Dominique Meeùs
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Louis Ségal, Principes d’économie politique :
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La production socialiste étant l’opposé de la production capitaliste, il existe une différence fondamentale entre la reproduction socialiste, et la reproduction capitaliste. Cette dernière est la reproduction des rapports de production capitalistes : d’une part, la force de travail est reproduite comme marchandise et de l’autre, le capital est reproduit comme une force qui domine l’ouvrier. La reproduction capitaliste élargie ou l’accumulation du capital, c’est la domination croissante du capital sur le travail, c’est l’appauvrissement de la classe ouvrière et la ruine des petits p. 153producteurs. La reproduction socialiste a un tout autre caractère. Dans la société socialiste, les moyens de production ne dominent pas le producteur, mais, au contraire, lui sont subordonnés. La reproduction socialiste élargie — ou l’accumulation socialiste — c’est la domination croissante de la société sur les forces productives matérielles, la satisfaction croissante des besoins sociaux.
Dans la société sans classes, l’ensemble de l’économie est socialiste, les classes étant abolies ainsi que les causes qui les engendrent. Dans la société socialiste, la reproduction élargie se réduit au développement de l’économie socialiste unique.
Le procès de la reproduction élargie dans la période de transition au socialisme est plus compliqué. Il embrasse non seulement l’élargissement de la production dans le secteur socialiste déjà existant, mais encore la transformation socialiste des petites économies individuelles et l’évincement, puis la liquidation des éléments capitalistes. Tout ce procès est accompagné d’une lutte de classe acharnée entre le prolétariat qui construit le socialisme et les restes du capitalisme pour entraîner la petite économie paysanne dans la voie socialiste.
La suppression des classes parasites, la suppression de l’anarchie capitaliste et la croissance de l’économie planifiée, la croissance de la productivité du travail sur la base de l’émulation socialiste et du travail de choc, la collectivisation agricole — tous ces avantages du régime économique soviétique font que, même en période de transition au socialisme, la production s’accroît bien plus rapidement que sous le capitalisme.
La base de l’accumulation socialiste et en même temps de la reconstruction socialiste de l’ensemble de l’économie soviétique est l’industrialisation socialiste. L’étape décisive de l’industrialisation a été la réalisation du premier plan quinquennal et de sa tâche principale — la création d’une technique moderne.
Cette tâche a été accomplie en quatre ans. La question fondamentale au cours de la lutte pour l’accomplissement du premier plan quinquennal était celle des rythmes de l’industrialisation et de l’accumulation socialiste.
p. 154La situation intérieure et internationale imposait des rythmes rapides d’industrialisation. Le développement du socialisme en U.R.S.S. montre la supériorité du socialisme sur le capitalisme, révolutionne les travailleurs des pays impérialistes et coloniaux et crée un danger mortel pour l’impérialisme mondial. C’est pourquoi il est entièrement inévitable que les impérialistes fassent des tentatives d’attaquer le premier pays qui construit le socialisme. La politique des rythmes accélérés d’industrialisation avait pour but de créer une base technique pour la reconstruction socialiste de l’ensemble de l’économie, de renforcer la capacité de défense du pays.
Les rythmes rapides d’industrialisation dans la période du premier plan quinquennal étaient en outre imposés par la lutte de classe à l’intérieur du pays. Pour procéder à la reconstruction socialiste de la petite économie paysanne, pour liquider les éléments capitalistes et pour abolir le terrain même qui engendre le capitalisme, il fallait créer, dans le délai le plus rapide, une base technique puissante pour l’agriculture. On risquait, autrement, de fortifier la tendance capitaliste de l’économie paysanne.
On ne saurait indéfiniment, interminablement, c’est-à-dire pendant une trop longue période, faire reposer le pouvoir soviétique et l’édification socialiste sur deux bases différentes : l’industrie socialiste la plus grande et la plus unifiée et la petite économie paysanne la plus éparpillée et la plus arriérée. (J. Staline : les Questions du léninisme, t. 2, p. 217-218.)
Les rythmes rapides d’industrialisation ont permis la victoire du premier plan quinquennal en quatre ans, victoire qui, d’une façon définitive, a résolu en faveur du socialisme la question : « Qui vaincra ? » C’est donc à juste titre que Staline disait en 1930 :
Ceux qui bavardent sur la nécessité de ralentir l’allure du développement de notre industrie sont les ennemis du socialisme, les agents de nos ennemis de classe. (J. Staline : Deux Bilans, p. 24.)
Grâce à la réalisation du premier plan quinquennal en quatre ans, une base technique nouvelle pour l’ensemble de l’économie nationale a été créée, la capacité de défense du pays renforcée. Actuellement, la plus grande partie de la production industrielle est fournie par les entreprises p. 155nouvelles, munies de la technique moderne. Mais pour l’assimilation de cette technique compliquée dans les grandes entreprises nouvelles, un certain laps de temps est nécessaire, et cela devait conduire à un certain ralentissement du rythme de l’accroissement de la production industrielle pendant les deux ou trois premières années du second plan quinquennal. La deuxième moitié du second plan est au contraire caractérisée par l’accélération de ces rythmes.
Si, pendant le premier plan quinquennal, l’accroissement annuel de la production industrielle a été en moyenne de 22 %, pendant le deuxième plan quinquennal il ne sera que d’environ 16 %.
Mais le mouvement Stakhanov, ce mouvement des grandes masses pour l’accroissement de la productivité du travail et le relèvement du niveau de vie des travailleurs, nous est un gage de ce que le second plan quinquennal sera réalisé lui aussi en quatre ans.
Les rythmes d’accroissement de la production pendant le premier et le deuxième plan quinquennal dépassent considérablement ceux du capitalisme dans ses meilleures années d’avant-guerre et d’avant la crise générale, quand l’accroissement annuel de la production industrielle arrivait à un maximum de 6 à 8 %.
Pendant le premier plan quinquennal, il a été investi dans l’industrie 25 milliards de roubles, pendant le deuxième plan quinquennal on investira 69,5 milliards de roubles.
Cette prodigieuse croissance de l’accumulation socialiste constitue la base de l’amélioration des conditions d’existence de la classe ouvrière et des masses travailleuses.
Tandis que l’accumulation du capital provoque l’appauvrissement de la classe ouvrière, l’accumulation socialiste permet d’élever le niveau de vie de la classe ouvrière et des masses travailleuses.
Nous avons déjà montré dans le chapitre 4 que la situation de l’ouvrier en U.R.S.S. se distingue radicalement de sa situation dans l’usine capitaliste. Voici quelques autres données sur le niveau de vie de la classe ouvrière.
En régime capitaliste, la croissance de la composition organique du capital rend superflue une partie de plus en plus considérable de la classe ouvrière.
p. 156Avec l’accumulation du capital produite par elle-même, la population ouvrière produit donc, dans des proportions sans cesse croissantes, les moyens de la surpopulation relative. (K. Marx : le Capital, t. 4, p. 96.)
En U.R.S.S. une telle situation est rendue impossible par le système même de l’économie. En appliquant la plus large mécanisation des procès de travail on remplace le travail humain par la machine, et on emploie la main d’œuvre disponible pour développer d’autres branches d’industrie. Le chômage qui existait encore en 1928-29 avait pour source la différenciation de la paysannerie. Mais depuis la reconstruction socialiste du village, depuis la liquidation du koulak en tant que classe sur la base de la collectivisation intégrale, on a liquidé définitivement la source même du chômage. Le chômage a disparu en U.R.S.S. en 1930. C’est un des résultats principaux du premier plan quinquennal.
En régime capitaliste, l’armée de réserve est un instrument entre les mains de la bourgeoisie pour réduire les salaires. En U.R.S.S., les salaires ont suivi le mouvement ascensionnel même alors que le chômage n’était pas encore liquidé.
En régime capitaliste, le mouvement des salaires tend à leur baisse au-dessous de la valeur de la force de travail. En U.R.S.S., l’accumulation socialiste a pour effet la satisfaction grandissante des besoins qui s’accroissent à leur tour rapidement.
Le salaire moyen annuel des ouvriers et employés de la grande industrie s’est accru de 67 % pendant la période de 1928-32.
La partie socialisée du salaire accuse une augmentation considérable. Ainsi, le fonds de l’assurance sociale a passé de 1 050 millions en 1928 à 4 120 millions en 1932. Le nombre des salariés ayant fait un séjour dans les maisons de repos et sanatoria a passé de 500 000 en 1928-29 à 2,3 millions en 1932. En 1928, il y avait dans les entreprises 1 580 infirmeries et en 1932, 5 674. Les dépenses pour la protection du travail ont passé de 67 millions de roubles en 1928 à 169,5 millions en 1932.
Les dépenses pour la construction de logements, d’écoles, d’hôpitaux, crèches, établissements de bains, etc., ont passé de 3 371 millions de roubles en 1927-28 à 9 733 millions en 1932.
p. 157Enfin, croissance prodigieuse du niveau culturel des masses (le pourcentage d’illettrés est passé de 50 en 1926 à 10 en 1933) par suite de l’introduction de l’enseignement primaire gratuit et obligatoire, de l’accroissement du nombre des hautes écoles et de celui des élèves, de l’augmentation de l’enseignement dans les entreprises, du relèvement de la qualification des ouvriers, de la croissance de la couche des techniciens prolétariens, du tirage de 33 millions d’exemplaires de journaux, etc., etc. En 1932, jusqu’à 80 millions de personnes suivaient des cours de toute espèce. C’est une véritable révolution culturelle qui s’accomplit en U.R.S.S.
Un des indices les plus éclatants de l’élévation rapide du niveau de vie des masses est la baisse de la mortalité. Par rapport à 1913, la mortalité est tombée en 1931 de 31,5 %. Cette baisse est encore plus accentuée dans les principaux centres prolétariens : à Moscou, 48,8 % ; à Ivanovo, 41,8 % ; à Iaroslav, 52,8 %.
Le niveau de vie de la classe ouvrière et des masses laborieuses doit s’élever encore plus dans la deuxième période quinquennale. Les salaires réels de 1927 seront le double de ceux de 1932, ainsi que les dépenses pour les assurances sociales, l’instruction, la protection de la santé et les services culturels et sociaux. Le nombre des travailleurs bénéficiant de l’alimentation publique augmentera de deux fois et demie. Les constructions de logements se chiffreront par 12,5 milliards de roubles, soit le triple par rapport au premier plan. Le total des dépenses allouées à toute sorte de constructions sociales et culturelles se traduira par 80 milliards de roubles, soit le triple des dépenses correspondantes du premier plan.
En régime capitaliste,
L’accumulation de la richesse à un pôle signifie donc l’accumulation, au pôle opposé, de misère, de souffrances, d’esclavage, d’ignorance, d’abrutissement et de dégradation morale. (K. Marx : le Capital, t. 4, p. 116-117.)
En U.R.S.S., la richesse créée par la classe ouvrière et les kolkhoziens appartient à la collectivité et non aux capitalistes. C’est pourquoi l’accumulation socialiste crée une base pour l’élévation du bien-être, et pour un puissant essor du niveau matériel et culturel et des facultés créatrices des masses.
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