les ports… en aval le téléphone mobile (chose que je peux sortir de ma poche plus facilement que ma voiture). Passer au tableau comparant la valeur de la journée de travail et la valeur de la force de travail4. C’est la forme capitaliste du surplus. Les « bons comptes font les bons amis », c’est un contrat, à ce stade et dans l’esprit de l’ordre capitaliste, dans le droit bourgeois, ce n’est pas du vol. (Contrairement au passé, dans ce système plus efficace, le surplus devient très important, potentiellement illimité sauf les contradictions.)
Distinguer l’exploitation (surtravail) — qui résulte de la différence entre la valeur de la force de travail et la valeur ajoutée dans le travail — du vol que consiste le paiement d’un salaire inférieur à ce qui correspond à la valeur de la force de travail. Cependant, ces choses se situent à des niveaux d’abstraction différents et ne peuvent pas être calculées. En outre elles ne sont pas accessibles aux acteurs. Dans la pratique, le vol sur les salaires apparaît comme une aggravation de l’exploitation et toute exploitation apparaît comme un vol, tant du surtravail que du salaire non payé.
Cette assimilation est visible dans les phrases : « Ainsi, on obtient une région avec un très grand fossé entre ce que la population produit en richesse et ce qu’elle reçoit en retour et on crée ainsi un très haut degré d’exploitation. Il y a l’un qui se crève au travail pour tout juste survivre alors que l’autre baigne dans l’opulence. » (Peter Mertens, « Le volcan n’a pas encore fait éruption, mais il se réveille », Solidaire no 9[1824] du 3 mars 2011, en ligne http://www.ptb.be/nieuws/artikel/peter-mertens-le-volcan-na-pas-encore-fait-eruption-mais-il-se-reveille.html.)
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap07sect04.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/ecopolSegal04.html#chap04par2
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/plusvalue.html#Production
Le moteur de l’économie n’est pas le bien public (fournir à l’humanité ce dont elle a besoin pour survivre), mais la recherche du plus grand profit. La loi fondamentale du capitalisme, c’est la production de plus-value5 et, en raison de la concurrence, il n’est pas permis de se contenter d’un profit « raisonnable », modéré.
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap07sect04.html
Dans toute société, il y a une classe dominante qui profite des autres, mais pas toujours de la même manière. Le mode de production qui caractérise la société d’aujourd’hui, c’est le capitalisme, qui a sa manière spécifique d’exploiter le travail du prolétariat : la plus-value.
Les capitalistes ont besoin des prolétaires, mais ceux-ci peuvent se passer définitivement des capitalistes. Le socialisme, c’est donc la fin de l’exploitation, mais c’est aussi la fin des contradictions internes du capitalisme, de la crise, une toute autre manière de fonctionner qui offre de grandes possibilités nouvelles.
Les antagonismes de classes une fois disparus dans le cours du développement, toute la production étant concentrée dans les mains des individus associés, alors le pouvoir public perd son caractère politique. Le pouvoir politique, à proprement parler, est le pouvoir organisé d’une classe pour l’oppression d’une autre. Si le prolétariat, dans sa lutte contre la bourgeoisie, se constitue forcément en classe, s’il s’érige par une révolution en classe dominante et, comme classe dominante, détruit par la violence l’ancien régime de production, il détruit, en même temps que ce régime de production, les conditions de l’antagonisme des classes, il détruit les classes en général et, par là même, sa propre domination comme classe.
À la place de l’ancienne société bourgeoise, avec ses classes et ses antagonismes de classes, surgit une association où le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous. (Manifeste II.)
Autre dimension de la concurrence, anarchie. Encore le tableau du caractère social, capacités excédentaires dans l’industrie automobile, destructions d’outils dans la sidérurgie (exemple de Charleroi dans la référence ci-dessous au cours d’économie). Contradiction entre le caractère social de la production et le caractère privé de la propriété et de la décision6.
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap16sect04.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/ecopolSegal01.html#chap01par4contra
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/ecopolSegal04.html#chap04par1
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/contrad.html#Anarchie
Crise de surproduction7. Diminution de la part des salaires dans les revenus de la société. Trop de capitaux, placements financiers, bulles, krach…
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap17sect01.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/ecopolSegal10.html#chap10par1
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/contrad.html#surproduction
S’il y a contradiction entre le caractère social de la production et le caractère privé de la propriété et de la décision, il n’y a pas dix solutions : la propriété aussi doit devenir collective. Cette réponse aux contradictions du capitalisme, s’appelle communisme. (On appelle socialisme la phase de transition, quand, ayant pris le pouvoir, le prolétariat édifie la société nouvelle qui tend au communisme.)
C’est comme une généralisation du service public et de l’entreprise publique. À l’intérieur d’une entreprise, il n’y a pas d’anarchie et de blocage pour cause de caractère insolvable de la demande. Les différentes étapes du processus de production ne doivent pas s’acheter et se vendre. C’est la même chose dans une grande entreprise complexe intégrée verticalement (long processus à l’intérieur de la même entreprise). Si toute l’économie est une seule immense entreprise polyvalente de propriété publique, on échappe aux contradictions du capitalisme (et on a besoin d’ingénieurs, de managers, etc., mais plus de capitalistes).
Ce que je veux dire ici par service public, ce n’est pas du capitalisme d’État. De toute manière, service public, c’est une image pour introduire la notion. Sous le capitalisme, l’État est l’organe du pouvoir de la bourgeoisie. Le communisme, c’est une société où l’appareil de production est la propriété collective des travailleurs. Comme tout le monde travaille, il n’y a plus qu’une seule classe, donc plus de division de classe. On ne travaille plus pour un patron, on travaille, collectivement, pour soi-même. Il n’y a donc plus vraiment d’État au sens habituel, il n’y a plus qu’une administration de l’économie.
Si l’appareil de production est suffisamment efficace, le travail est assez léger pour n’être plus une grande contrainte et il n’est plus nécessaire de rationner la répartition des biens. L’autorité change de caractère. Ce n’est plus un pouvoir d’État qui défend les intérêts d’une classe dominante, c’est une administration ne fait qu’assurer le minimum de coordination indispensable à la vie en société.
Les antagonismes de classes une fois disparus dans le cours du développement, toute la production étant concentrée dans les mains des individus associés, alors le pouvoir public perd son caractère politique. Le pouvoir politique, à proprement parler, est le pouvoir organisé d’une classe pour l’oppression d’une autre. Si le prolétariat, dans sa lutte contre la bourgeoisie, se constitue forcément en classe, s’il s’érige par une révolution en classe dominante et, comme classe dominante, détruit par la violence l’ancien régime de production, il détruit, en même temps que ce régime de production, les conditions de l’antagonisme des classes, il détruit les classes en général et, par là même, sa propre domination comme classe. (Manifeste.)
Inutile de dire que c’est un objectif lointain, bien qu’en rien déraisonnable (voir le poème de Brecht8) quand on voit les progrès de la science et de la technique et ce qu’on pourrait en tirer en les utilisant à bon escient.
(« Lob des Kommunismus » :
Was spricht eigentlich gegen den Kommunismus?
Er ist vernünftig, jeder versteht ihn.
Er ist leicht.
Du bist doch kein Ausbeuter;
du kannst ihn begreifen, er ist gut für dich,
erkundige dich nach ihm.
Die Dummköpfe nennen ihn dumm,
und die Schmutzigen nennen ihn schmutzig.
Er ist gegen den Schmutz und gegen die Dummheit.
Die Ausbeuter nennen ihn ein Verbrechen,
aber wir wissen, er ist das Ende der Verbrechen.
Er ist keine Tollheit, sondern das Ende der Tollheit.
Er ist nicht das Chaos, sondern die Ordnung.
Er ist das Einfache, das schwer zu machen ist.)
(www.theclassicalshop.net/pdf/CHAN%209820.pdf).
« Éloge du communisme » (Bertolt Brecht dans La mère) :
Au fait, qu’est-ce qu’on a contre le communisme ?
Il est raisonnable, tout le monde le comprend.
Il est facile ;
tu n’es pas un exploiteur,
tu peux le comprendre, il est bon pour toi,
renseigne-toi sur lui.
Les imbéciles l’appellent stupide,
les sales l’appellent sale.
Il est contre la saleté et la stupidité.
Les exploiteurs l’appellent un crime,
mais nous savons qu’il est la fin du crime.
Il n’est pas folie mais la fin de la folie.
Il n’est pas le chaos mais l’ordre.
Il est simple, mais difficile à faire.
Cela ne se fait pas en un jour. Le socialisme, dans son principe, n’est pas autre chose que le communisme, mais c’est un communisme immature et incomplet. Historiquement la collectivisation ne s’achève pas le premier jour. Il y a donc nécessairement une période où il reste de la production privée et il peut y avoir en outre dans des situations particulières des raisons de choisir pour le développement de continuer un certain temps à faire appel à l’initiative et à des capitaux privés.
Économie des choses plutôt qu’économie de l’argent. Le but (1re loi du socialisme) est de satisfaire les besoins des gens. (Le but des capitalistes, c’est, ayant de l’argent, faire toujours plus d’argent.) La loi fondamentale du socialisme, c’est : « Assurer au maximum la satisfaction des besoins matériels et culturels sans cesse croissants de toute la société, en développant et en perfectionnant sans cesse la production socialiste sur la base d’une technique supérieure9. »
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/contrad.html#fondamentale
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap23sect05.html
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap29sect02.html
Cela impose (2e loi du socialisme) de respecter des équilibres fondamentaux entre les différentes branches de l’économie (on revient au tableau du caractère social de la production). « Le socialisme ne saurait se concevoir sans un développement harmonieux de l’économie nationale, assurant un usage rationnel, dans un esprit d’épargne, du travail et de ses résultats10. »
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/contrad.html#harmonieux
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap30sect01.html
Comment réaliser en pratique le développement harmonieux de l’économie ? Le moyen (3e loi du socialisme) de réaliser ça, c’est la planification11.
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/contrad.html#planification
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap30sect03.html
Le parti communiste de Cuba tient son 6e congrès à partir du 16 avril 2011. On y discutera surtout de réformes économiques nécessaires pour développer les forces productives et renforcer ainsi le socialisme. Des textes préparatoires émanent de discussions dans toute la société depuis deux ans et ces textes ont eux-mêmes ont été étudiés et discutés encore dans un grand débat ces derniers mois. (Intervention de Raymond Muller.)
Retour historique sur le développement du prolétariat. Contribution de Marx et Engels à son organisation et à sa théorie (le Manifeste, le Capital…)
[…] la bourgeoisie […] a produit […] les ouvriers modernes, les prolétaires.
À mesure que grandit la bourgeoisie, c’est-à-dire le capital, se développe aussi le prolétariat, la classe des ouvriers modernes qui ne vivent qu’à la condition de trouver du travail et qui n’en trouvent que si leur travail accroît le capital. (Manifeste I.)
Le rôle historique de la classe ouvrière.
De toutes les classes qui, à l’heure présente, s’opposent à la bourgeoisie, le prolétariat seul est une classe vraiment révolutionnaire. Les autres classes périclitent et périssent avec la grande industrie ; le prolétariat, au contraire, en est le produit le plus authentique.
Les classes moyennes, petits fabricants, détaillants, artisans, paysans, tous combattent la bourgeoisie parce qu’elle est une menace pour leur existence en tant que classes moyennes. Elles ne sont donc pas révolutionnaires, mais conservatrices ; bien plus, elles sont réactionnaires : elles cherchent à faire tourner à l’envers la roue de l’histoire. Si elles sont révolutionnaires, c’est en considération de leur passage imminent au prolétariat : elles défendent alors leurs intérêts futurs et non leurs intérêts actuels ; elles abandonnent leur propre point de vue pour se placer à celui du prolétariat. (Manifeste I.)
Voir mon cours sur la classe ouvrière, en particulier ce que je reprends ci-dessous, mais on peut juger utile d’étudier aussi les point de vues opposés.
Puisque c’est le rapport social capitalistes/prolétaires qui est typique du mode de production, on ne voit pas comment d’autres classes pourraient proposer une porte de sortie. Les seules possibilités qui se présentent sont :
ou bien le statu quo : mais les capitalistes continuent à dépendre entièrement des prolétaires, ils ne peuvent s’en passer ;
ou bien le socialisme : les prolétaires, eux, peuvent parfaitement se passer des capitalistes en confisquant le capital (collectivement, au niveau de l’État socialiste).
C’est la thèse du Manifeste de Marx et Engels : le prolétariat a la mission historique de changer le monde en renversant le capitalisme.
Le 8e congrès du PTB confirme le rôle central des travailleurs des grandes entreprises. Ils conjuguent l’aspect objectif de leur position dans la production capitaliste (privés de moyens de production, vendeurs de leur force de travail, avec parmi eux les producteurs de biens matériels et de plus-value) avec les dimensions idéologiques discutées ici.
Pour les autres classes, on ne voit pas d’autre possibilité que de choisir une des deux options, c’est-à-dire un des deux camps. Pour la prise du pouvoir et sa consolidation, le prolétariat doit s’allier à d’autres classes, qui peuvent donc jouer un rôle important dans certaines situations historiques. Mais même si les alliés du prolétariat ont parfois été plus nombreux que le prolétariat lui-même, celui-ci joue un rôle essentiel. La révolution socialiste est dans son essence une révolution prolétarienne. Historiquement, et en Russie, et, plus encore, en Chine, le prolétariat était très minoritaire dans son propre camp ; les révolutions de 1917 et de 1949-1956 (1) n’en sont pas moins prolétariennes. Même dans les pays où la classe ouvrière est pratiquement inexistante, comme au Laos, la révolution est prolétarienne en ce qu’elle est l’héritière du marxisme et du mouvement ouvrier.
La nécessité qu’elle ait son propre parti. L’apport de Lénine dans la conception d’un parti communiste. Ci-dessous, ce que j’ai donné à Genève en 2010. Voir aussi plus loin dans la révolution russe, surtout le parti de type nouveau de 1912.
On ne mène pas un projet difficile, contre un ennemi dangereux, sans organisation, sans compétence, sans direction.
Le projet doit être fondé théoriquement.
Il faut une discipline dans l’exécution. Il faut agir de manière concertée. On ne peut réussir si chacun en fait à sa tête.
Il y a des niveaux successifs de la masse à l’avant-garde.
La grande masse de la population apprendra par l’expérience, dans les mouvements de masse, par les victoires obtenues dans ces mouvements, quel est le bon camp, quels sont les partis et les politiciens qui ne sont en réalité pas du côté du peuple, qu’une autre société est possible. Il faut pour cela une politique de communication, des campagnes électorales et autres, mais on ne va pas convaincre chacun des membres de la population par des leçons comme celle-ci. Nous ne sommes pas des Témoins de Jéhovah qui vont porter la bonne parole de porte en porte. (Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut jamais faire du porte à porte.) On ne fait pas bouger les gens par l’endoctrinement.
Cependant dans la classe ouvrière, il y a une avant-garde que l’expérience à rendue plus combative, plus consciente, qui veut apprendre et nous devons répondre à cette attente. Cette avant-garde entraîne la masse dans le mouvement et fait progresser ainsi la conscience générale.
Le parti est la partie organisée de cette avant-garde. C’est le parti qui assure la cohérence de l’ensemble du tableau. C’est la classe ouvrière qui a la mission historique de réunir le reste de la population autour d’elle pour renverser le capitalisme et édifier le socialisme, mais sans parti de la classe ouvrière, il n’y aura jamais de socialisme.
Unité. Pas d’exclusives. Il ne faut pas être puriste. Avec des gens qui veulent vraiment une autre société, socialiste, et qui admettent qu’il faut s’organiser pour y arriver, il faut s’unir, pas se disputer, même si on a des divergences sur de nombreux points. La confrontation des points de vue est nécessaire pour avancer. L’unité se construit, elle n’est pas un pré-requis. Mais en fin de compte, il faut une centralisation et une discipline.
Respect des communistes : les gens qui s’organisent pour changer la société dans ce sens n’y étaient pas obligés ; ils consacrent dans une certaine mesure leur vie à leur engagement ; ils méritent le respect, et même un sentiment amical, même si on n’est pas d’accord avec eux sur de nombreux points ou si on a des difficultés avec certains traits de leur caractère. Il n’est pas question de conciliation : il faut critiquer et combattre les erreurs, mais sans oublier qu’on discute entre camarades.
Révolutions bourgeoises, révolutions démocratiques, révolutions prolétariennes, Russie 1905, Russie février et octobre 1917, Chine.
Retour à la présentation du surplus. Sauf à un niveau tout à fait primitif, non seulement il y a un surplus, mais il est imposé par une classe dirigeante qui se l’approprie. Il y a changement et progrès des techniques, mais des rapports sociaux figés bloquent ce progrès et cette contradiction donne lieu à des changements radicaux dans l’histoire. La civilisation se développe dans deux grands États totalitaires, la Mésopotamie et l’Égypte, autour des grands fleuves. En Grèce, petits États qui sont des clubs de propriétaires de terre (et d’esclaves), avec lutte de classes pour savoir si seuls les très gros propriétaires commandent (oligarchie, aristocratie), ou bien tous les propriétaires (démocratie). (Les étrangers, dits métèques, et les esclaves n’ont rien à dire.) Un club de propriétaires du même genre, à Rome, conquiert l’Italie puis le monde méditerranéen et l’Europe en faisant beaucoup d’esclaves, mais ce système étouffe le progrès, devient ingérable et s’étouffe lui-même. Dans les ruines de l’Empire, d’anciens officiers de l’armée romaine et des chefs envahisseurs s’érigent en seigneurs et asservissent les paysans, mais les serfs ne sont pas des esclaves.
Il y a un lent progrès technique qui permet à certains d’accumuler du capital et de l’investir dans la production. (Il y a toujours eu du capital, mais plutôt dans le commerce et dans la banque. Ce qui est nouveau et qui constitue vraiment le capitalisme, c’est de l’investir dans la production.) Le capitalisme se développe mal s’il dépend de l’arbitraire du roi. En Angleterre (milieu du 16e) puis en France (1789-1870), la bourgeoisie s’empare du pouvoir.
La Russie est encore féodale, malgré l’abolition du servage en 1861. Le gouvernement est celui du tsar et les parlements, lorsqu’il y en a eu, étaient d’abord purement consultatifs, ensuite dissous s’ils contestaient trop. Le capitalisme se développe économiquement mais n’a pas le pouvoir politique. C’est un premier cap à passer : pour passer du capitalisme au socialisme, il faudrait d’abord qu’une révolution bourgeoise instaure le pouvoir des capitalistes. (Comparer à la France, à l’Angleterre.)
Le parti du prolétariat se trouve donc devant une double tâche, ou deux étapes : renverser le régime féodal, en alliance avec les paysans (la bourgeoisie a peur de la révolution)12 ; ensuite lutter pour passer au socialisme. C’est pour cela qu’en Russie, le parti communiste s’est appelé d’abord Parti ouvrier social-démocrate de Russie. Le premier congrès de 1898 fonde surtout un parti sur papier. C’est au deuxième congrès (1903) que le parti commence vraiment, avec un programme clair (et d’emblée les divergences qui conduiront à la séparation des bolchéviques et des menchéviques).
– Notes de lecture de Lénine, chercher « révolution démocratique » dans l’index : https://d-meeus.be/marxisme/classiques/TEIindex.html
Manifestation réprimée dans le sang en janvier 1905. Révolte sur le cuirassé Potemkine en juin. Soviets en octobre. Insurrection à Moscou en décembre. Malgré une répression sanglante, le mouvement continue en 1906 mais le tsar reprend les choses en mains. Divers parlements, défaitisme des menchéviques
En 1912, les bolchéviques reprennent en mains le parti qui s’appelle alors P.O.S.D.R. (b). Il se démarquent des menchéviques, mais aussi de la social-démocratie européenne. C’est donc une étape nouvelle dans l’organisation politique du prolétariat. Voir à ce sujet les sections 3, 4 et 5 du chapitre 4 de l’Histoire du Parti communiste (bolchévik) de l’URSS
Révolution démocratique, révolution socialiste. Février 1917, le pouvoir est ébranlé. Gouvernement provisoire qui hésite entre un nouveau tsar et la république. Le prolétariat s’organise en soviets. Il y a donc dualité de pouvoir gouvernement/soviets. Dans les soviets, l’influence menchévique est majoritaire. Agitation populaire, répression, menaces et tentatives de coups d’État contre-révolutionnaires militaires. Cela clarifie la situation pour le prolétariat et les bolchéviques deviennent majoritaires dans les soviets. (Un an après, en Allemagne, en 1918, la révolution échouera, entre autres par manque là-bas d’un parti de type bolchévique.)
En octobre 1917, les bolchéviques décident de la prise de pouvoir par les soviets. Le nouveau gouvernement arrête la guerre (traité de paix avec l’Allemagne en février 1918).
Le gouvernement provisoire n’a rien réglé pour les paysans. Les paysans ne peuvent pas être mobilisés d’emblée dans un projet socialiste, mais on ne peut pas non plus faire la révolution contre eux. D’où un double programme :
En octobre 1917, la révolution a été peu sanglante parce qu’elle a rencontré peu de résistance. Mais en 1918, les Anglais et les Français attaquent la jeune république et cela encourage la résistance à l’intérieur des classes (féodaux et bourgeois) qui ont perdu le pouvoir. Malgré le traité de paix, les Allemands soutiennent en sous-main le sabotage de la révolution. Le Japon est intervenu de son côté. Cependant, fin 1920 la victoire de la révolution était acquise. (L’U.R.S.S. est fondée en 1922.)
Après six ans de guerre (1914-1920), il a fallu assouplir les mesures de temps de guerre et relancer l’économie. La NEP (nouvelle politique économique) comporte certaines concessions à l’entreprise privée, surtout dans l’agriculture.
Dans la période 1921-1929, un développement inégal a enrichi les paysans riches et appauvri les paysans pauvres. Les paysans pauvres produisent juste de quoi vivre. Le reste de la société dépend pour se nourrir du surplus que les paysans riches mettent sur le marché. Il s’en suit que la révolution est dans une certaine mesure l’otage des paysans riches. L’industrie décolle mais son développement est freiné par le retard de l’agriculture. On décide donc dès 1927 d’organiser les paysans pauvres en coopératives pour relever leur efficacité et élever ainsi à la fois le niveau de vie des paysans pauvres et la nourriture disponible pour le reste de la société. Le mouvement de collectivisation agricole s’intensifie de 1930 à 1934.
L’U.R.S.S. a retrouvé vers la fin des années 20 un niveau de développement du même ordre de grandeur que celui de 1914. En 1941, elle était devenue, en une douzaine d’années, une grande puissance industrielle assez forte pour résister à l’attaque de l’Allemagne nazie et qui a porté l’essentiel de l’effort de guerre des Alliés.
Dans cette période, il y a eu aussi une véritable révolution culturelle : alphabétisation d’une population (surtout paysanne) qui l’était peu, cours du soir artistiques et techniques, enseignement. Formation en une génération d’innombrables ouvriers qualifiés, techniciens, ingénieurs, médecins, savants en tout genre…
L’U.R.S.S. a connu de grandes destruction. Elle a eu environ 25 millions de morts, civils et militaires. Elle a apporté une contribution majeure à la victoire contre le nazisme.
Malgré la séparation d’avec les menchéviques en 1912, il y a toujours eu une lutte complexe des révolutionnaires conséquents à l’intérieur du parti bolchévique lui-même, d’une part contre des dérives « gauchistes », d’autre part et surtout contre une orientation réformiste, défaitiste, attentiste… ceux qui sont pour la révolution en paroles mais qui ont eu peur de la faire en 1917, ceux qui pensent qu’après la victoire de la révolution, le capitalisme n’est plus un danger, que les problèmes vont s’arranger tout seuls à la longue… Ce courant devient prépondérant à la tête du parti et de l’État avec la nomination de Krouchtchev comme secrétaire général du parti en 1953.
Cette orientation entraîne après quelques années un conflit puis une rupture avec le Parti communiste chinois. Après la Seconde Guerre mondiale, l’U.R.S.S. n’est plus seule, il y a de nombreux pays socialistes. Depuis 1920 ou 1921, il y a aussi de nombreux partis communistes dans le monde, dans la plupart des pays. (L’aile gauche des grands partis socialistes a tiré les leçons du modèle de parti bolchévique de 1912, du succès de 1917 et de l’échec de 1918 en Allemagne. Elle s’organise de manière autonome en parti communiste.) Dans la querelle sino-soviétique, le camp socialiste se divise en deux, autour de Moscou ou de Pékin. La plupart des partis communistes restés du côté de Moscou adoptent aussi des positions de plus en plus réformistes, de moins en moins révolutionnaires. Ceux de l’autre côté qualifient ça de « révisionnisme » dans la mesure où il s’agit de l’abandon de certaines idées fondamentales du marxisme.
La suite logique de cette victoire du courant de droite est l’abandon du socialisme en 1989 en U.R.S.S. et dans beaucoup d’autres pays. En dehors du camp socialiste, certains partis communistes réformistes n’y résistent pas, comme en Italie où le PCI disparaît.
L’empire chinois était trop faible pour résister à l’envahissement par les puissances occidentales, à partir du milieu du 19e siècle. Il était toujours formellement indépendant, mais les puissances ont extorqué le droit de contrôle de ports, du commerce, des communications, de certaines parties des villes (« les concessions »)… La Chine est toujours restée formellement indépendante, n’a jamais été colonie de personne, mais on parle de semi-colonie.
Le docteur Sun Yat-sen et son parti, le Guomindang (ancienne orthographe Kuomintang) renversent le régime impérial dans la révolution de 1911, pour établir la République de Chine, une démocratie bourgeoise sur le modèle européen. Cependant le pouvoir républicain était faible. La Chine était dans l’ensemble aux mains de petits seigneurs locaux qui se faisaient la guerre entre eux et « prélevaient des impôts » sur la population. Ceux de la région de Pékin se sont emparés du gouvernement et n’ont rien changé à la domination des puissances étrangères. Cela a entraîné un mécontentement populaire avec en 1919 un soulèvement des étudiants (le mouvement du 4 Mai) suivis par les ouvriers.
En 1921, quelques groupes communistes se sont rencontrés pour fonder le Parti communiste chinois. En Chine en 1921, on n’est plus sous l’empire comme en 1898 en Russie, mais comme la révolution bourgeoise n’est pas vraiment aboutie, il y a aussi une double mission historique (inscrite dans le programme en 1922), la démocratie et le socialisme.
Le Parti communiste chinois s’unit au Guomindang dans une lutte armée commune contre les seigneurs de guerre pour établir vraiment une république moderne et reconquérir l’indépendance du pays. La lutte contre les seigneurs de guerre a eu un certain succès jusqu’en 1927 et le gouvernement légal est aux mains du Guomindang.
Cependant, dans le Guomindang un courant de droite, avec à sa tête Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek), prend la direction de ce parti. En 1927, Tchang Kaï-chek s’entend avec les occidentaux à Shanghaï pour réprimer les luttes ouvrières. Il ouvre le feu sur des ouvriers qui manifestent et en tue quelques centaines. Il fait arrêter et exécuter plus de 2 000 personnes soupçonnées d’être communistes (penser à Pinochet).
Le Parti communiste chinois se maintient alors clandestinement dans les villes, avec de grandes difficultés, et crée des « régions libérées » dans l’intérieur du pays, avec la propre armée, l’Armée rouge.
En 1931, le Japon attaque la Chine et l’envahit en partie.
Cependant le gouvernement du Guomindang trouvait plus important de continuer à éliminer les communistes en attaquant les régions libérées que de résister à l’invasion japonaise. L’Armée rouge a alors échappé à l’encerclement par la Longue Marche (1934-1936) qui l’a amenée dans le Nord-Est.
Dès la fin 1935, le Parti communiste chinois avance l’idée d’une union nationale contre l’invasion japonaise. Il s’en est suivi une période complexe où tantôt le gouvernement chinois (Guomindang) accepte un accord de front uni et le respecte plus ou moins ; tantôt plutôt que de défendre le pays contre l’envahisseur, il préfère attaquer les communistes, parfois même en concertation avec les Japonais. Cela divise dans une certaine mesure le Guomindang. Certains officiers patriotes de l’armée gouvernementale n’acceptent pas la compromission avec l’ennemi et préfèrent collaborer avec l’Armée rouge dans la défense de la patrie. L’Armée rouge joue un rôle très important dans la libération du pays et cela gagne au Parti communiste la sympathie d’une grande partie de la population.
Une fois la guerre terminée, les deux camps se trouvent face à face : le camp de l’alliance du prolétariat et de la paysannerie sous la direction du Parti communiste ; le camp de la maffia des quatre grandes familles autour de Tchang Kaï-chek, qui contrôle le Guomindang et le gouvernement. Comme l’Armée rouge s’est renforcée pendant la guerre contre le Japon, c’est l’affrontement entre deux grandes armées, dont l’Armée rouge sort victorieuse, grâce au soutien du peuple et malgré le soutien des États-Unis à l’autre camp.
La République populaire de Chine est proclamée en octobre 1949. La mafia qui contrôle le Guomindang, et ceux qui veulent les suivre, se réfugient sur l’île chinoise de Taïwan et y établissent une sorte de gouvernement en exil.
Le Parti communiste considère que la Chine n’est pas assez développée pour passer au socialisme. Cependant on ne peut pas compter sur la bourgeoisie pour achever la révolution bourgeoise démocratique qui en Chine n’a jamais abouti. C’est donc l’alliance du prolétariat et des paysans qui prend le pouvoir et qui contrôle le développement du capitalisme. Les capitalistes petits et moyens qui ont préféré ne pas suivre la maffia des quatre familles et leur suite font des affaires dans le cadre que la République populaire définit. Dans leur fuite, les gros capitalistes ont abandonné les gros secteurs que l’État nationalise. L’État contrôle ainsi l’essentiel des communications, de l’énergie, des matières premières fondamentales, du grand commerce, du commerce extérieur. L’État passe des commandes et achète une grande partie de la production des entreprises capitalistes.
Dans cette période, il y a un mouvement d’organisation coopérative à la campagne et de reprise graduelle de l’industrie capitaliste par l’État (par l’entrée de l’État dans le capital).
Le processus de reprise de l’industrie et de socialisation de l’agriculture est achevé pour l’essentiel en 1956. À partir de ce moment, on est dans le développement du socialisme. En 1958 on veut accélérer le développement en lançant un mouvement pour un « grand bond en avant » et dans les campagnes, les coopératives de village sont fusionnées dans des communes populaires plus grandes qui sont à la fois coopérative agricole et administration municipale de l’État. Plus grandes, les communes sont aussi en mesure de développer certaines activités industrielles. Ce « bond en avant » donne certains résultats positifs mais comporte certains projets irréalistes avec de mauvais résultats.
Mao Zedong, président du Parti communiste chinois, s’inquiète de l’évolution de l’Union soviétique et s’inquiète des signes de révisionnisme dans son propre parti. Il lance un mouvement de critique, d’abord sur le front de la culture. C’est un appel à la société dans son ensemble à critiquer les orientations révisionnistes qui se font jour dans certains milieux dans le parti et cela dépasse rapidement le seul terrain de la culture. (Mais en Chine, on a continué tout au long à parler de « Grande Révolution culturelle prolétarienne ».) Dans ce climat, se sont exprimés des rêves utopistes de réaliser immédiatement certains aspects de l’idéal communiste, comme l’effacement de la différence entre travail manuel et intellectuel ou entre ville et campagne. Cela a soulevé un énorme enthousiasme dans une partie de la jeunesse chinoise et dans la jeunesse du monde entier. Cela a certainement eu une grande importance dans le mouvement de contestation de la jeunesse en Europe et en Amérique à la fin des années 60 et dans les années 70.
Il en est sorti de terribles luttes de clans dans et en dehors du parti. Chaque clan prétend détenir la vérité et la pureté révolutionnaire et condamne les autres. On en viendra parfois aux mains, parfois avec des armes et il y a eu des morts. Il y a eu des mesures d’interdiction professionnelle, d’éloignement à la campagne, de rééducation. Tout le pays a été profondément désorganisé. Cependant des cadres responsables ont maintenu le pays sur les rails et malgré que l’économie a été certainement affectée, le pays a continué à se développer pendant cette période.
Après la période gauchiste de la révolution culturelle, on est au contraire passé à l’idée d’utiliser le capitalisme, sous contrôle, pour développer le socialisme, un peu comme dans la NEP des années 20 en U.R.S.S. ou dans la période de capitalisme contrôlé de 1949 à 1956 en Chine même. Le point de départ de cette conception est que la Chine est encore au sortir de la révolution culturelle un pays très pauvre et peu développé. Un tel pays ne peut donc dégager qu’un petit surplus et le développement ne peut donc être que très lent. Le recours au capitalisme et surtout aux capitaux étrangers a un double but :
disposer immédiatement (quitte à devoir les rémunérer) de gros capitaux qu’il faudrait une éternité à constituer par le surplus propre ;
réaliser par la même occasion un transfert de technologie des entreprises étrangères vers la Chine.
Bien que le capitalisme soit très développé et très visible dans le nouveau visage de la Chine, il reste un gros secteur d’économie socialiste qui, comme en 1949-1956, contrôle les secteurs clefs. Ce contrôle des secteurs clefs et la capacité de la Chine de prendre un certain nombre de décisions importantes (sur le niveau de vie de la population, sur l’environnement…) permet de conclure que dans la situation actuelle, malgré le grand développement du capitalisme, la Chine est essentiellement un pays socialiste et non un pays capitaliste.
Défense du socialisme.
Les luttes ouvrières en Tunisie en 2008, la révolution nationale démocratique en Tunisie en 2011 à la lumière des révolutions russes de 1905, de février 1917. Voir le dossier Révolution tunisienne tiré de Solidaire.
L’Union européenne.
La lutte du prolétariat contre la bourgeoisie, bien qu’elle ne soit pas, quant au fond, une lutte nationale, en revêt cependant tout d’abord la forme. Il va sans dire que le prolétariat de chaque pays doit en finir, avant tout, avec sa propre bourgeoisie. (Manifeste I.)
L’intervention impérialiste en Lybie. Voir le dossier Libye.
Synthèse d’ensemble, questions non résolues, compléments d’explication, discussion générale.
Évaluation.