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Vient de sortir le cinquième livre d’un(e) écrivain(e) qui est des nôtres, Marie Denis. Un livre joyeux, fort, chaleureux, éclatant d’un talent fait de mots qu’elle assemble comme personne, plein d’expressions inattendues et heureuses et surtout débordant de cette sensibilité qui est faite d’observation, de finesse, du regard aigu de ramasseuse du quotidien.
Un livre qui met tout ensemble, les femmes, la vie, la lutte des femmes, elle.
Marie Denis, c’est beaucoup de personnages à la fois mais c’est surtout quelqu’un. D’elle, on a des images multiples, contradictoires mais cohérentes. Elle a, comme elle dit, l’apparence d’une femme de l’ancien temps, rassurante et réconfortante avec ses robes bien convenables et son air assorti. Mais, avec son style à ne toucher à rien et à rester dans le rang, une fois qu’elle eu fait six enfants, elle a trouvé qu’elle pouvait s’enfanter d’elle-même et écrire aussi. Elle s’est donné un nom, Marie Denis, et un peu de temps libre. Dans les années soixante, c’était beaucoup et dans son milieu aux traditions très familiales, ça paraissait énorme.
Quand elles offraient un souper tartines, ses amies disaient en se mettant à table : « Je vous ai fait un repas à la Marie Denis ». Déjà, Marie s’exposait par l’écriture.
Avec une force paisible, elle a été plus loin : Le petit livre rouge des femmes, c’est elle avec Jeanne, Suzanne et beaucoup d’autres. Ces pages furent un grand pas pour le féminisme en Belgique. La création de la maison des femmes, qu’elle raconte dans Dis, Marie, c’était comment rue du Méridien 79 ?, en fut un autre.
Ont suivi des livres, des articles dans La Relève, la Revue nouvelle, les Cahiers du Grif. La création de Voyelles.
Marie, c’est quelqu’un qui est en complicité, en connivence. Elle parle de la vie, de la mort, des femmes, avec une voix qui n’appartient qu’à elle. Forte de son bonheur, de cette vie heureuse et réussie avec un homme qu’elle aime, tous ces enfants qu’elle souhaitait, maintenant son plaisir de grand-mère, elle a décidé de « s’exposer ». Écrire, c’est se livrer à la critique, aux regards. L’extrême plaisir de son écriture qui vient bien, son narcissisme rayonnant qui la protège ne doivent pas faire oublier ses fragilités secrètes dont ils ne sont que l’écran protecteur, l’organisation de ses fuites, ses paniques intérieures, l’ambiguïté du mouvement qui la pousse au flux et au reflux.
M.D. : J’ai toujours écrit. J’ai longtemps conservé un roman que, petite fille, j’avais griffonné sur un cahier de brouillon. Il s’agissait d’une sombre histoire d’enfant trouvée style Semaine de Suzette. Dans mon pensionnat je faisais souvent les rédactions des autres et quand nous rêvions à notre avenir on disait : « toi, tu seras romancière ». Je savais que l’écriture me serait donnée ou du moins favorable.
Mon premier livre, Des jours trop longs, qui m’était venu vite et simplement, a été un succès. J’ai voulu y dire qu’être mère, ce n’était pas uniquement joyeux et glorieux, mais qu’il y avait l’autre versant, de travail, de lassitude, de révolte. Les deux mêlés. Pour écrire des choses aussi personnelles, j’ai pris un surnom fait d’un de mes prénoms et du nom d’une de mes arrière-grands-mères liégeoises qui envoyait de très belles lettres. Mais le secret fut vite éventé.
Autour de moi, cela a fait un petit scandale et l’homme de mon histoire s’appelant Étienne, on feignait de se tromper lorsqu’on disait bonjour à mon mari en lui donnant ce prénom. Certains me disaient « comment as-tu osé écrire tout ça ? », comme si c’était honteux de dire son quotidien, ses sentiments.
Avec L’odeur du père, dont les Temps Modernes ont publié de larges extraits, j’ai eu le prix Rossel. Là, c’est le titre qui d’abord, a choqué. Les odeurs, c’est un peu suspect et le prix a été annoncé dans le Soir comme Le père seulement.
On m’a alors parlé de Robert Morel, qui l’a édité et pour lequel aussi j’ai fait une Célébration des grands-mères. Ce texte-là, je l’ai écrit tout d’une traite, presque sans rature, comme s’il s’était bâti obscurément depuis longtemps dans ma tête, dans mon corps aussi.
Dis Marie, tu écris toujours ta vie ?Oui, c’est vrai. J’exprime ce que je vois, ce que je sens. Si je transposais ce serait d’un côté plus facile. Je pourrais dire plus de choses, être moins discrète. (Tu souris, mais je suis discrète, je t’assure, je fais très attention.) Donc je suis coincée par mon vécu mais je ne pourrais pas parler de ce que je n’ai pas éprouvé directement, intimement. Les événements, je les transpose par l’écriture mais pas davantage. Parfois on me dit : « pourquoi tu ne crées pas de personnages ? » Pour les penser, les animer on doit vivre avec eux, en eux. Or, moi, je ne peux pas. Je n’en ai pas envie. La vie me passionne de jour en jour, d’heure en heure. C’est pour ça que j’écris tous ces billets, ces petits tableaux. Je veux restituer ce que j’ai vu ou vécu tout de suite. Comme une photo. Et puis ma propre vie est bourrée de gens.
J’aurais pu ne pas me marier, ne pas avoir d’enfant ou un enfant pour moi toute seule comme j’en rêvais. Je n’ai pas eu ce courage, à cette époque-là, ou peut-être au fond, ça ne me convenait pas.
J’ai bien aimé la vie que j’ai vécue mais elle a certainement empêché l’autre, celle d’une œuvre, ou plus exactement je me tiens à la limite des deux. J’écris, mais de l’autobiographique.
Dis Marie, comment réagissent les gens qui t’entourent que tu mets en livres ?Je pense que les gens qui connaissent les auteurs et leur entourage réagissent toujours mal. Ils sont scandalisés. Pour L’odeur du père, des gens étaient choqués même sans lire. Mes proches étaient choqués que je parle de mes parents mais d’autres ont vraiment aimé comment j’ai fait le portrait de mes grands-mères ou comment j’ai restitué le personnage de mon père. Ce sont les lecteurs qui ne connaissent pas les personnes dont je parle qui s’y attachent le plus. C’est normal. Ceux qui les connaissent ont leur propre point de vue et ils considèrent que le mien est partial ou même faux. Ils font le procès de mon texte, au lieu de lire un livre. Quand même, ils sont le plus souvent emportés par mon écriture. Cette appropriation des gens qu’opère mon écriture, ce n’est pas une prédation négative : je les prends, je les berce, je les emporte dans mon texte, je les façonne en les aimant, je les ressuscite !
Si tu veux, dans mon écriture, j’aime « ravir » dans les deux sens du terme, c’est-à-dire prendre et charmer ceux dont je parle et ceux qui me liront. Je voudrais faire partager mon expérience. Je trouve que le monde est très dur. Je pense souvent à la mort. J’ai besoin de partager ça avec mes lecteurs(trices), de les prendre à témoin, que nous nous confortions et réconfortions ensemble.
Je dis le tragique de la vie, le fait qu’à la fois tout est vraiment gâché et tout aussitôt racheté par des choses inouïes et minuscules : le soleil, une rencontre, une parole, un livre. J’écris pour opérer une communion.
Dis Marie, c’est ce partage que tu as voulu continuer en racontant la maison des femmes ?Entre autres. Tout de suite, en pleine action, je prenais des notes. Cela me permettait à la fois de vivre à fond ce que nous faisions et d’en accepter la folie et les limites. Dès que j’ai commencé à rédiger, j’ai donné les trente premiers feuillets à lire. Certaines disaient : « Tout cela, nous l’avons fait ensemble et maintenant tu en fais ta chose. Tu étais un sujet parmi les sujets et maintenant tu es le seul sujet et, nous toutes, des objets. » Il est évident que celle qui écrit tient la lampe et déforme en éclairant. J’ai choisi des ombres et des lumières, involontairement. Une autre aurait montré différemment. Mais en même temps, c’est moi qui me suis imposé ce travail. Écrire est un plaisir intense et atroce. On jette, on recommence. J’ai commencé à rédiger en disant « je ». Mais ce n’était pas la bonne manière. Cela m’aurait forcée à être à la fois plus objective et plus subjective. J’ai rétabli le foisonnement indispensable en trouvant une autre construction. Le carnet d’or de Doris Lessing m’a donné l’idée de récits et de personnages entrecroisés. Comme dans un tissu, il y a la trame et la chaîne. Je raconte, puis je m’interpelle, je me mets en scène. Pour corriger cette subjectivité, j’ai glissé des documents, des choses qui risquaient d’être perdues, oubliées. Car ce que j’ai voulu faire aussi, c’est laisser une trace. Raconter ce que nous avons fait, montrer comment nous avons cru voir clair, pour que les choses restent acquises, pour que d’autres femmes puissent profiter de cette expérience.
La construction du livre fait que parfois je suis aussi regardée par les autres, et ces autres sont là, avec des prénoms changés, dispersés, amalgamés : ce sont à la fois des personnes réelles et des personnages de roman.
En écrivant ce livre souvent j’avais mauvaise conscience et j’arrivais à la Maison en disant à celles qui étaient là : « Mais c’est atroce ce que je suis en train de faire, je vous mange tranquillement ». L’acte d’écrire est un acte de captation. On se saisit de quelqu’un ou de quelque chose et on le fait sien, on le transforme. Or, le féminisme c’est l’anti-captation des femmes. Je suis obligée de vivre à la fois le « je suis femme et je suis vôtre » et le « je suis écrivain(e) et je vous prends ». Quand j’ai commencé à parler de mon livre, Catherine a dit : « on va le faire toutes ensemble ». Mais j’en ai fait une petite dépression, tellement il était déjà mien. Écrire est aussi un pour soi ; c’est respirer sa propre peau.
Dis Marie, que s’est-il donc passé dans cette maison pour qu’en te lisant on ait une telle impression de chaleur et de force ?On a été très glorieuses. On dégageait une grande force que les gens de l’extérieur sentaient très bien. On était formidables, ce n’est pas exagérer que de le dire. On a ouvert cette maison en 73. Le mouvement existait depuis deux ans, on avait écrit Le petit livre rouge et mis sur pied deux « onze novembre ». Nous commencions l’action avortement et nous étions très gonflées. Nous nous réunissions dans les cafés. Nous sentions que nous étions en nombre. J’ai eu l’idée de la maison parce qu’il me semblait que le moment était venu de nous donner une façade, d’avoir pignon sur rue, d’exister toutes ensemble vis-à-vis de l’extérieur. Nous voulions aussi, en même temps, vivre une société plus juste entre femmes. Nous venions de lire La moitié du ciel à quelques-unes et nous voulions commencer une expérience.
Les plus jeunes, les plus ardentes ont cru qu’entre nous ça allait être le paradis. Moi, j’avais trop de connaissance de la vie pour penser que nous puissions tellement nous entendre, comme si nous étions différentes des hommes et aussi des autres femmes. Cette utopie-là, je n’y ai jamais adhéré. Je voulais seulement qu’on s’affirme comme un groupe solide, cohérent, que le mouvement soit un groupe de pression et non plus seulement un ferment d’action provocatrice.
Tout de suite on nous a reconnues en tant que tel. Dans nos statuts, nous avons mis que nous voulions « une transformation de la société ». Nous n’avons pas parlé de l’épanouissement de la femme ou de sa promotion : c’étaient des mots anciens que nous n’aimions pas. Nous voulions changer le monde tout simplement. Il ne s’agissait pas d’utopie. Nous voulions plus de justice.
Ce n’est pas énorme comme exigence et nous savions que ce n’était pas pour demain. Nous étions patientes et un peu moralistes. Ce à quoi nous prétendions, nous avons voulu le mettre immédiatement en pratique même modestement : par exemple, pour prouver que les manuelles ne sont pas inférieures aux intellectuelles, nous avons mêlé les travaux et les responsabilités : nous faisions (en principe !) toutes la vaisselle et chacune pouvait écrire des slogans, répondre aux lettres, diriger les réunions.
Dis Marie, il y a eu aussi des tensions, des échos, des difficultés ?Bien sûr et j’en parle mais en essayant de montrer que cela aussi faisait partie du projet, que ce n’était pas si grave. On nous a en même temps reproché « l’esprit maison » tout en disant que la maison n’existait pas et n’était qu’un toit et un local prêté à certains groupes : le Grif, SOS viol, le groupe A, la self-défense, la formation à la vie politique.
Il faut dire que moi et quelques autres nous assumions tout : nous prenions les décisions des actions, nous faisions avancer les choses, nous organisions l’ensemble, mais aussi nous ramassions toutes les « merdes » : les vaisselles, les poubelles, acheter du papier toilette, faire les courses. Nous pensions à tout, tout le temps, nous faisions ce qu’il y avait à faire, alors bien sûr, nous avions ce fameux « pouvoir ». C’est normal, non ?
Dis Marie, et celles qui ont fait la Maison avec toi ?Maintenant que la Maison a déménagé, que d’autres ont pris le relais, nous ne nous rencontrons plus tous les jours. Mais il s’est passé entre nous quelque chose de fort et d’important qui a tissé un lien « à la vie, à la mort ». Nous nous connaissons, nous nous aimons et ce n’est pas si fréquent que ça qu’on aime vraiment et profondément beaucoup de monde. L’action commune, les pensées collectives, les jours vécus ensemble nous unissent. Mes amies d’avant m’étaient précieuses mais je n’avais pas eu l’occasion de travailler avec elles, et le travail soude. Avec les femmes de la maison, il s’agit de connivence, de solidarité très riche et très féconde.
En quelques années, sont sorties de derrière ces barreaux des choses très fortes. Au jour le jour, on le voyait moins car on n’avait pas le recul, on était mangé par les ennuis quotidiens et il y avait comme partout des petites horreurs. Mais cette maison, je m’étais proposée pour la faire et je savais qu’un jour pas très lointain, j’en partirais. Je m’y suis donnée à fond la première année et ensuite, je me suis désengagée et je l’ai quittée. Ce n’est pas de l’infidélité car quand je prends un engagement, je le tiens.
Simplement je le circonscris dans le temps. La maison a été très importante pour moi mais autour restait toujours la vie. Les femmes y baignent toujours : pour moi c’était ceux qui m’entourent et les confitures, mes enfants et un peu de tricot, lire aussi, parler, m’asseoir sur un banc dans le bas de la ville, regarder les gens. Je n’ai pas la force de renoncer à tout cela. Les hommes donnent l’impression quand ils ont un projet de s’y consacrer à fond, de ne faire que ça. Moi, je suis prise par une dispersion d’envies. Même dans les grands moments de la Maison alors que je n’avais que ça en tête, je n’ai jamais coupé mes arrières. Parmi nous, certaines ont quitté des hommes. Elles l’auraient fait sans cela mais ça s’est mis ensemble. Le féminisme leur a fait voir que cela n’allait pas et qu’elles perdaient leurs bonnes forces. Alors elles étaient prises davantage que moi, elles avaient besoin que la maison soit un lieu chaud et durable.
Dis Marie, que faisiez-vous pour ça ?Nous n’avons jamais voulu être une maison d’accueil mais une maison militante. Certaines venaient là comme à un club et comme ce n’était pas ce qu’elles attendaient, l’ambiance ne leur réussissait pas. Nous essayions d’être gentilles mais quand nous avions beaucoup d’ouvrage, on les mettait directement dans le coup et elles s’enfuyaient épouvantées. Parfois, des instituts psychiatriques nous envoyaient des femmes en difficulté. Cela marchait bien parce qu’empiriquement nous avions des méthodes à la Ollivenstein : elles aidaient à faire des bricoles, un petit classement, puis on les écoutait, on ne les bousculait pas quand elles étaient fatiguées par leurs pilules ou leur médicament. On buvait un thé ou un café bien chaud ensemble. Nous faisions ça par solidarité féminine et de plus nous avons toujours aidé les femmes qui venaient avec un problème comme un divorce, une solitude, un avortement, un mari violent. Beaucoup de femmes blessées sont passées rue du Méridien. Certaines se sont bien intégrées dans des groupes comme l’atelier, l’expression corporelle. D’autres étaient heurtées par ces jeunes militantes qui disaient à peine bonjour. À l’extrême gauche, on ne se donne plus la main, on se tient très raide ou à l’inverse on se jette dans les bras les unes des autres. Mais il n’y a plus l’entre les deux, le milieu de la politesse « ancien genre ». Il n’y en a pas beaucoup malgré cela qui sont parties furieuses.
Dis Marie, il y a quand même eu des furieuses ?Oui, un de nos problèmes a été l’exclusion du P.F.U. (Parti Féministe Unifié). Nous représentions une certaine gauche et un certain féminisme que nous considérions comme ouvert, intelligent et large et nous pensions que ce parti limitait la lutte des femmes et n’occasionnait pas une transformation de la société. Mais le refuser nous a été douloureux et nous étions loin d’être toutes d’accord à ce sujet.
Il y a aussi eu des difficultés avec les lesbiennes. Avec les lesbiennes comme groupe. Un sentiment d’exclusion. De leur part mais aussi de la nôtre. On s’est pourtant donné du mal pour s’entendre mais la confiance n’était pas suffisante. Il aurait fallu plus de temps.
Je ne sais pas s’il faut dire « furieuses » mais c’est vrai qu’il y a eu de grosses tensions, de grosses colères. Je pense que cela faisait partie de notre bonne volonté. Ou de notre utopie. Le mot sororité nous jouait des tours. Et puis il nous plaisait d’être un peu violentes. Cela faisait partie de notre renouveau !
Il y a eu les hommes. Certains au départ nous ont énormément aidées et nous les avons remballés après. C’était dur et injuste mais il fallait qu’ils comprennent que cette maison était la nôtre. Nous ne voulions pas en faire un ghetto et au début nous avions organisé un repas où ils pouvaient venir mais cela paraissait artificiel et nous avons cessé. Certains adoraient rester là à se faire dorloter et materner. Des femmes étaient reprises par le jeu et d’autres étaient exaspérées. De toute manière, il fallait que celles qui avaient été, pour une raison ou une autre, blessées par les hommes puissent trouver un lieu où ils n’étaient pas. Et puis comment parler devant eux de choses personnelles, intimes ? C’était impossible, mais nous ne les avons jamais refusés dans nos manifestations ou nos fêtes comme les 11 novembre, les vernissages, les cinéclubs et certains groupes de discussion.
Dis Marie, tu racontes tout ça dans ton livre ?Tout ça et beaucoup d’autres choses. Il me semble que je dis surtout l’ardeur que c’était.
Propos recueillis
par Jacqueline Aubenas.