Dominique Meeùs
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Louis Ségal, Principes d’économie politique :
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Les crises représentent la manifestation la plus éclatante des contradictions du capitalisme. Pendant la crise, la contradiction irréductible entre la production sociale et l’appropriation capitaliste devient tout à fait évidente.
Le capitalisme transforme la production sociale destinée à satisfaire les besoins des producteurs, en une entrave à la satisfaction de ces besoins. La classe ouvrière vit dans la misère, non parce qu’elle ne produit pas assez d’objets de consommation, mais parce qu’elle en produit trop.
Si les ouvriers manquent de travail ce n’est pas parce que les moyens de production font défaut, mais parce qu’il y en a trop. Entre les ouvriers et les moyens de production se dresse le capital qui empêche leur conjonction.
Juste au moment où le chômage, la misère et la famine arrivent à leur point culminant, les moyens de production et les objets de consommation qui pourraient être utilement employés pour combattre le chômage, la misère et la famine sont détruits par les capitalistes.
Le caractère des crises, crises d’abondance, misère à force de richesse, montre tout à fait clairement que les rapports de production capitalistes sont incompatibles, inconciliables avec l’existence de la société. Les crises montrent tout à fait clairement que l’existence de la société réclame la suppression du capitalisme, l’affranchissement de la production sociale de la domination du Capital.
Par rapport aux anciens modes de production, le capitalisme a été une forme sociale qui développe rapidement les forces productives sociales. Les crises montrent que le capitalisme a développé les forces productives à tel point qu’il en entrave déjà le développement ultérieur, et s’il les développe, c’est, au prix de destructions formidables seulement de celles-ci.
On voit, dans les crises, la contradiction entre production sociale et appropriation capitaliste arriver à l’explosion violente.
La production sociale déborde le cadre des rapports de production capitalistes et tout le mécanisme de la production capitaliste s’en trouve détraqué.
La crise c’est le choc de deux forces hostiles au sens plein de ce mot.
La production sociale, comme dit Engels, se révolte contre l’appropriation capitaliste.
Cette révolte s’exprime dans le fait que tout le mécanisme de la production capitaliste craque sous le poids des forces productives créées par lui-même.
Les forces productives de la société se heurtent à l’obstacle que présentent les rapports de production capitalistes, et, pendant la crise…
… Elles précipitent dans le désordre la société tout entière et menacent l’existence de la propriété bourgeoise. Le système bourgeois est devenu trop étroit pour contenir les richesses créées dans son sein. (K. Marx et F. Engels : le Manifeste…, p. 17.)
Pendant la crise, les contradictions de classe s’aggravent à l’extrême. Toute crise comporte une menace de révolution.
Un développement des forces productives qui diminuerait le nombre absolu des ouvriers, c’est-à-dire mettrait toute la nation à même d’opérer sa production totale en un temps moindre, amènerait une révolution parce qu’il vouerait la majorité de la population au chômage. Ce conflit apparaît en partie dans les crises périodiques. (C’est Ségal qui souligne. K. Marx : le Capital, t. 10, p. 213-214.)
C’est pourquoi Marx, Engels et Lénine, avant l’approche de chaque crise, étudiaient soigneusement les perspectives de révolution.
Une des principales causes de ce que jusqu’à présent la bourgeoisie a trouvé une issue aux crises et de ce que la possibilité de révolution créée par chaque crise ne s’est pas transformée en révolution réelle réside dans le fait que le prolétariat ne devient pas immédiatement une classe consciente et organisée, capable de se libérer de la domination du Capital : c’est seulement la longue école de la lutte de classe qui lui donne cette conscience et cette organisation.
Si chaque crise périodique porte en elle une possibilité de révolution, cela ne veut pas dire que la révolution ne puisse éclater que pendant une crise de surproduction. Le développement du capitalisme conduit à une aggravation des contradictions telles qu’elle rend la révolution possible et inévitable, indépendamment du fait qu’il y ait ou non une crise de surproduction.
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