Dominique Meeùs
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Louis Ségal, Principes d’économie politique : versions, table des matières, index des notions — Retour au dossier marxisme

La première division de la société en classes

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Tout cela eut pour effet d’augmenter dans une grande mesure la productivité de travail, le pouvoir de l’homme sur la nature et sa certitude du lendemain. Mais ces nouvelles forces productives de la société dépassaient déjà les cadres du communisme primitif.

L’accroissement de la production dans toutes les branches — élevage du bétail, agriculture, artisanat domestique — donna à la force de travail humaine la capacité de produire plus qu’il ne lui fallait pour sa subsistance. Elle accrut en même temps la somme quotidienne de travail qui incombait à chaque membre de la gens, de la communauté domestique ou de la famille conjugale. Il devint souhaitable de recourir à de nouvelles forces de travail. La guerre les fournit : les prisonniers de guerre furent transformés en esclaves. En accroissant la productivité du travail, donc la richesse, et en élargissant le champ de la production, la première grande division sociale du travail, dans les conditions historiques données, entraîna nécessairement l’esclavage. De la première grande division sociale du travail naquit la première grande division de la société en deux classes : maîtres et esclaves, exploiteurs et exploités.

Engels, L’Origine de la famille, de la propriété privée et de l’État, Éditions du Progrès, Moscou, 1975, p. 192. (C’est Ségal qui souligne.)

Les esclaves, c’étaient des gens étrangers au clan et qui n’en faisaient pas partie. Le développement des forces productives et l’apparition de l’esclavage devaient amener l’inégalité entre les membres du clan, en premier lieu entre l’homme et la femme.

Gagner la subsistance avait toujours été l’affaire de l’homme ; c’est lui qui produisait les moyens nécessaires à cet effet et qui en avait la propriété. Les troupeaux constituaient les nouveaux moyens de gain ; ç’avait été l’ouvrage de l’homme de les apprivoiser d’abord, de les garder ensuite. Aussi le bétail lui appartenait-il, tout comme les marchandises et les esclaves troqués contre du bétail. Tout le bénéfice que procurait maintenant la production revenait à l’homme ; la femme en profitait, elle aussi, mais n’avait point de part à la propriété.

Engels, L’Origine…, p. 192.

Plus tard apparaît l’inégalité entre les chefs de diverses familles. Le développement du troc consécutif à la division croissante du travail y contribuait. L’emploi du fer augmenta la variété des outils et des objets en usage. p. 13L’agriculture prit également de l’extension grâce à l’introduction de la charrue au soc de métal ; aux céréales venaient s’ajouter d’autres cultures.

Une activité si diverse ne pouvait plus être pratiquée par un seul et même individu : la seconde grande division du travail s’effectua : l’artisanat se sépara de l’agriculture.

Engels, L’Origine…, p. 194.

La différence entre riches et pauvres s’établit à côté de la différence entre hommes libres et esclaves : nouvelle scission de la société en classes qui accompagne la nouvelle division du travail. Les différences de propriété entre les chefs de famille individuels font éclater l’ancienne communauté domestique communiste partout où elle s’était maintenue jusqu’alors et, avec elle, la culture en commun de la terre pour le compte de cette communauté. Les terres arables sont attribuées usage aux familles conjugales afin qu’elles les exploitent, d’abord à temps, plus tard une fois pour toutes.

Engels, L’Origine…, p. 195.

La transition vers la propriété privée s’accomplit.

La densité grandissante de la population, due à la productivité accrue du travail, et l’augmentation des liens entre les différentes tribus conduisent peu à peu à la fusion de beaucoup de clans et de tribus en peuples. D’autre part, la désagrégation de la communauté primitive, l’inégalité croissante entre ses membres et surtout l’application généralisée du travail des esclaves, tout cela aboutit à la formation de l’État comme organisme d’oppression de la classe exploitée par la classe exploiteuse.

Sous la pression des forces productives qu’il avait engendrées, le régime communiste primitif se décomposa et céda la place à une nouvelle société, divisée en classes.

Les adversaires du communisme affirment que le communisme primitif n’aurait jamais existé, que la propriété privée et la division de la société en classes étaient en vigueur dès le début de l’existence de la société. Ils s’efforcent de montrer que la propriété privée est inséparable de la nature de l’homme même, qu’il ne peut y avoir d’autre propriété, que la société était toujours divisée en classes et qu’une société sans classes est inconcevable. La bourgeoisie et ses agents, dans leur lutte contre le communisme moderne, ont intérêt à nier le communisme primitif.

Déjà en 1845, Marx et Engels ont démontré (dans l’Idéologie allemande) que le communisme primitif était la première forme de la société. Trente ans après (en 1877), en dehors des recherches effectuées par Marx et Engels, le p. 14savant américain Morgan est arrivé à la même conclusion, après avoir longuement étudié les tribus sauvages et demi-sauvages de l’Amérique et des îles du Pacifique. Les restes du communisme primitif subsistent encore de nos jours chez certains peuples sous la forme du communisme agraire : les communautés rurales possèdent en commun la terre et en distribuent les lots pour une jouissance temporaire à leurs membres. L’existence du communisme primitif, comme, phase initiale du développement de tous les peuples, ne saurait plus être mise en doute.

Examinons maintenant le système de l’esclavage, né des ruines du communisme primitif.

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