Dominique Meeùs
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[DM] Cadre historique

Table of contents

La deuxième internationale et le révisionnisme

Après une période surtout répressive, la bourgeoisie change d’attitude pour une politique de compromis et de concessions. En Allemagne, Bismarck (1815-1898) quitte le pouvoir en 1890. Le parti socialiste, déjà très fort sous les 12 ans de répression des lois de 1878, va de succès en succès. Cela développe des illusions parlementaristes et attire des bourgeois progressistes dans le parti. Développement de l’aristocratie ouvrière dans un contexte d’enrichissement par l’exploitation des colonies.

Dans la Deuxième internationale, le révisionnisme s’organise, devient un courant dominant avec une pensée élaborée (Dühring, Bernstein), attaquant les fondements du marxisme. Bernstein est le représentant du révisionnisme sur le plan théorique, et Millerand (participation gouvernementale) pratique.

Le Parti ouvrier belge (POB) qui naît tardivement est d’emblée révisionniste, contre-révolutionnaire.

Après la mort de Marx (1818-1883) et d’Engels (1820-1895), malgré Kautsky, la gauche marxiste (August Bebel, Rosa Luxemburg, Clara Zetkin, Karl Liebknecht) n’est pas en mesure d’opposer une défense des principes adaptée au contexte historique. (L’Anti-Dühring date de 1891.) C’est Lénine qui va prendre en mains le combat. Rosa Luxemburg lui sera reconnaissante de s’en être chargé.

Russie

Abolition du servage et populisme. Abolition du servage en 1861. Les paysans deviennent libre de leurs mouvements mais sont appauvris par le fait que les nobles (se convertissant en propriétaires fonciers et en exploitants capitalistes) s’approprient une grande partie des terres. (Comparer enclosures en Angleterre.) Des paysans réduits à la misère sont donc disponibles pour le développement du capitalisme.

Les populistes considèrent la paysannerie comme la principale force révolutionnaire, et non le prolétariat (ils croient que la Russie pourra échapper au phénomène, purement occidental selon eux, du capitalisme, ou du moins à son grand développement). Ils conçoivent la révolution comme un retour à une communauté paysanne idyllique, sans voir la différenciation entre paysans riches (koulaks) et paysans pauvres.

Populisme et terrorisme. Les paysans ne les suivant pas, ils s’orientent vers le terrorisme. Le 1er mars 1881, des membres de la Narodnaïa Volia (volonté populaire), dits narodniki, tuent Alexandre II dans un attentat à la bombe. Après l’écrasement de la Narodnaïa Volia, les populistes abandonnent l’idée de révolution et cherchent la conciliation avec le pouvoir tsariste. Ils deviennent les porte-parole des intérêts des koulaks.

Lénine combat efficacement les populistes. (Ce que sont les amis de peuple, 1894, Œuvres, tome 1, pp. 143-360.)

Marxisme légal. En 1883, fondation du groupe Libération du travail (Plékhanov, Axelrod et autres) à Genève. Ils traduisent plusieurs ouvrages de Marx et Engels et écrivent eux-mêmes divers exposés du marxisme et les introduisent en Russie. Ils critiquent les populistes.

Dans les années 90, développement du « marxisme légal ». L’autocratie combat les narodniki, les terroristes genre Narodnaïa Volia et se préoccupe moins du développement d’un marxisme académique, souvent le fait de bourgeois libéraux (comme Piotr Strouvé) qui défendent d’ailleurs un marxisme « critique », bernsteinien. Les social-démocrates profitent de ce mouvement pour favoriser leurs idées, mais les marxistes légaux les critiquent et, de plus en plus, les censurent, ce qui mène à la rupture en 1896. Cela a néanmoins favorisé une large diffusion du marxisme 1.

Développement des luttes. Le développement rapide du capitalisme, très concentré, conduit à de grandes grèves.

Ouvriers, étudiants, paysans, bourgeoisie libérale. L’ampleur et le caractère général du mécontentement permettent de prévoir le commencement de la fin du tsarisme.

Social-démocratie. Des cercles ouvriers marxistes se développent partout. En 1895, Lénine regroupe les cercles de Pétersbourg (une vingtaine) dans une Union de lutte pour la libération de la classe ouvrière. En 1898, 1er congrès du P.O.S.D.R. Pas de programme, pas d’organisation. Le Comité central est arrêté. Seulement deux numéros de la Rabotchaïa Gazéta.

En même temps que les révolutionnaires marxistes chevronnés sont arrêtés, afflux de jeunes. (Comparer 1968 et suivantes.) Ils se font souvent arrêter aussi.

Économisme. Des « économistes » publient leur Credo en 1899. Protestation des « 17 » rédigée par Lénine. Revues Rabotchaïa Mysl (ouvertement économiste) en Russie et Rabotchéié Diélo (opportunistes, économistes conciliateurs) à l’étranger.

Lutte de Lénine. Estime qu’un 2e congrès dans cette situation serait catastrophique. Il faut d’abord mener la lutte pour le préparer. Fonde en 1900 l’Iskra (le Solidaire> de Lénine — voir aussi la note 5 du tome 5 des Œuvres) pour unifier le Parti autour du journal, et la Zaria (les Études marxistes de Lénine) en 1901. Écrit « Par où commencer ? » dans l’Iskra de mai 1901 et Que faire ? en 1901-1902. Suite à cette lutte conséquente, le 2e congrès de 1903 sera un succès. Sur le rôle de l’Iskra et du Que faire ? pour la construction du parti, lire dans l’Histoire du parti communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., 1938, le 2. du chapitre II (pp. 34-44 dans l’édition fac-similé de Solidaire, distribution EPO).

Notes
1.
Comparer avec les années 60 et 70 du 20e  siècle. Le marxisme était à la mode. Tous les intellectuels, sauf vraiment de droite, se devaient d’être marxistes et les éditeurs publiaient tant les classiques que les essais de ces intellectuels.