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Le comité À travail égal, salaire égal donne son appui dès le début au projet Maison des femmes. Plusieurs de ses participantes y sont actives.
Outre ses réunions mensuelles, le comité expose le résultat de ses travaux lors d’une conférence de presse qui a lieu en février, date anniversaire de la grève des femmes à Herstal. Les titres de ces exposés sont explicites : en 1975, « La femme renvoyée dans ses foyers » ; en 1976, « Année de la femme, cadeau empoisonné ». Publiés dans le Bulletin, ils alimentent des séminaires de réflexion organisés par la Maison.
À sa fondation, en 1972, le CFRP (Centre de formation à la responsabilité politique) organise ses cours au Centre Féminin, 16, avenue de la Toison d’Or. Chaque jeudi, à travers des exposés d’abord, des séances de discussion ensuite, il poursuit son but de formation permanente : « celle-ci ne pouvant être une nouvelle scolarisation, un endoctrinement mais bien une socialisation, un moyen de se politiser au lieu d’être politisé. C’est un apprentissage de la liberté de penser ; pouvoir en toute connaissance de cause, accepter ou rejeter les habitudes et les traditions politiques de son milieu, de sa famille, et ce, après réflexions et analyses », écrit Liliane Cludts35.
Très fidèle à ses engagements vis-à-vis de la Maison, notamment pour les travaux de peinture, d’entretien (ce poison !), le groupe intervient peu dans les événements qui forment la variété des jours et des problèmes. Ses organisatrices s’étonnent parfois du désordre organisé qui règne dans les locaux, mettant leur ponctualité à l’épreuve. Par ailleurs, celles-ci animent à Rixensart le groupe Présence.
Des réunions préparatoires aux Cahiers ont lieu dans la Maison. Plusieurs séminaires pour élaborer le cahier « Les femmes accusent l’Église », le cahier « Le travail, c’est la santé ». Longue réunion, émouvante et révélatrice, en vue du cahier « Mères femmes ».
Malgré ces échanges, le groupe Cahiers du Grif est ressenti, à tort ou à raison, comme intellectuel. En contrepartie, les animatrices du Grif trouvent que la Maison manque parfois d’ambition… Lors de son interview, Hedwige Peemans-Poullet évoque ses impressions : « C’était une grande joie d’avoir notre maison. J’ai participé à son aménagement et j’ai aimé le côté festif du projet. Ma seule réticence concernait les ateliers : pourquoi les femmes doivent-elles apprendre la plomberie ou l’électricité pour se libérer ? C’est une idée curieuse. […] L’intégration dans la maison fut révélatrice du comportement domestique des femmes. Le manque d’affabilité, d’accueil, était une façon de ne pas reproduire ce qu’on fait chez soi. De même, le refus de la préparation de la nourriture : ne pas avoir plaisir à manger, préparer n’importe quoi. Pour moi, le jour où je fais à manger, il faut que ce soit agréable. Je ne suis pas pour la collectivisation du travail ménager mais pour le partage. Si une militante en a marre de faire le café, qu’elle instaure un tour. Il faut toujours essayer d’obtenir le partage. Une partie de la vie privée est impossible à collectiviser. […] Quoi qu’il en soit, c’était une force d’avoir une maison où tout le monde se trouvait ensemble36. »
La force d’une maison qui rassemble, c’est aussi de pouvoir mettre sur pied rapidement une action requise par les événements. Pour mémoire, le groupe Aide aux prisonnières du Chili, le soutien à l’action des hôtesses de l’air, la journée de la fête des Mères, etc.
Brassage d’expériences et d’idées, au rythme des allées et venues à travers le long couloir et jusque dans le « bistrot », lieu de tous les possibles. Telle fut la première Maison des femmes.