Dominique Meeùs
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Christine Delphy, « Patriarchy, Domestic Mode of Production, Gender, and Class », 1988

Christine Delphy , Patriarchy, Domestic Mode of Production, Gender, and Class, Cary Nelson and Lawrence Grossberg (eds.), Marxism and the interpretation of culture , University of Illinois Press, Urbana , 1988, p. 259-267.
Translated by Diana Leonard … mais je ne trouve pas de quoi c’est traduit. Ce pourrait être d’un manuscrit non publié ailleurs, seulement pour ce livre.

What I study is not an ahistoric concept [patriarchy] that has wandered down through the centuries but something peculiar to contemporary industrial societies.

P. 260.

Ma position est que le patriarcat est une réalité, sans doute aussi ancienne que l’humanité elle-même. On est donc bien en droit d’en faire un concept historique. Ensuite, il faut étudier comment ce patriarcat s’articule avec les autres aspects (en particulier le mode de production) de différentes sociétés dans l’histoire, y compris bien sûr le capitalisme dans lequel nous vivons. Il ne s’agit en rien d’un « ahistoric concept that has wandered down through the centuries » et le patriarcat particulier à notre société est l’aboutissement de cette filiation ; on ne peut lui opposer cet « ahistoric concept ».

Je ressens « ahistoric » comme un procès d’intention, injuste, fait à celles et ceux qui proposent une vision historique. Bien sûr, elle développe ensuite : que quelque chose ait existé dans le passé n’est pas la clef de son existence présente (p. 261). Certains auteurs ont été a-historiques, mais il faut alors les nommer, pas émettre une insinuation contre tout le monde et n’importe qui. Elle critique « Many people », mais ne fait pas la moindre allusion à d’autres qui auraient été plus historiques. En fin de compte, elle refuse l’histoire quand elle écrit :

… that patriarchy is the system of subordination of women to men in contemporary industrial societies, that this system has an economic base, and that this base is the domestic mode of production.

P. 261.

C’est donc pour elle un mode de production de notre époque, sans lien avec le passé, à côté du capitalisme.

… one of the essential differences between the two modes of production is that domestic production is not paid but rather maintained. […] … the crucial distinction between a wage and retribution in kind…

P. 261.

Le travail salarié, lui aussi, « is not paid but rather maintained ». Le salaire n’est qu’en apparence rétribution du travail ; c’est en réalité un paiement pour la valeur de la force de travail. La travailleuse ou le travailleur travaillent gratuitement, mais en contrepartie, leurs frais d’existence (et de reproduction) sont pris en charge par les capitalistes. (Je développe cette idée dans une note de synthèse liée à mes notes de lecture sur le marxisme.) Elle a raison cependant de dire que ce n’est pas la même chose de recevoir de l’argent (cas des salariés et de certaines épouses1) que d’être entretenue (cas d’autres épouses) ou entretenu. (Je me demande si en disant ici « maintained » elle pense à quelque chose comme « kept women ».)

Notes
1.
J’ai eu l’impression, quand j’étais ouvrier en sidérurgie, où souvent les ouvriers ont une épouse qui ne travaille pas, que chez certains d’entre eux, il y avait une convention selon laquelle, non seulement l’épouse prenait en charge le travail ménager, mais aussi tout le souci de gérer le budget du ménage. L’ouvrier lui donnait toute la paie et recevait en retour de l’argent de poche. Pour le reste, il abandonnait et le souci de la gestion, et l’autorité. Cela demanderait une étude plus sérieuse qu’une impression personnelle et sans doute que, même dans les cas où mon esquisse serait juste, l’homme garde une autorité en dernier ressort ; il pourrait, en cas de conflit, reprendre le gouvernail.