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De 1970 à 1980, ont éclaté, en Belgique, une série de conflits du travail ayant pour objet les discriminations dans les salaires, les classifications et la défense de l’emploi. Ils ont été soutenus et répercutés par les groupes féministes : grèves de jeunes ouvrières de l’industrie textile systématiquement rangées dans la catégorie des travailleuses non qualifiées avec les bas salaires correspondants (Herk-la-Ville ; Lee à Saint-Nicolas-Waes3) ; grèves pour l’égalité de salaires soutenues par les Marie Mineur chez Keramis à La Louvière, ou chez Kwatta… ; nouvelle grève à la FN de Herstal en 1974 ; occupation de l’usine Salik menacée de fermeture avec production et vente sauvage de jeans ; expérience d’autogestion au Balai Libéré ou chez Daphica à Ere… grève des intérimaires de chez Hertz…
La lutte pour l’égalité professionnelle s’amorce aussi sur le plan légal à la fin des années soixante. Éliane Vogel, spécialiste du droit social international, affirme en effet, dès cette époque, que l’article 119 du traité de Rome est d’applicabilité directe dans les divers états membres de la Communauté européenne.
Des syndicalistes comme Émilienne Brunfaut, Annie Massay, Jacques Yerna souhaitent amener le problème devant les tribunaux. Les syndicats ayant cosigné des conventions salariales discriminatoires, il semble difficile d’attaquer sur le plan de l’égalité de salaires. Il n’en est pas de même de la sécurité sociale et en particulier des allocations de chômage, dont les montants sont répartis en deux catégories selon qu’il s’agit d’un homme ou d’une femme. Un premier procès a lieu à Charleroi. Éliane Vogel construit son argumentation sur l’article 6 de la Constitution : « Tous les Belges sont égaux devant la loi4 ». Le procès est gagné et le ministre du Travail, le socialiste Louis Major, doit revoir ses textes. En novembre 1971, les catégories hommes et femmes sont supprimées. Les indemnités sont désormais calculées en pourcentage du salaire, un mode de calcul qui défavorise aussi les femmes puisqu’elles gagnent en général moins que les hommes5.