Dominique Meeùs
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Les monopoles bancaires

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Parallèlement à la concentration et à la centralisation du capital dans l’industrie, il se produit également une concentration et une centralisation des banques. D’une part, la concurrence existe aussi dans le domaine du crédit et elle conduit à la concentration, et d’autre part la croissance de la concentration industrielle amène la croissance de la concentration des banques, qui, comme nous l’avons vu (voir le chapitre 7), jouent un rôle d’intermédiaire p. 291dans la répartition des capitaux temporairement disponibles entre les capitalistes de l’industrie et du commerce.

Les données suivantes montrent le degré atteint par la concentration de banques vers le commencement du 20e siècle, c’est-à-dire à l’époque où le capitalisme s’est définitivement transformé en impérialisme. En Allemagne, il y avait, en 1912, 172 banques au capital dépassant un million de marks. Sur ce nombre, 9 grandes banques de Berlin, c’est-à-dire 5,2 % du nombre total des banques (sans compter les petites au capital inférieur à un million de marks), concentraient 49 % de tous les dépôts. En 1929, le nombre des grandes banques de Berlin était déjà seulement de 5, et elles concentraient 67,5 % de tous les dépôts. En Angleterre, le nombre des banques est tombé de 104 en 1890 à 43 en 1913 et le total des ressources dont elles disposaient est passé, dans ce même laps de temps, de 464 millions de livres sterling à 963 millions. Cinq des plus grandes banques de Londres (que l’on appelle the big five) concentraient en 1900 27 % de tous les dépôts de banque du pays, en 1913, 39,7 % et en 1924, déjà 72,4 %. Dans tous les autres pays impérialistes, nous observons une pareille centralisation des banques.

De même que dans l’industrie, la concentration, au plus haut degré de son développement, mène directement au monopole, de même, dans le domaine des banques, à un certain degré de son développement, la concentration engendre le monopole bancaire.

Lorsque les capitaux disponibles cessent de rester dispersés dans un grand nombre de petites banques et se concentrent dans quelques grandes banques, ces dernières obtiennent ainsi un pouvoir énorme sur l’ensemble de l’économie. La croissance quantitative des opérations et des capitaux des banques conduit inévitablement à un changement radical dans le rôle de ces banques.

En concentrant les comptes courants de tous les capitalistes, une petite poignée de grandes banques reçoit la possibilité de connaître l’état de leurs affaires, de les contrôler, et, enfin, en aggravant ou en améliorant les conditions du crédit, de diriger dans un sens correspondant l’activité de l’industrie. Mais cela signifie que…

Au fur et à mesure que les banques se développent et se concentrent dans un petit nombre d’établissements, elles cessent d’être de modestes intermédiaires pour devenir de p. 292tout-puissants monopoles disposant de la presque totalité du capital-argent de l’ensemble des capitalistes et des petits patrons, ainsi que de la plupart des moyens de production et des sources de matières premières d’un pays donné, ou de toute une série de pays.

Lénine, L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, Œuvres, tome 22, p. 228.

La transformation des banques de simples intermédiaires en de tout-puissants monopoles accélère extrêmement à son tour le procès de concentration et de formation des monopoles dans l’industrie elle-même. En premier lieu, les banques monopolistes accordent des crédits à des conditions plus avantageuses aux grandes entreprises, organisées en unions monopolistes. En second lieu, les banques elles-mêmes de plus en plus placent directement dans l’industrie les capitaux dont elles disposent.

Cette liaison grandissante entre l’industrie et les banques et l’investissement direct par les banques de leurs capitaux dans l’industrie sont extrêmement facilités grâce au fait qu’à l’époque de la transformation du capitalisme en capitalisme monopoliste, les sociétés par actions ont pris une très grande extension.

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