Dominique Meeùs
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Louis Ségal, Principes d’économie politique :
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L’entrée du capitalisme dans sa dernière et suprême étape — dans l’étape de l’impérialisme — signifie, en général, un renforcement de la réaction politique.
La superstructure politique qui coiffe la nouvelle économie, le capitalisme monopoliste (l’impérialisme est le capitalisme des monopoles), c’est le tournant à partir de la démocratie vers la réaction politique. À la libre concurrence correspond la démocratie. Au monopole correspond la réaction politique.
La crise générale du capitalisme signifie un renforcement aigu de la réaction politique. Lorsque se produit la décomposition du capitalisme et que la classe ouvrière se libère de plus en plus des illusions démocratiques et parlementaires, il devient de moins en moins possible de retenir la classe ouvrière dans la soumission en la trompant par ces illusions. Les méthodes de répression contre la classe ouvrière directement et ouvertement renforcées s’avancent au premier plan. Le capitalisme avait toujours appliqué ces méthodes, surtout après sa transformation en capitalisme impérialiste, mais ce ne sont pas elles qui prédominaient dans le système des moyens à l’aide desquels la bourgeoisie réalisait sa dictature. C’étaient les formes démocratiques p. 351parlementaires de la dictature de la bourgeoisie qui prédominaient. Avec la venue de la crise générale du capitalisme, ce tournant de la démocratie à la réaction politique qui avait commencé déjà dans la période d’avant-guerre de l’impérialisme, s’achève et trouve son expression dans la croissance du fascisme.
Dans les conditions de la crise générale du capitalisme, à partir de la démocratie bourgeoise, qui représente la forme masquée de la dictature de la bourgeoisie, se développe le fascisme, qui est la dictature terroriste ouverte des éléments les plus chauvins et les plus impérialistes du capital financier. Par la voie de l’établissement de la dictature fasciste, le capital financier tente de trouver une issue à la crise aux dépens de la classe ouvrière et des travailleurs. La bourgeoisie a besoin du fascisme pour préparer et pour mener la guerre impérialiste et l’intervention contre l’U.R.S.S. et pour écraser la révolution qui s’avance dans ses propres pays. Le fascisme est un indice de la faiblesse de la bourgeoisie, un symptôme du fait que les bases mêmes du régime capitaliste sont ébranlées.
Il faut regarder la victoire du fascisme en Allemagne, non seulement comme un signe de faiblesse de la classe ouvrière et le résultat des trahisons perpétrées contre celle-ci par la social-démocratie qui a frayé la route au fascisme. Il faut la considérer également comme un signe de faiblesse de la bourgeoisie, comme un signe montrant que cette dernière n’est plus en état d’exercer son pouvoir au moyen des anciennes méthodes de parlementarisme et de démocratie bourgeoise, ce qui l’oblige à recourir, dans sa politique intérieure, aux méthodes de domination par la terreur, comme un signe prouvant qu’elle n’a plus, la force de trouver une issue à la situation actuelle sur la base d’une politique extérieure de paix, ce qui l’oblige à recourir à la politique de guerre. (J. Staline : Deux Mondes, 2e édit., p. 12-13. Bureau d’éditions, 1934.)
Du fait que le fascisme est le fruit de la crise générale du capitalisme et un symptôme de la faiblesse de la bourgeoisie, il ne s’ensuit pas du tout, certes, que la dictature fasciste soit une étape inévitable qui précède la révolution, que l’instauration de la dictature fasciste soit une prémisse de la révolution prolétarienne, que plus vite la dictature fasciste sera instaurée — plus vite le fascisme se démasquera p. 352devant les masses et plus il sera facile de faire la révolution.
Ces théories de gauche représentent, en réalité, la passivité opportuniste devant l’offensive de la bourgeoisie, la capitulation social-démocrate, masquée par des phrases radicales.
L’histoire condamne le capitalisme à la ruine. L’impérialisme, c’est le capitalisme mourant, pourrissant. Mais la bourgeoisie, comme une bête blessée, rassemble toutes ses forces pour écraser son ennemi. Le fascisme est l’offensive déchaînée de la bourgeoisie contre la classe ouvrière. Le capitalisme ne meurt pas de lui-même. Cette « mort » arrive par la voie de son renversement révolutionnaire. Combien de temps ce processus durera-t-il, et combien de victimes coûtera-t-il à la classe ouvrière, — cette question n’est pas du tout indifférente, comme n’est pas indifférente non plus la question de la forme sous laquelle la bourgeoisie réalise sa dictature, — la forme de la démocratie bourgeoise qui donne à la classe ouvrière plus de possibilités pour organiser sa lutte contre le capitalisme, ou la forme de la dictature terroriste fasciste.
Seule, la lutte révolutionnaire tranche la question de savoir si la bourgeoisie réussira ou non à établir sa dictature fasciste dans l’un ou l’autre pays. De même, seule la lutte révolutionnaire tranche la question de savoir si la bourgeoisie réussira ou non à prolonger sa domination, qui signifie actuellement les plus grandes souffrances pour la classe ouvrière. Le prolétariat pourra vaincre la bourgeoisie non dans l’attente opportuniste d’un krach « spontané », automatique, du capitalisme, mais seulement en ripostant à l’offensive fasciste de la bourgeoisie par une contre-offensive révolutionnaire décisive du front unique.
Le 7e congrès de l’Internationale communiste a montré la nécessité d’une lutte décisive aussi bien contre la sous-estimation du danger du fascisme, que contre la surestimation des forces du fascisme :
En soulignant l’accroissement de la menace fasciste dans tous les pays capitalistes, le 7e congrès de l’Internationale communiste met en garde contre toute sous-estimation du danger fasciste. Le congrès repousse également les conceptions fatalistes sur l’inéluctabilité de la victoire du fascisme ; ces conceptions foncièrement erronées ne peuvent qu’engendrer la passivité et affaiblir la lutte de masse contre le fascisme. La classe ouvrière peut empêcher la victoire du fascisme si elle parvient à réaliser l’unité de sa lutte et si, développant à temps p. 353ses actions de combat, elle ne permet pas au fascisme de s’affermir, si elle sait, sous une direction révolutionnaire juste, grouper autour d’elle les grandes masses des travailleurs des villes et des campagnes. (Résolutions. Contre la guerre et le fascisme : l’Unité, p. 9. Bureau d’éditions, 1935.)
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