Dominique Meeùs
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Je m’appelle Dominique Meeùs. On trouve mon site en d-meeus.be et mon adresse e-mail à toutes les pages. La présente page est dans le sous-dossier crise2013 du dossier marxisme, donc d-meeus.be/marxisme/crise2013/index.html.
Le plus important à retenir est que tout (toute la richesse) est travail. Autre chose importante à comprendre, on ne travaille pas seulement pour les besoins immédiats, on produit aussi un surplus — sinon il n’y aurait jamais de progrès. Mais les sociétés sont divisées en classes et la classe dominante accapare le surplus.
Dans toutes les sociétés, sauf les plus primitives, il y a ceux qui travaillent et ceux qui profitent du travail des autres, c’est la division de la société en classes, différentes ou même souvent opposées par leurs intérêts.
L’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de luttes de classes.
Homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maître de jurande et compagnon, en un mot oppresseurs et opprimés, en opposition constante, ont mené une guerre ininterrompue, tantôt ouverte, tantôt dissimulée, une guerre qui finissait toujours soit par une transformation révolutionnaire de la société tout entière, soit par la destruction des deux classes en lutte.
Dans les premières époques historiques, nous constatons presque partout une organisation complète de la société en classes distinctes, une échelle graduée de conditions sociales. Dans la Rome antique, nous trouvons des patriciens, des chevaliers, des plébéiens, des esclaves ; au moyen âge, des seigneurs, des vassaux, des maîtres de corporation, des compagnons, des serfs et, de plus, dans chacune de ces classes, une hiérarchie particulière.
La société bourgeoise moderne, élevée sur les ruines de la société féodale, n’a pas aboli les antagonismes de classes. Elle n’a fait que substituer de nouvelles classes, de nouvelles conditions d’oppression, de nouvelles formes de lutte à celles d’autrefois. (Manifeste I.)
Vie privée : « mettre de côté » ; société : on pourrait dire reproduction simple (travailler pour continuer à vivre comme on est habitué à le faire, sans plus) et reproduction élargie (reproduction simple + surplus). Nouveaux outils, routes, canaux, pyramides d’Égypte, Notre-Dame de Paris.
Là-dedans apparaissent deux choses :
[1] Lire plus sur les
classes :
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/Segal/paragraphes/chap01sec04contra.html.
Une usine d’automobiles se trouve dans un bâtiment fait de briques et de béton avec des poutrelles d’acier et des fenêtres en verre. On y trouve des machines, essentiellement en acier ; des kilomètres de fils électriques en cuivre isolés par des matières plastiques ; des tuyaux en cuivre, en fer ou en plastique… On produit les voitures à partir de tôle d’acier et autres produits semi-finis (par exemple les sièges fabriqués chez des sous-traitants, du matériel électrique et cetera). Les briques viennent de briqueteries qui se sont procuré de l’argile. Les poutrelles viennent de laminoirs qui ont acheté l’acier à des usines sidérurgiques qui, elles-mêmes, avaient acheté le minerai de fer et le charbon à des sociétés minières. Le tissu des sièges est fait de fibres textiles en partie naturelles, venant de l’agriculture, en partie artificielles, venant de l’industrie chimique qui utilise le pétrole comme matière première. Beaucoup de ces choses ont été transportées en camion. (Donc pour construire les camions et les autos d’aujourd’hui, on a aussi besoin des camions d’hier. L’industrie automobile est cliente d’elle-même.)
On voit donc que dans tout produit, il y a non seulement du travail présent et du travail passé, mais aussi du travail passé de nombreux secteurs de la société. Si vous prenez une auto, une seule, elle a été faite par certains ouvriers d’une certaine usine. Supposons, pour fixer les idées, qu’il y avait 3 000 ouvriers. Tous n’ont pas travaillé à cette voiture-là particulièrement. Peut-être qu’il n’y en a que dix, ou quelques dizaines qui y ont touché. Mais pensez à tout ce que cette auto contient d’acier, d’aluminium, de caoutchouc, de plastique, de textile, de peinture, de pièces diverses, électriques entre autres, qui ont été produites par toutes sortes de gens à partir d’autres matières premières, plus les équipements, tout cela à dû être transporté, dans le transport, on a consommé du pétrole, on a dû construire des routes. Finalement, combien de gens ont travaillé à cette seule voiture ? Je n’en sais rien. On avait d’abord pensé quelques dizaines. Maintenant, si vous me dites cent mille, je crains que ce ne soit finalement trop peu. Si quelqu’un m’assure que c’est cent millions ou plus, je ne serais pas étonné. (En fait, la question n’a peut-être pas de réponse.)
C’est typique du capitalisme. Au moyen âge, un outil de fabrication artisanale était peut-être le fruit du travail de quelques dizaines de personnes d’une région pas tellement étendue (on aurait peut-être pu écrire leurs noms), et par conséquent aussi la production agricole faite avec de tels outils.
C’est le caractère social de la production capitaliste. Ce caractère social s’étend en nombre (par exemple : cent millions de personnes pour une seule auto), dans le temps (ces travailleurs n’ont pas tous travaillé en même temps, il faut compter du travail passé) et dans l’espace (ils viennent de la terre entière). Si on ne voit pas cela, si on n’a pas cela constamment présent à l’esprit, on ne peut rien comprendre au capitalisme et, en particulier, on ne peut pas comprendre une des raisons pour lesquelles il ne peut et ne pourra jamais fonctionner correctement et pourquoi on peut et on doit le remplacer par le socialisme.
Valeur temps de travail [2], voir le tableau de l’échange.
[2] Lire plus sur la
valeur :
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap04sect02.html
et https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap04sect03.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/Segal/sections/chap02sec01.html
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/valeur.html#valeur
Partir du tableau du caractère social et interconnecté de la production. On pourrait ajouter en paroles en amont les routes, les canaux, les ports… en aval le téléphone mobile. Passer au tableau comparant la valeur de la journée de travail et la valeur de la force de travail [3]. C’est la forme capitaliste du surplus. Les « bons comptes font les bons amis », c’est un contrat, à ce stade et dans l’esprit de l’ordre capitaliste, dans le droit bourgeois, ce n’est pas du vol. (Contrairement au passé, dans ce système plus efficace, le surplus devient très important, potentiellement illimité sauf les contradictions.)
[3] Lire plus sur
l'exploitation :
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap07sect04.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/Segal/sections/chap04sec02.html
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/plusvalue.html#Production
Distinguer l’exploitation (surtravail) — qui résulte de la différence entre la valeur de la force de travail et la valeur ajoutée dans le travail — du vol que consiste le paiement d’un salaire inférieur à ce qui correspond à la valeur de la force de travail. Cependant, ces choses se situent à des niveaux d’abstraction différents et ne peuvent pas être calculées. En outre elles ne sont pas accessibles aux acteurs. Dans la pratique, le vol sur les salaires apparaît comme une aggravation de l’exploitation et toute exploitation apparaît comme un vol, tant du surtravail que du salaire non payé.
Le moteur de l’économie n’est pas le bien public (fournir à l’humanité ce dont elle a besoin pour survivre), mais la recherche du plus grand profit. La loi fondamentale du capitalisme, c’est la production de plus-value [4] et, en raison de la concurrence, il n’est pas permis de se contenter d’un profit « raisonnable », modéré.
[4] Lire plus sur la loi
fondamentale du capitalisme :
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap07sect04.html
Dans toute société, il y a une classe dominante qui profite des autres, mais pas toujours de la même manière. Le mode de production qui caractérise la société d’aujourd’hui, c’est le capitalisme, qui a sa manière spécifique d’exploiter le travail du prolétariat : la plus-value.
Autre dimension de la concurrence, anarchie. Encore le tableau du caractère social, capacités excédentaires dans l’industrie automobile, destructions d’outils dans la sidérurgie (exemple de Charleroi dans la référence ci-dessous au cours d’économie). Contradiction entre le caractère social de la production et le caractère privé de la propriété et de la décision [5].
[5] Lire plus sur le
caractère anarchique du capitalisme :
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap16sect04.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/Segal/paragraphes/chap01sec04contra.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/Segal/sections/chap04sec01.html
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/contrad.html#Anarchie
Après la Seconde Guerre mondiale :
Dans cette période, les affaires étaient bonnes, les ouvriers pouvaient même se battre pour des augmentations de salaire (il y avait peu de chômage.
La recherche de plus de profit fait que les capitalistes ne mangent pas tout leur profit ; ils en réinvestissent une grande partie, soit simplement pour agrandir leur entreprise, soit pour en perfectionner l’équipement. Le capital investi a donc tendance à augmenter sans limite. Ce plus grand capital donnera généralement bien un plus grand profit, mais pas nécessairement dans la même proportion. Si on produit de plus en plus, il devient difficile de tout vendre, même si les travailleurs ont de relativement bons salaires. Une partie du capital est inutilisée. Ainsi les profits ont tendance à diminuer, ce que Marx appelle la baisse tendancielle du taux de profit.
On voit qu’en 1966, le taux de profit des entreprises américaines descend à peu près continuellement de 1966 à 1974 :
Repris de Henri Houben, La crise de trente ans : La fin du capitalisme ?, Aden, Bruxelles, 2011, p. 56.
On voit donc qu’à partir de 1966, le capitalisme a un problème. En 1973, les pays producteurs de pétrole décident d’augmenter le prix (choc pétrolier). Cette perturbation révèle la faiblesse du capitalisme.
Le tableau général de la crise (celle-ci et les autres), c’est :
[6] Lire plus sur la crise
de surproduction :
– Manuel, https://d-meeus.be/marxisme/manuel/chap17sect01.html
– Ségal, https://d-meeus.be/marxisme/Segal/sections/chap10sec01.html
– Mon cours d’économie, https://d-meeus.be/marxisme/cours/contrad.html#surproduction
Depuis le temps qu’il y a des crises, les capitalistes sont devenus plus malins. Ils veulent sortir de la crise sans pots cassés. Ils vont limiter les faillites… en faisant payer la crise aux travailleurs.
Parfois en régulant des secteurs pour quand même détruire une partie du capital. Il est intéressant de considérer une image qui montre à la fois la folie des investissements et la destruction de capital, dans la sidérurgie de Charleroi (lien anarchie dans mon cours ci-dessus).
C’est ce qui s’est passé depuis la crise de 73 : les capitalistes ont intensifié leur lutte de classe contre les travailleurs, directement et par leurs gouvernements (président Reagan aux États-Unis, première ministre Thatcher au Royaume-Uni). On a économisé sur les salaires et on s’est débarassé de travailleurs. Il y a eu moins de destruction de capital, mais donc on n’est toujours pas sorti de la crise. C’est maintenant une crise de quarante ans ! La croissance qui était entre 5 et 6 % dans les années grasses (les golden sixties) fluctue ensuite fortement entre 5 et 0 % :
Diminuer le revenu de travailleurs n’améliore pas le problème de surproduction. On a alors encouragé le crédit.
Les capitalistes ont ainsi retrouvé plus de profit, et ils en veulent toujours plus, donc réinvestir. Mais même avec le crédit, la surproduction est toujours là. On ne peut donc pas raisonnablement investir beaucoup dans l’industrie. Une partie de l’argent va donc dans des investissements financiers. On achète des titres, soit qui promettent une rémunération, soit — surtout — dont on espère que le cours va monter et qu’on pourra revendre avec bénéfice. Cela provoque des bulles financières, qui parfois éclatent. Il y ainsi une succession de petites crises dans la crise — quelques exemples :
Ce sont des crises localisées, mais fin 2007, il y a l’éclatement de la bulle de l’immobilier aux États-Unis (subprimes), entraînant une crise mondiale en 2008. C’est la conséquence de la politique de crédit (on encourage les travailleurs à dépenser au-dessus de leurs moyens) et de l’investissement financier (on achète des titres sur la dette des travailleurs).
Les gouvernements ont sauvé les banques (too big to fail), mais ils sont maintenant eux-mêmes au bord de la faillite. Donc, plus que jamais, on fait payer la crise aux travailleurs.