Dominique Meeùs
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Louis Ségal, Principes d’économie politique :
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La révolution prolétarienne abolit l’emprise du Capital sur les forces productives sociales, et, par cela même, liquide la contradiction entre la production sociale et l’appropriation capitaliste et supprime la cause même des crises. Si le Capital tend à soutirer la plus grande quantité possible de plus-value et, par cela même, tend à l’extension illimitée de la production en vue de l’accumulation, si cette dernière conditionne le pouvoir d’achat limité de la société, qui fait obstacle à la croissance de la production, en U.R.S.S. au contraire, la croissance du pouvoir d’achat devance celle de la production.
Les forces productives servent à la satisfaction des besoins, mais les besoins des masses doivent s’accroître sans cesse. Ils croissent et doivent croître d’une façon continue parce qu’ils ne sont pas limités par le capital. Ainsi la p. 278croissance de la production ne se heurte pas au pouvoir d’achat limité des masses, bien au contraire, la consommation pousse la production en avant.
Chez nous, en U.R.S.S., l’accroissement de la consommation (pouvoir d’achat) des masses dépasse sans cesse l’accroissement de la production à laquelle il sert de stimulant… L’amélioration systématique de la situation des travailleurs et l’accroissement ininterrompu de leurs besoins (pouvoir d’achat) constituent un stimulant de plus en plus fort à l’élargissement de la production, préservent la classe ouvrière contre les crises de surproduction, l’extension du chômage, etc., etc. (J. Staline : Deux Bilans, p. 50-51.)
Bien que l’U.R.S.S. ne soit pas séparée du monde capitaliste par une muraille de Chine, bien qu’elle ait des relations commerciales avec les pays capitalistes entraînés dans la crise économique mondiale, cette dernière n’a pu gagner l’économie soviétique, car le système même de cette économie exclut la possibilité des crises.
Les vagues de la crise économique mondiale qui ont submergé le monde capitaliste tout entier se brisent sur le système économique socialiste. Ce fait est si évident que tous les ennemis de l’U.R.S.S. sont obligés de le reconnaître.
Trotski affirmait que l’économie soviétique se trouvait sous le contrôle de l’économie capitaliste mondiale et que les crises dans les pays capitalistes devaient gagner l’U.R.S.S. Cette affirmation est intimement liée à la théorie social-démocrate de Trotski de l’impossibilité de construire le socialisme en U.R.S.S. et que l’économie soviétique est un système de capitalisme d’État. Mais la crise grandissante dans les pays capitalistes ainsi que la croissance prodigieuse de la production socialiste en U.R.S.S. renversent toute la « théorie » de Trotski et dévoilent son caractère contre-révolutionnaire.
Les opportunistes de droite sont aussi intervenus dans la question de la possibilité des crises en U.R.S.S. Partant de leur théorie de l’intégration du koulak dans le socialisme, niant la nécessité de la collectivisation et d’un rythme rapide d’industrialisation, les droitiers, en la personne de leur ancien chef et théoricien, le camarade Boukharine, ont lancé une théorie selon laquelle le rythme rapide de l’industrialisation crée une disproportion dans l’économie soviétique (à savoir entre l’industrie et l’agriculture), p. 279trouble « l’équilibre des secteurs » dans l’économie soviétique et que cela doit inévitablement aboutir à une crise. Boukharine, il est vrai, affirmait en même temps que c’était une crise particulière, non une crise de surproduction, mais une crise « à rebours ». Mais cela ne change en rien l’essence même de la théorie des droitiers qui aboutit à dire que le rythme rapide d’industrialisation provoque « la violation des proportions économiques fondamentales dans le pays ». (N. Boukharine : Notes d’un économiste.)
Cette conception découle de la « loi de la dépense du travail » des opportunistes de droite, loi que nous avons analysée plus haut, et de la théorie de « l’équilibre ».
Le camarade Boukharine considérait la théorie marxiste de la reproduction comme une théorie de l’équilibre et appliquait aussi cette théorie de l’équilibre à la question des rapports entre l’industrie et l’agriculture dans les conditions de la construction du socialisme. Pour la construction socialiste est, selon lui, nécessaire un équilibre entre le secteur agricole paysan et le secteur industriel socialiste.
Cette théorie de l’équilibre des opportunistes de droite a été complètement dévoilée par le camarade Staline qui, dans la lutte contre les droitiers, a développé la théorie marxiste-léniniste de la reproduction conformément aux tâches de la construction du socialisme. La reproduction socialiste élargie est irréalisable sans reproduction élargie dans l’agriculture. Mais la petite économie paysanne, dit le camarade Staline…
… Non seulement ne réalise pas, dans l’ensemble, une reproduction annuelle élargie, mais, au contraire, elle n’a pas toujours la possibilité de réaliser même la reproduction simple… Peut-on, pendant une période plus ou moins longue, fonder le pouvoir soviétique et l’édification socialiste sur deux bases différentes : sur la base de la grande industrie socialiste unifiée et sur la base de l’économie paysanne marchande extrêmement morcelée et retardataire ? Non, c’est impossible. Cela aboutirait, un beau jour, à l’effondrement complet de toute l’économie nationale. (J. Staline : la Collectivisation du village, p. 29-30. Paris, Bureau d’éditions, 1930.)
La revendication des droitiers de la conservation de l’équilibre des secteurs est, en réalité, la revendication de la conservation dans l’économie nationale des proportions qui se sont établies en régime capitaliste.
Mais comment construire le socialisme sans modifier p. 280ces « proportions » ? Ces proportions exprimant la basse consommation des masses, elles sont déterminées par les besoins du capital et non par ceux de la société. Peut-on construire le socialisme sans procéder à l’industrialisation rapide, seul moyen de socialiser la petite économie paysanne ? Il est évident que non. C’est pourquoi la « théorie de l’équilibre » et la « loi de la dépense du travail » n’expriment rien d’autre que la capitulation devant les difficultés de la construction du socialisme, la renonciation à cette construction, la perpétuation de la petite production marchande et, partant, du capitalisme qu’elle engendre.
Avec la conservation du fameux « équilibre » des secteurs, arriverait inévitablement une crise, la ruine complète de l’économie nationale. L’industrialisation rapide et la collectivisation de l’agriculture, réalisées par le Parti, qui étaient considérées par les droitiers comme une « violation de l’équilibre », non seulement n’ont pas provoqué de crise dans l’économie soviétique, mais, au contraire, ont été la base de la croissance rapide de la production et du bien-être des masses, tandis que dans le monde capitaliste avec son « équilibre » se déchaînait une crise d’une force inouïe.
Il suffirait de tirer du trésor du marxisme la théorie de la reproduction et de l’opposer à la théorie de l’équilibre des secteurs pour qu’il ne restât pas trace de cette dernière. (J. Staline : la Collectivisation du village, p. 29. Paris, Bureau d’éditions, 1930.)