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Et la fête ?

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Les néerlandophones craignent que l’atmosphère exclusivement dénonciatrice qui prédomina à Paris décourage les nouvelles venues ; elles voudraient que ce jour soit en même temps une fête. Les francophones sont d’accord pour les chants et les sketches qui illustrent la prise de conscience, mais regrettent qu’on prête par exemple la scène à une chanteuse professionnelle. Celle-ci est féministe — et son choix de chansons le prouve — mais c’est aussi une vedette au sein de la société « capitaliste et phallocrate » que les femmes dénoncent. Puisque le récital a lieu en flamand devant un auditoire flamand, les francophones acceptent de faire la sourde oreille.

Dans la même optique de fête féministe, les Flamandes proposent une exposition de peinture à laquelle toute femme artiste peut participer du moment qu’elle admet les revendications féministes. Double critique du côté francophone : les artistes sont des artistes ; pas question d’exposer des « ouvrages de dames » pour la seule raison qu’on adhère en principe à la charte féministe. De toute manière, exposer c’est participer à la culture bourgeoise, c’est en accepter les règles et les critères. La discussion est chaude mais on parvient à s’entendre en désignant celles qui présideront au choix des œuvres5. Beaucoup d’artistes, même parmi celles qui sont déjà bien cotées, ont répondu à l’appel, montrant leur solidarité pour le mouvement de libération de toutes les femmes. Il n’empêche, au dernier moment, des pancartes contestataires sont épinglées entre les œuvres : « Qui est ici ? interroge l’une d’elles. Celles qui ont eu des chances : celle de naître dans une famille, de vivre dans un milieu culturellement privilégié, ou d’avoir assez d’argent… »

La lutte des femmes ne gomme pas les autres luttes ni les autres causes, au contraire. La difficulté pour les intellectuelles de gauche, c’est de mener de front deux luttes qui se traversent : peut-on militer en faveur de la libération de la femme bourgeoise alors que celle-ci profite du travail de l’ouvrier ? Libération culturelle et libération sociale peuvent-elles former une seule et même cause ?

Notes
5.
Lydia De Pauw, qui est à l’initiative de l’exposition, Joan Shore, des Women Overseas for Equality, et Anne Thyrion, du comité À travail égal, salaire égal.
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