Dominique Meeùs
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Tout capital est de la plus-value accumulée

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Admettons, dira l’économiste bourgeois, qu’à la fin de la seconde semaine le capitaliste acquitte le salaire avec l’argent reçu de la vente de la marchandise produite pendant la semaine précédente. Mais il faut considérer qu’à la fin de la première semaine, le capitaliste n’a pas encore vendu sa marchandise et que, par conséquent, le salaire versé à la fin de cette première semaine est une valeur avancée par le capitaliste à l’ouvrier. Cette objection habituellement émise par les économistes bourgeois tend à démontrer que ce n’est pas l’ouvrier qui fait crédit au capitaliste, en touchant son salaire après que le capitaliste a usé de sa force de travail, mais que le capitaliste fait crédit à l’ouvrier, en lui versant le salaire avant la vente de la marchandise. Les économistes bourgeois veulent ainsi prouver que les capitalistes ne payent pas le salaire avec une partie de la valeur créée par la classe ouvrière, ils s’attachent à démontrer indirectement que le capital (le salaire étant une partie du capital, le capital variable) est honnêtement gagné par les capitalistes.

Mais cette objection ne tient pas debout. Nous avons déjà vu au début du chapitre 4 que la production capitaliste a pris naissance à la suite du pillage, de l’expropriation des petits producteurs immédiats (l’accumulation primitive). Par conséquent, déjà au point de vue historique, le capital c’est du travail d’autrui accumulé. Mais même en admettant un instant qu’un capitaliste ou même tous les capitalistes aient accumulé honnêtement, par leur labeur, leur capital initial, il n’en est pas moins vrai que, même dans le procès de reproduction simple, tout capital devient de la plus-value accumulée.

Prenons à titre l’exemple, un capital de 10 000 francs qui crée annuellement une plus-value de 2 000 francs entièrement consommée par le capitaliste. En cinq ans, ce dernier aura consommé la valeur de 10 000 francs, soit le montant de son capital. Sans doute, après cela, il reste au capitaliste le capital de 10 000 francs. Mais par sa valeur ce capital n’est déjà plus rien d’autre que de la plus-value accumulée. La situation ne change nullement du fait que le capitaliste estime avoir dépensé non la valeur du capital mais la plus-value.

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Si quelqu’un consomme tout ce qu’il possède à se charger de dettes dont le montant égale celui de ses propriétés, l’ensemble de ses propriétés ne représentera que l’ensemble de ses dettes. (K. Marx : le Capital, t. 4, p. 15.)

On voit donc que même en admettant que le capitaliste ait gagné son capital initial par son propre labeur, son capital se convertit tôt ou tard en travail d’autrui accumulé. Le salaire n’est que la forme monétaire de la valeur des moyens de subsistance de l’ouvrier, que les capitalistes versent à la classe ouvrière sur le produit créé par cette dernière.

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