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Avec un nom qui prête aux jeux de mots7, une équipe à la fois soudée et très ouverte aux apports extérieurs, une rigueur dans l’analyse et une audace dans le ton, les Cahiers du Grif apparaissent d’emblée comme une publication originale. Le succès est d’autant plus immédiat qu’il n’y a alors rien d’équivalent en Belgique ni en France. Les exemplaires du deuxième numéro, que les éditrices vont timidement déposer elles-mêmes, à Paris chez Maspero, sont vendus en un jour8… Et dès la troisième parution, des intellectuelles françaises célèbres (Julia Kristeva, Françoise d’Eaubonne, Odette Thibaut, Hélène Cixous…) collaborent à ces cahiers où leurs signatures côtoient celles d’illustres inconnues…
L’audience des cahiers dépasse tout de suite le cercle des militantes. Le choix de thèmes divers accentue encore la pénétration des cahiers et de la pensée féministe, dans différents milieux. Et l’on retrouve, parmi le public, des hommes et des femmes qu’aurait heurtés la violence verbale du MLF ou l’originalité d’Et ta sœur ?9.
En 1978, les Cahiers du Grif cessent de paraître. « C’était une erreur de calcul de détruire un outil international comme celui-là, mais notre conception du désir était en dehors de l’institutionnel : quand on n’a plus envie de faire quelque chose, on l’arrête10. »
Pourquoi ce sabordage ? « Usure, dispersion, chacune avait envie de faire autre chose. Voyelles se créait, l’équipe s’effilochait, les temps avaient changé… »
L’équipe du Grif se recentre sur la recherche, sous l’appellation d’Université des femmes, puis se scinde en deux groupes. Le premier, autour de Françoise Collin, reprend la parution des cahiers en 1982 ; le second, autour d’Hedwige Peemans-Poullet, continue le travail de l’Université des Femmes, ouvre un centre de documentation et lance sa propre publication Chroniques féministes (à partir de 1981).