Dominique Meeùs
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Louis Ségal, Principes d’économie politique :
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Le capitaliste achète les moyens de production et la force de travail. Les moyens de production se composent des objets les plus différents, mais ils peuvent tous être ramenés à deux groupes essentiels.
I. L’objet de travail. — C’est la matière qui sert à la production d’une marchandise donnée. Ainsi, dans la production du fil, l’objet de travail c’est le coton, la laine, le lin ; dans la production des tissus, l’objet de travail c’est le fil, dans la production du fer, l’objet de travail, c’est le minerai, dans la production des machines, l’objet de travail, c’est le fer, etc. Lorsque l’objet de travail est déjà un produit du travail, il porte le nom de matière première, par exemple, le coton, le fil, le minerai de fer, le fer. Mais le bois dans une forêt vierge, les gisements de charbon sont des objets de travail sans être des matières premières.
II. Les moyens de travail avec lesquels on transforme les objets de travail : les machines, les instruments, les outils, p. 82il faut y ranger également les bâtiments, qui jouent un rôle de condition matérielle dans la production.
Parmi ces moyens de production on classe aussi les matériaux auxiliaires : combustible, huiles lubrifiantes, vernis, etc.
Supposons que nous ayons à produire du fil de coton ; que : 1. un kilogramme de coton renferme déjà une heure de travail ; 2. qu’au cours de la transformation d’un kilo de coton en un kilo de fil, on use une quantité de machines, d’instruments, d’édifices et de matériaux auxiliaires qui contient un quart d’heure de travail ; 3. que pour la transformation d’un kilo de coton en un kilo de fil, il faille une heure de travail socialement nécessaire ; 4. que la valeur de la force de travail soit de quatre heures et enfin : 5. qu’une heure de travail social ait une expression monétaire : 1 franc.
Dans ces conditions, quelle sera la valeur d’un kilo de fil ?
Elle se composera de :
Heures | Francs | ||
1. La valeur d’un kilo de coton | 1 | 1 | |
2. La valeur des moyens de production usés | ¼ | 0,25 | |
3. La nouvelle valeur créée par l’ouvrier fileur | 1 | 1 | |
Total : | 2 ¼ | 2,25 |
Si l’ouvrier n’a fait que quatre heures de travail, c’est-à-dire juste le temps nécessaire à la production de ses moyens de subsistance, c’est-à-dire la reproduction de la valeur de sa force de travail, on aura le résultat que voici. En quatre heures, l’ouvrier transforme quatre kilos de coton. La valeur de ces quatre kilos produits se composera comme suit :
Heures | Francs | ||
1. La valeur de quatre kilos de coton | 4 | 4 | |
2. La valeur des moyens de production usés | 1 | 1 | |
3. La nouvelle valeur créée par l’ouvrier fileur | 4 | 4 | |
Total : | 9 | 9 |
Combien coûtent à notre capitaliste ces quatre kilos de fil produits ? Il a acheté les moyens de production et la force de travail à leur valeur, ils lui ont donc coûté : 1. 4 kilos de coton : 4 francs ; 2. l’usure de l’outillage : 1 franc et 3. la force de travail : 4 francs ; total : 9 francs. Par conséquent, si l’ouvrier a fait quatre heures, le capitaliste n’aura aucune plus-value.
Mais l’ouvrier avait vendu sa force de travail au capitaliste et c’est ce dernier qui en dispose. Or, la particularité de la force de travail est de fonctionner plus de temps qu’il ne faut pour la reproduction de sa propre valeur. Si, pour la production des moyens de subsistance de l’ouvrier, il faut quatre heures de travail, l’ouvrier peut travailler plus de quatre heures, car
… la valeur de la force de travail est déterminée par la quantité de travail nécessaire pour son entretien ou sa reproduction, mais l’usage de cette force de travail n’est limité que par l’énergie agissante et la force physique de l’ouvrier.
Si l’ouvrier, ayant consommé les moyens de subsistance nécessaires, peut travailler, mettons 8 heures, il devra travailler 8 heures, bien que ces moyens de subsistance ne contiennent que quatre heures de travail, car il a vendu au capitaliste sa force de travail dont la valeur d’usage forme 8 heures de travail. Or, la valeur de la quantité de fil produit en 8 heures se composera de : 1. la valeur des 8 kilos de coton travaillés, soit 8 heures ou 8 francs ; 2. la valeur de l’outillage usé, soit 1/4 d’heure multiplié par 8 soit 2 heures ou 2 francs ; et 3. la nouvelle valeur créée par le fileur et qu’il avait ajoutée au coton au cours de la transformation du coton en fil, soit 8 heures ou 8 francs. Total : 18 heures ou 18 francs. Or, le capitaliste a dépensé pour la production de ces 8 kilos de fil : 1. 8 francs pour le coton ; 2. 2 francs, l’usure de l’outillage ; et 3. 4 francs pour la main-d’œuvre ; total : 14 francs. Il vend les 8 kilos de fil à 18 francs, c’est-à-dire à leur valeur, et il réalise une plus-value de 4 francs. Il a acheté des moyens de production et de la force de travail à leur valeur, il vend des marchandises également à leur valeur, et il n’en réalise pas moins une plus-value.
La valeur initiale (14 francs) a subi un accroissement parce que la valeur créée par l’ouvrier dans la production p. 84dépasse celle de sa force de travail. Cet excédent créé par l’ouvrier sur la valeur de sa force de travail ou la différence entre la valeur créée par l’ouvrier et la valeur de sa force de travail forme la plus-value.
Une partie de sa journée, l’ouvrier travaille gratuitement pour le capitaliste, celui-ci s’approprie — sans débours — la valeur créée par l’ouvrier pendant cette partie de la journée. L’accroissement de la valeur s’opère grâce à l’exploitation de l’ouvrier.